Maroc

Le warning royal contre les corporatismes

Le souverain a souligné que les nouvelles prérogatives dont disposent les magistrats doivent être avant tout «au bénéfice des citoyens». Un travail de «perfectionnement» de l’appareil judiciaire doit cependant être mené, malgré les avancées enregistrées.

Hier a débuté la Conférence internationale de Marrakech pour la justice. Une grand-messe pour les juristes marocains et internationaux, dont le thème principal est «L’indépendance de la Justice», un concept qui a pris une définition nouvelle au royaume depuis la passation de pouvoir en octobre 2017, entre le ministère de la Justice et le parquet général de la Cour de cassation, de la présidence du ministère public. Avec en parallèle l’institution du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire. Une lettre envoyée par le roi Mohammed VI aux participants, avant l’ouverture des débats, dénote de la vision tranchante du chef de l’État sur ce dossier, une vision basée avant tout sur «l’intérêt du justiciable». «Le Maroc a réalisé des avancées dans la mise en place d’un cadre institutionnel de son système judiciaire. Néanmoins, et à l’instar de tous les pays qui attachent une importance capitale à la justice, il reste préoccupé par les défis auxquels se trouvent confrontés les différents systèmes judiciaires à travers le monde. De ce point de vue, le premier impératif est de garantir l’effectivité de l’indépendance du pouvoir judiciaire dans le fonctionnement pratique de la justice. À ce propos, rappelons que le principe a été consacré, non pas au bénéfice des magistrats, mais à l’intention des justiciables et à leur profit. Le principe a ainsi créé un droit pour les justiciables et un devoir pour les magistrats».

La pression est donc clairement mise sur les juges. Ces derniers, qui ont depuis longtemps revendiqué, via leurs associations professionnelles, des textes «aux normes internationales» que ce soit en matière de gestion du corps de métier, d’amovibilité, ou de missions, se voient aujourd’hui offrir des conditions d’exercice, en tout cas législatives et procédurales, au diapason. Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire sera ainsi compétent pour décider des avancements professionnels, mutations et procédures disciplinaires. Il a également des attributions en tant qu’organe de consultation, mais aussi comme force de proposition dans la mesure où il est à même d’élaborer, à son initiative, des rapports sur l’état de la justice et du système judiciaire et de présenter des recommandations appropriées en la matière. Une donne nouvelle qui ne doit cependant pas être vue comme un luxe, mais une responsabilité : «La loi suprême fait de tout manquement de la part du juge à ses devoirs d’indépendance et d’impartialité, une faute professionnelle grave, induisant, le cas échéant, des poursuites pénales à son encontre». Une responsabilité avant tout vis-à-vis du justiciable : «Allant encore plus loin, le texte constitutionnel consacre les droits des justiciables et les règles de bon fonctionnement de la justice. Il assigne au juge la responsabilité de protéger les droits et les libertés des personnes et des groupes et de veiller à leur sécurité juridique. Outre l’accès garanti à la justice, il protège la présomption d’innocence et confirme le droit à un procès équitable et à un jugement rendu dans un délai raisonnable (…) Que le juge se montre totalement indépendant, impartial et neutre au moment de rendre une sentence, est un droit pour les justiciables. En effet, le magistrat ne doit fonder ses décisions que sur les règles de droit et il doit statuer exclusivement en son âme et conscience, guidé par ses seules convictions».

Et même si le souverain n’oublie pas de noter les avancées faites par le Maroc en matière d’assainissement de l’appareil judiciaire, il rappelle toutefois les chantiers encore en cours. Un travail de perfectionnement est encore à faire pour améliorer le rendement et accompagner les transformations économiques et sociales à l’œuvre dans toutes les sociétés. Pour cela, il importe notamment de faciliter l’accès au droit et à la justice. Une modernisation des législations nationales est toujours nécessaire pour les mettre en phase avec les changements et en conformité avec les engagements internationaux du pays, en particulier, ceux qui se rapportent aux droits humains. En outre, les mesures nécessaires doivent être prises pour que les décisions de justice soient prononcées dans des délais raisonnables. La justice pénale appelle même à «une attention particulière pour lui permettre de trouver un équilibre judicieux entre l’impératif de garantir les droits et les libertés et l’impérieuse nécessité de préserver les valeurs et les piliers de la société et de protéger le corps social contre tout danger, notamment au moment où notre monde est assailli de périls en tous genres, où les relations se complexifient constamment, où les dangers de la communication numérique s’accroissent avec les dérives que l’on sait et qui appellent des ripostes professionnelles et efficaces». 



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