Sports

Mondial 2030 : le Grand stade Hassan II, reflet de la puissance du Maroc

François Clément
Président Populous France

Au moment d’accueillir la Coupe du monde de football en 2030, le Maroc devrait disposer du plus grand stade jamais construit. Longtemps évoqué comme un serpent de mer, le futur Grand stade Hassan II de Benslimane devrait sortir de terre à temps pour le coup d’envoi de la grand-messe du football international. Avec ses 115.000 places prévues et l’ensemble des équipements dont il disposera, il sera un candidat sérieux pour concurrencer les enceintes espagnoles dans l’optique d’abriter le match le plus important du tournoi : la finale. La question a été soulevée lors du World Football Summit (9-10 avril) qui s’est tenu à Rabat. Un évènement auquel prenait part François Clément, président de la filiale française du cabinet Populous, qui fait partie du consortium d’architectes chargé de la conception du futur écrin.

Vous avez déclaré que le futur stade de Benslimane serait un reflet de la puissance du Maroc. Dans quel sens ?
Le Grand Stade Hassan II est le stade en devenir qui sera le plus grand stade du monde. Cette enceinte sera une véritable «machine de guerre» capable d’abriter non seulement les matches du championnat marocain, mais aussi d’accueillir une Coupe du monde, des Coupes d’Afrique, et pourquoi pas des Jeux olympiques, ce qui serait une première en Afrique.

Les premières images de la conception qui ont circulé sont assez impressionnantes. Que pouvez-vous dire des spécificités techniques de cette enceinte ?
En règle générale, des stades de très grande dimension sont aussi des stades d’athlétisme avec du public qui se trouve très loin de la pelouse. Dans le cadre de l’appel d’offres qui a été lancé par le Royaume, nous avons conçu un stade dont les gradins seront au plus près de la pelouse. Un stade à l’anglaise. C’est-à-dire que nous allons avoir 115.000 personnes qui seront regroupées au plus près avec une organisation des gradins qui donne la part belle aux deux grands clubs de Casablanca, le Raja et le Wydad, pour lesquels nous avons conçu deux kops qui seront équivalents – si ce n’est plus impressionnant – à celui du stade de Tottenham que nous avons réalisé et livré en 2019 et qui est un stade de 63.000 places.

Quid de la réflexion qui a précédé et guidé tout le travail de conception ?
Avec nos architectes associés (Oualalou + Choi, ndlr), nous avons réalisé qu’il y avait un besoin de traiter la dimension extraordinaire des espaces dont nous parlons. C’est quand vous voyez passer un oiseau dans ces espaces que vous en réalisez l’immensité. Et ces espaces font écho à celui que nous avons conçu sous le grand moussem qui sera érigé tout autour de ce stade pour accueillir les visiteurs.

Autour de ce stade de 115.000 places, il y aura donc cette tente qui va recouvrir l’ensemble et accueillir des spectateurs de toutes les nations qui viendront assister aux matches. D’où l’importance de l’échelle de ce stade dont la jauge est démentiellement grande. Il y avait aussi la nécessité de le couvrir de manière extrêmement fine et élégante. Il fallait ensuite être en mesure de proposer une image qui soit un marqueur pour le Maroc et l’ensemble du continent africain.

C’est alors que vous avez pensé à une tente… C’est le fruit d’un travail que nous avons réalisé avec Tarik Oualalou. Le point de départ était d’ancrer ce stade dans son environnement :
un stade casablancais, marocain, africain et qui parle au monde, vu que c’est le continent africain qui accueille le reste du monde. Il y avait cette notion du moussem qui est ce moment de communion où les tribus se retrouvent.

Au-delà, il y a eu l’inspiration de la tente, l’élément simple que l’on peut mettre en place facilement pour se protéger. Donc vous avez deux dimensions : le moussem pour accueillir, la tente pour protéger. Cette tente a été développée avec des latisses en aluminium dont l’inspiration vient directement des coursives du souk de Marrakech.

Ce sont des éléments qui vont pouvoir protéger de la lumière, créer des ombres, mais aussi laisser passer de l’air, favorisant une ventilation naturelle. Cela nous permet de créer un écosystème sous la tente qui va être l’écho de la forêt de Benslimane qui est juste à côté. C’est l’endroit où les Casablancais viennent pour faire des pique-niques.

Et comme pour toutes les tentes, il faudra baisser la tête pour entrer…
En effet. Il y a une volonté de beaucoup d’humilité. Baisser la tête au moment de rentrer et se retrouver dans cet espace extraordinaire qui, lui, est l’antichambre de l’espace de l’aréna à l’intérieur. Donc quand le public va s’approcher du stade, il va pouvoir appréhender cette grande tente, baisser la tête au moment de rentrer sous la tente, et passer dans cette antichambre végétalisée, avant de rentrer dans le cœur battant du bâtiment, l’arène.

