Restrictions anti-Covid : retour des inquiétudes chez les professionnels
Le danger de la propagation de la pandémie est toujours présent, surtout après l’apparition de nouveaux variants dans le royaume. Du fait du relâchement observé sur le terrain, un scénario catastrophe n’est pas à exclure. La décision gouvernementale de renforcer les restrictions provoque la réaction de plusieurs responsables relevant de divers secteurs d’activité.
Le gouvernement a décidé de durcir les restrictions, à compter de ce vendredi 23 juillet à 23 heures, en vue de lutter contre la propagation de la pandémie de la Covid-19. La décision est tombée, et elle n’appelle pas de discussion ! Les déplacements nocturnes sont interdits à travers tout le royaume, de 23 heures à 4 heures 30, avec une dérogation pour les personnes exerçant dans les secteurs et activités dites essentiels, et celles représentant des cas médicaux urgents. L’objectif visé, à travers ces mesures préventives, étant de «préserver la santé des citoyennes et des citoyens, conformément aux recommandations du Comité technique et scientifique, et compte tenu de la hausse remarquable du nombre des contaminations et des décès enregistrés ces derniers jours», indique le gouvernement, qui souligne que la conjoncture actuelle exige le strict respect des orientations des autorités publiques et de l’ensemble des mesures de prévention adoptées par les autorités sanitaires, dont la distanciation physique, les règles d’hygiène et le port obligatoire du masque, afin de préserver les acquis importants, réalisés par le Maroc, dans sa lutte contre la pandémie.
Dans le secteur du transport, tous les opérateurs ne sont pas touchés par les mesures restrictives. «Les mesures annoncées par le gouvernement ne concernent que le transport de passagers. Le transport de marchandises n’est pas impacté, pour le moment», explique El Mootamid Abbad Andaloussi, président de l’Union régionale du transport et de la logistique du Nord (URTL NORD), relevant de la Fédération du transport et de la logistique de la CGEM (FTL-CGEM). Contacté par les Inspirations ÉCO, Aziz Bouslamti, président du GPPEM annonce une réunion des professionnels de l’évènementiel, le week-end du 23 au 25 juillet, pour convenir des actions à mener. Les agences de voyage, quant à elles, sont à l’arrêt, dans leur grande majorité. «Le secteur des agences de voyage est gravement touché par la crise. Cette décision ne change donc rien pour nous. On espérait avoir un minimum de visibilité, en perspective d’un démarrage début septembre.
Cependant, nous respectons les décisions officielles, et la santé des citoyens prime», réagit Khalid Benazzouz, président de l’Association régionale des agences de voyages de Casablanca-Settat (ARAVCS), et past-président de la Fédération nationale des agences de voyages du Maroc (FNAVM). Idem pour Amal Karioun, ex-président de la Fédération nationale des agences de voyages du Maroc, qui juge ces restrictions tout à fait logiques, dans le contexte actuel, et vu l’expérience de l’année dernière, avec un facteur de risque supplémentaire, lié à la venue des Marocains du monde. «Concernant notre secteur d’activité, entre les hôteliers qui privilégient les réservations en direct et l’OTA qui gère les réservation en ligne, nous n’avons plus que les yeux pour pleurer», se lamente-t-il.
