Récession : le Maroc plus résilient que ses voisins
La pandémie de Covid-19 a brusquement interrompu plus de deux décennies de progrès socio-économiques soutenus au Maroc. En 2020, le pays a connu sa plus sévère récession depuis les années 1990. Dans son rapport semestriel de suivi de la situation économique du Maroc, la Banque mondiale présente les dernières tendances de la conjoncture et les effets des politiques économiques sur le monde des affaires dans le royaume.
La récession sera moins forte dans le royaume que chez ses voisins, annoncent les rédacteurs du rapport semestriel de suivi de la situation économique du Maroc. Après analyse des mesures prises pour accélérer la reprise du secteur privé marocain, la Banque mondiale (BM) présente les dernières tendances de la conjoncture et les effets des politiques économiques sur le monde des affaires. Celles-ci sont exposées dans le rapport semestriel de suivi de la situation économique du Maroc. Bien que l’économie marocaine montre quelques signes de reprise, la situation reste fragile étant donné la dégradation récente de la situation épidémiologique. Dans ce contexte incertain, l’institution de Bretton Woods table sur une croissance de 4% de l’économie marocaine en 2021. «Cette prévision est basée sur une récupération graduelle de la valeur ajoutée agricole, surtout à partir du milieu de l’année 2021, après plusieurs années de forte chute, pour cause de sécheresse. Dans ces projections, nous avons tenu compte du niveau des ambitions des autorités sur le volet de la vaccination. Avant cette annonce, nous avions une projection de 3,3%, que nous avons augmentée à 4», explique Javier Diaz Cassou, Senior Economist au Département économique de la Banque mondiale. Comparée aux marchés émergents, exclusion faite de la Chine, la prévision de croissance de l’économie marocaine est plus optimiste que celle des pays d’Amérique latine et d’Afrique subsaharienne. Cela est principalement dû à la stratégie de reprise
économique adoptée par le Maroc, font valoir les rédacteurs du rapport.
Risques à suivre de près
Cependant, plusieurs risques sont à suivre de près, notamment la marge de manœuvre plus réduite maintenant qu’au début de la pandémie, de la politique économique pour faire face à une éventuelle aggravation de la crise sanitaire ; la détérioration probable des conditions de financement extérieur face à des besoins de financement élevés. Sont également à suivre de près les défis de l’évolution des échéances en souffrance dans un contexte d’augmentation des délais de paiement, l’importante accumulation de passifs contingents liés aux programmes de garantie mis en place par le gouvernement ou encore le besoin de pousser la croissance économique au-dessus des niveaux pré-pandémiques. Une contraction du PIB réel de 6,3% est prévue en 2020. Comparées à l’Algérie et à la Tunisie, les prévisions de contraction de l’économie marocaine sont plus faibles. Comparée aux pays du Nord de la Méditerranée (Espagne, Italie, France), la récession sera beaucoup moins forte au Maroc. Conclusion : la Banque mondiale table sur une récession beaucoup moins forte dans le royaume que dans pratiquement tous les pays de son voisinage, et un retour au niveau préalable à la pandémie ne devrait pas intervenir avant 2022. Comme dans d’autres pays à travers le monde, la crise actuelle entraînera une augmentation considérable du déficit budgétaire jusqu’à 7,8% du PIB en 2020. Là encore, le Maroc est un des pays qui a le déficit le moins marqué. «Cela témoigne de la prudence fiscale des autorités dans la gestion de la crise», expliquent les économistes de la BM. La dette publique devrait dépasser 76% du PIB. Le déficit du compte courant devrait également augmenter pour atteindre 6% du PIB cette année. Pour les économistes de la Banque mondiale, les autorités marocaines ont mis en place une stratégie de relance ambitieuse, notamment l’universalisation de la santé, la reforme du système de protection sociale, la création du Fonds Mohammed VI, la reforme des entreprises publiques et du climat des affaires. «Pendant les derniers mois, il y a eu des mesures très ambitieuses que nous sommes en train de suivre de très près. Peu de pays ont adopté des mesures si ambitieuses. Le succès de ces réformes pourrait ouvrir une nouvelle ère dans le processus de développement du Maroc et établir les bases d’une croissance plus élevée dans les prochaines années», soutient Javier Diaz Cassou. L’ampleur de la stratégie nationale de reprise, évaluée à 11% du PIB, témoigne de l’ambition de la stratégie marocaine. Cet indicateur est beaucoup plus important que la moyenne des économies émergentes et en développement (moins de 6% du PIB). Bien que l’économie continue de se contracter, les derniers mois ont connu une reprise partielle des indicateurs de mobilité, et certaines exportations ont repris leur expansion pré-pandémique. Cependant, après une première vague relativement modérée, le nombre de contagions a commencé à augmenter à la suite du déconfinement, et le Maroc a maintenant du mal à aplanir la courbe et réduire la pression de la Covid-19 sur son système de santé.
Première récession depuis les années 1990
La pandémie de Covid-19 a brusquement interrompu plus de deux décennies de progrès socio-économiques soutenus au Maroc. En 2020, le pays devrait connaître sa première récession depuis les années 1990. La contraction économique qui a eu lieu au deuxième trimestre (coïncidant avec le confinement) est la plus importante jamais enregistrée. C’est le résultat de la combinaison des chocs de l’offre et de la demande et des chocs externes provoqués par la pandémie, mais aussi des effets que des conditions climatiques défavorables ont eus sur la production agricole. La crise a eu un impact sévère sur les emplois et les revenus des ménages, générant un pic de chômage et une détérioration des indicateurs de pauvreté et de vulnérabilité.
Modeste Kouane / Les Inspirations Éco