Si l’on résume, ce sera un stade multifonctionnel, intégrant une dimension écologique, et disposant d’un important cachet culturel…
Tout à fait. C’est la notion même du moussem et du regroupement. Il ne faut pas oublier que lors d’une Coupe du monde, vous n’accueillez pas que le Maroc, vous n’accueillez pas que l’Afrique. Vous accueillez les supporters de l’ensemble des équipes qui sont amenées à jouer. Ce sont des moments transculturels. Ce sont des moments où les cultures se rencontrent très souvent d’une manière tout à fait sereine. Vous savez, nous vivons des moments difficiles dans certaines parties du monde. Et les événements sportifs sont des moments qui permettent aux gens de se retrouver sans avoir à se taper dessus.

En termes de délai, pour un chantier aussi monumental, sommes-nous dans les temps ?
Oui, tout à fait ! La Coupe du monde est en 2030. Et nous sommes en 2025. Nous travaillons avec des institutions dont l’Agence nationale des équipements publics (ANEP), avec laquelle nous réalisons actuellement le stade du Complexe sportif Moulay Abdellah de Rabat qui a commencé il y a moins de deux ans et qui va être livré très rapidement, puisqu’il va être utilisé pour l’organisation de la CAN 2025.

Donc, nous travaillons avec des gens qui sont en mesure de livrer, et avec un terreau économique qui a démontré sa capacité à s’organiser. On parle de méga-infrastructures, présentant des défis techniques complexes. Et le Maroc a justement démontré sur les deux dernières années sa capacité à mettre en œuvre la vision du Roi Mohammed VI et à développer de bonne manière des infrastructures sportives de très haut niveau.

Puisqu’on en parle, où en est le chantier du futur Grand stade Hassan II ?
L’ensemble des remblais et déblais prévus sur les 110 hectares du projet ont déjà été réalisés. Et l’ANEP va lancer un appel d’offres pour la réalisation. Le projet avance dans le bon sens et les personnes qui y travaillent sont dans les temps.

Peut-on avoir un horizon pour la livraison ?
Ce n’est pas à moi de me prononcer sur ce genre d’informations. La seule chose que je puisse vous dire c’est que Populous a apporté son concours à l’ANEP et au Royaume pour leur permettre de livrer, de concevoir, de construire et de mettre à disposition un stade de 69.000 places, qu’est le stade Moulay Abdellah, dans les temps, pour l’organisation de la CAN 2025. C’est l’objectif qui nous avait été imposé et nous sommes en train de le réaliser. Il n’y a aucune raison pour que la donne soit différente pour le Grand stade Hassan II à Benslimane.

La question de la rentabilisation des infrastructures en dehors des compétions pour lesquelles elles sont construites se pose également. Comment cette dimension a-t-elle été intégrée dans la conception du stade de Benslimane ?
Parler d’utilisation multifonctionnelle, c’est dire que quand il n’y a pas de match de football, l’équipement peut être employé à d’autres fins. Il y a plusieurs manières de réaliser cela. Vous devez savoir que ces équipements doivent répondre à des cahiers des charges qui sont assez stricts et qui sont mis à disposition par la FIFA et par la CAF. Ainsi, l’ensemble des salons qui sont demandés par la FIFA peuvent être utilisés pour organiser des conférences. Par exemple, actuellement, sur le stade de Strasbourg, nous réalisons un stade dans lequel un des salons est en fin de compte un restaurant toute l’année, et il sert de salon VIP lors des jours du match.

Il y a un autre enjeu d’ordre technique, c’est celui concernant les accès. Comment parvenir à ce que le stade, les jours de grand événement, n’occasionne pas de problème de circulation ou d’autre nuisances pour les riverains ?
Alors, pour cela, le maître d’ouvrage a recours à des consultants qui sont spécialisés dans les mouvements de foule et dans les transports. Nous travaillons actuellement sur le stade de Casablanca, mais aussi sur le stade de Rabat avec une société spécialisée dans les questions d’accessibilité, de mouvements de foule et de transport. Il y a un gros travail qui est fait sur le maillage signalétique autour du stade, qui est fait en liaison aussi avec toute la billetterie. Il s’agit donc de s’assurer que les gens qui ont un billet et qui sont dirigés vers un accès précis aient toutes les informations nécessaires.

Quid de l’aspect sécurité ?
Quand vous avez un stade avec 60.000 ou 70.000 personnes, il y a des enjeux qui sont gérés par la sûreté : comment positionner de la meilleure des manières l’ensemble des tourniquets afin de diluer l’ensemble des accès autour du stade ? Comment éviter les goulots d’étranglement ? Comment s’assurer que l’ensemble des spectateurs puisse accéder de la manière la plus simple à leur siège ? Autant de questions auxquelles la signalétique du stade permettra de répondre.

Le stade de Benslimane aura-t-il les arguments pour permettre au Maroc d’abriter la finale du Mondial ?
Tout ce que je peux dire, c’est que le Grand stade Hassan II de Benslimane sera prêt à temps pour pouvoir organiser la Coupe du monde 2030. Ce sera un stade de 115.000 places répondant à toutes les normes pour pouvoir accueillir la finale. Les architectes, et les concepteurs que nous sommes, feront tout ce qui est possible pour relever ce défi. Le reste ne relève pas de notre ressort.

Darryl Ngomo / Les Inspirations ÉCO



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