Abdellah El Fergui
président de la Confédération des TPE/PME
En dépit du contexte alarmant, notre secteur d’activité va être impacté par de telles mesures, vu que c’est la haute saison pour nos entreprises (TPE-PME et Auto-entrepreneurs). Les déplacements de ces chefs d’entreprise seront affectés de nouveau par ces mesures, dont nous n’avons eu cesse de réclamer soit l’annulation soit la simplification, en se contentant d’attestations de déplacement, délivrées par les entreprises. Le fait d’exiger des attestations de déplacement, délivrées par les autorités, va bloquer les chefs des petites entreprises et leurs personnels au niveau des Bachaouias, donner lieu, encore une fois, à des barrages à l’entrée des villes et favoriser des abus, vu le vide juridique sur la durée de ces attestations et différents articles liées aux attestations de déplacement entres les villes et provinces. Les autorités doivent maintenir le contrôle pour que les cas de contamination n’augmentent pas, et laisser les TPE-PME et Auto-entrepreneurs travailler durant ces trois mois de haute saison, sinon la situation va aller en s’aggravant. Plusieurs chefs d’entreprises (TPE) cherchent des aides publiques ou financement pour exécuter leurs contrats, à défaut de quoi, ils risquent de devoir fermer leurs entreprises. Plusieurs d’entre eux ont déjà déclaré faillite, mais la situation ira en empirant pendant la basse saison, après la rentrée. Déjà la fermeture des locaux à 23 heures, pendant l’été et la haute saison, représente un obstacle majeur pour plusieurs activités de TPE qui s’activent jusque tard dans la nuit. L’événementiel et l’organisation de mariages n’ont pas travaillé pendant plus de 18 mois. Ce secteur a certes repris, mais avec plusieurs restrictions sanitaires… Et maintenant, voilà qu’on vient à nouveau les bloquer ! Sachant qu’au Maroc, la majorité des fêtes, mariages et événements culturels et sportifs, sont programmés courant juillet et août. Ces nouvelles mesures viennent aggraver la situation des TPE-PME qui peinent déjà à survivre.
Mohamed Elfane
Président de la Fédération marocaine de la franchise (FMF), vice-président de la Confédération marocaine des métiers de bouche.
La décision de resserrer les restrictions est logique, vu la remontée des cas de coronavirus. Cependant, nous pointons du doigt le fait de fermer et rouvrir à chaque fois. Quand le gouvernement a, il y a quelques semaines, pris la décision d’autoriser les réouvertures, il fallait accompagner cette décision par un dispositif de sensibilisation et de contrôle strict. Hélas, nous avons tous remarqué que pratiquement tout le monde s’est relâché. Maintenant, il faut attendre pour voir comment le contrôle va être opéré, vu que ces mesures limitent à 50 % la capacité d’accueil dans les cafés et restaurants. Nous attendons la semaine prochaine pour mesurer l’impact de cette décision. Mais de toutes les façons, les gens seront systématiquement en alerte, et il y aura donc moins de sorties, ce qui se traduira par un recul de notre chiffres d’affaire de 20 à 25%. Aujourd’hui, les autorités serrent les boulons, mais ce que nous craignons le plus, c’est un reconfinement en septembre. Une telle décision serait beaucoup plus préjudiciable. C’est pour cela qu’il faut absolument que le gouvernement et les préfectures mettent en place un dispositif, associant la police et les forces auxiliaires, pour prévenir et sensibiliser les citoyens, afin d’éviter de retomber dans le reconfinement.
Nidal Lahlou
Président délégué de La FNIH
La santé des citoyens reste la priorité pour les opérateurs touristiques, et nous sommes fiers d’avoir accompagné, de manière responsable, toutes les mesures prises par le Maroc pour limiter et gérer cette crise sanitaire inédite, mais surtout intense et transverse, qui a mis à mal la santé, l’économie et la vie sociétale. La gestion de cette crise, avec l’adhésion des citoyens, et plus particulièrement des opérateurs touristiques, a permis au Maroc d’être reconnu au niveau international comme exemplaire, voire précurseur. Lorsque les assouplissements avaient été décidés, les indicateurs de la pandémie et l’avancement de la campagne se voulaient rassurants. Pour les hôteliers, ces décisions venaient à point nommé. Bien évidemment, ils restaient conscients de la fragilité de la situation sanitaire, l’ensemble de ces assouplissements ne suffisant pas à une reprise effective de leurs activités. Ils ont, en conséquence, proposé à l’administration la vaccination de l’ensemble du personnel opérant dans le tourisme, avec le maintien de certaines mesures du contrat programme, ou accessoirement, leurs réaménagements. Aujourd’hui, c’est le retour des inquiétudes, des incertitudes et des menaces. Nous continuerons donc à être vigilants, en veillant à la mise en place du «Welcome Safely», en militant pour la vaccination de nos employés et de nos collaborateurs, en sensibilisant nos clients aux mesures préventives, mais aussi en continuant à oeuvrer pour sauver les emplois et l’outil de travail. Maintenant, la détérioration rapide des indicateurs de la pandémie interpelle, avec des indicateurs de plus en plus alarmants. Un retour en arrière constituerait une véritable catastrophe pour le tourisme et l’économie nationale.
Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO