Valorisation du patrimoine culturel : une stratégie s’impose
Selon le CESE, il devient urgent d’adopter une stratégie nationale pour la protection, la sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine culturel fondée sur l’effectivité des droits, le respect de la diversité culturelle et l’implication des mécanismes de démocratie locale dans sa gouvernance.
«Le patrimoine culturel avait besoin d’une forte impulsion en vue de se transformer valablement en richesse matérielle ayant un fort impact socioéconomique, en vue d’en faire un véritable levier de développement». C’est ce que confirment les différents acteurs auditionnés par le Conseil économique social et environnemental (CESE) dans le cadre de la publication de son avis intitulé: «Pour une nouvelle vision de gestion et de valorisation du patrimoine culturel».
En dépit des efforts importants entrepris et de la prise de conscience accrue des institutions et de la société civile quant à l’importance du patrimoine culturel, il reste encore du chemin à parcourir afin d’améliorer la gouvernance, renforcer et mutualiser les ressources financières et humaines des différents intervenants de ce secteur.
Les Reco’s du CESE
Dans son avis le CESE recommande de parachever les processus d’inventaire du patrimoine culturel, notamment le patrimoine mobilier et immatériel, et aussi de reconnaître ses composantes, son classement et sa sauvegarde, étant donné qu’il était sérieusement menacé de dissipation, d’oubli et de disparition. Le Conseil déplore aussi «la faible implication des territoires et du secteur privé dans la gestion et la valorisation du patrimoine culturel, ainsi que la faible appropriation du patrimoine culturel par la population».
Ces freins concernent aussi le retard accusé en matière d’utilisation des technologies digitales, au vu de leur importance dans le répertoriage du patrimoine culturel, son appropriation et sa transmission aux générations actuelles et futures, notamment pour les jeunes générations.
Dans cette logique, le Conseil appelle à l’adoption d’«une stratégie nationale pour la protection, la sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine culturel fondée sur l’effectivité des droits, le respect de la diversité culturelle et l’implication des mécanismes de démocratie locale dans sa gouvernance».
L’objectif serait de consolider et dynamiser les institutions ainsi que les outils opérationnels au service du patrimoine culturel en dotant «notamment le département en charge du patrimoine culturel de l’expertise et des moyens nécessaires lui permettant de cartographier, d’inventorier, de sauvegarder et de mettre en valeur le patrimoine culturel dans des conditions satisfaisantes et conformes aux normes internationales en vigueur», détaille le CESE dans son avis.
Une attention particulière devrait être accordée au patrimoine immatériel en réalisant des monographies régionales pour inventorier les richesses locales en la matière, mais aussi en renforçant sa codification et sa connaissance par des travaux académiques et scientifiques, en soutenant les porteurs du capital immatériel pour assurer la transmission de ce patrimoine.
Le CESE appelle aussi, entre autres, à garantir un financement national pérenne et à diversifier les sources de financement en ayant recours au partenariat public-privé et au tiers secteur pour la sauvegarde, la réhabilitation et la mise en valeur du patrimoine. Il est aussi appelé à favoriser les projets de mise en valeur du patrimoine culturel dans le milieu rural (architecture, ksours, kasbahs, chants, danses, traditions, art culinaire, etc.), notamment dans les zones montagneuses et/ou défavorisées et les intégrer dans les circuits touristiques culturels, mais aussi encourager les entreprises à se spécialiser dans les métiers de restauration des sites et monuments historiques.
Le CESE note qu’il faudrait aussi systématiser le recours aux technologies lors de la cartographie de l’inventaire et privilégier le recours aux services d’archivage digital.
Les avancées en matière de préservation
Le CESE relève, dans son avis, que le Maroc a accompli plusieurs avancées en matière de protection, de classification et de préservation du patrimoine culturel, matériel et immatériel. Il note dans cette logique «le lancement d’initiatives visant à valoriser certains éléments et expressions de ce patrimoine culturel, engendrant ainsi une dynamique socio-économique dans certains domaines». Ces dernières concernent, notamment, l’organisation d’événements culturels et artistiques, liés au patrimoine, dans plusieurs villes marocaines (Tan-Tan, Essaouira, Fès, Asilah, Rabat, etc.).
Ces manifestations ont contribué à positionner le Maroc sur le calendrier des rendez-vous mondiaux et à renforcer le rayonnement culturel de notre pays aux niveaux régional et international. Parmi les avancées figure aussi l’inscription, sur les listes du patrimoine mondial et du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco, de monuments, d’événements et d’expressions culturelles immatérielles, dont notamment : l’art de la tbourida, la danse de Tiskiwine, le Moussem de Tan-Tan, l’art Gnaoua, le Festival des arts populaires de Marrakech, le Festival des cerises de Sefrou, la ville de Rabat avec son aspect architectural et ses divers monuments historiques…
Le CESE cite, par ailleurs, la dynamique que connaît le secteur des musées publics ou privés, qui contribue pleinement à sauvegarder le patrimoine mobilier dans plusieurs villes et régions. D’ailleurs, plusieurs musées jouissent désormais d’une réputation confirmée, à l’échelle nationale et internationale, au vu de la richesse de leurs collections et de leur respect des normes muséales en vigueur.
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO