Organisation de manifestations sportives : une importante matrice de développement pour le Royaume

Décideurs et opérateurs économiques s’accordent à dire que l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations en 2025, puis du Mondial 2030, a joué un rôle déterminant dans la poursuite des plans de développement engagés au Maroc.
Convertir la passion pour le football en schéma directeur de développement. C’est le pari dans lequel ont décidé de se lancer les parties prenantes engagées dans l’organisation des futures manifestations sportives au Maroc, en l’occurrence la CAN 2025 et la Coupe du monde 2030.
Les dépenses publiques d’investissement pour ces projets culminent désormais, selon certains analystes à 100 milliards de dirhams ! Les engagements consentis, notamment dans la mise en place du réseau 5G sur 60% du territoire national, le doublement de la capacité aéroportuaire, le développement du réseau LGV et RER ou encore le doublement du réseau autoroutier, témoignent d’une volonté affirmée de faire des deux manifestations sportives un tremplin durable pour l’économie.
«Ces échéances sont l’occasion d’accélérer la mise en œuvre des projets prévue dans un calendrier initial exigeant», lance Chakib El Alj, président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), lors d’un meeting tenu le 21 mai, au Complexe Mohammed VI de Maâmoura.
La rencontre, organisée par la Fédération royale marocaine de football (FRMF) et la CGEM, a réuni décideurs publics et privés.
«Le Maroc n’a pas attendu la Coupe du monde pour investir, ces compétitions sont venues appuyer une démarche engagée depuis des années», a rappelé à cette occasion Fouzi Lekjaa, président de la FRMF.
Soft power
Du côté du patronat, les opérateurs voient dans les évènements à venir une occasion de fluidifier l’exécution de chantiers clés. Plus qu’un retour sur investissement immédiat, l’enjeu est de repositionner le Royaume dans les chaînes de valeur globales, à travers le renforcement de son attractivité et de son soft power.
Cette montée en ambition appelle néanmoins une montée en capacité. Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du Commerce, a ainsi alerté sur la «saturation de certaines chaînes de production». À ses yeux, le pays doit continuer à investir pour aligner ses moyens industriels sur ses ambitions. Une mise en garde sobre, mais révélatrice des limites actuelles de l’appareil productif national. Mais le tableau n’est pas totalement sombre.
Le Maroc a enregistré de belles avancées, notamment sur le volet connectivité. Le rail a bénéficié d’un effet d’entraînement non négligeable. Une nouvelle ligne à grande vitesse de 430 km, dotée de 53 milliards de dirhams, reliera Kénitra à Marrakech avant de filer vers Agadir, sécurisant un corridor logistique vital pour le tourisme et l’industrie.
Dans les airs, l’Office national des aéroports (ONDA) double ses capacités en vue d’atteindre les 80 millions de passagers en 2030, avec l’ouverture programmée d’un nouveau terminal à Casablanca et l’agrandissement d’Agadir. La connectivité numérique n’est pas en reste.
L’ANRT accélère le déploiement de la 5G : 25% de la population devrait être couverte fin 2025, et 70% à l’horizon 2030. Maroc Telecom et Inwi ont, à ce titre, investi 4,4 milliards de dirhams pour joindre fibre et antennes, convaincus que l’événement dopera les usages tout autant que les tribunes.
«Le déploiement de la 5G permettra de réduire considérablement la facture énergétique de notre pays, le développement des lignes à grande vitesse permettra de désenclaver des zones», souligne Chakib El Alj.
Pérenniser l’activité
Le tourisme, qui affiche une dynamique très positive depuis quelques mois, se veut la pièce maîtresse de l’échiquier. Le pays a accueilli 17,4 millions de visiteurs en 2024, un record qui devance de deux ans les objectifs initiaux. Près de 350 projets hôteliers sont sortis de terre en deux ans, et les recettes ont franchi la barre des 104 milliards de dirhams.
«Ces résultats ne doivent pas nous rendre amnésiques», insiste la ministre du Tourisme, Fatim-Zahra Ammor, rappelant qu’il faudra transformer l’afflux ponctuel en fréquentation pérenne.
Au total, l’enveloppe publique et privée déjà identifiée frôle les 150 milliards de dirhams, entre stades, transport, télécoms et énergie. En dehors de l’arène de foot, le Maroc vise un objectif stratégique dans l’optique de repositionner le Royaume dans les chaînes de valeur mondiales, et garantir une meilleure répartition des ressources dans les territoires.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO