Opinions

Fuite des cerveaux : il faut sauver les soldats ingénieurs !

Par Hamida Benlemlih
Directrice générale developers institute Maroc

La fuite des cerveaux est un phénomène auquel les pays émergents n’échappent pas, et ce depuis plusieurs décennies. Mais pas que, les pays développés en souffrent également. En France, par exemple, les profils expérimentés sont de plus en plus attirés par le vent du large. Ils sont ainsi entre 60.000 et 80.000 chaque année à tenter l’aventure en dehors de leur pays. Le Maroc ne déroge pas à cette règle, avec la fuite des cols blancs issus de la majorité des secteurs d’activité, ayant une forte valeur ajoutée pour la croissance économique du Royaume.

Les ingénieurs, notamment, font partie de ces talents qui quittent le pays, en quête de nouveaux horizons, cherchant à renforcer leur expérience, et à valoriser au mieux leur parcours et leurs connaissances pointues. Ces talents, qui migrent vers d’autres contrées, entendent par ailleurs améliorer leur situation financière, ce que le marché local ne peut (ou ne veut pas ?) leur offrir. Mais jusqu’à quand ? Le phénomène se doit d’être contenu, et pourquoi pas éradiqué ! La situation est elle aussi grave ? Il faut rappeler que le Maroc fournit, depuis plusieurs années, des efforts considérables pour rehausser le niveau de ses compétences humaines, en vue d’en tirer un bénéficie légitime par la suite. Le problème est que l’élite nationale demeure toujours attirée par les avantages qu’offrent les pays à l’étranger, notamment l’Europe ou encore les États-Unis, voire même l’Asie.

Les ingénieurs marocains sont désormais présents partout à travers le monde. Selon les recensements les plus récents, il s’avère que ce sont plus de 600 ingénieurs qui quittent annuellement le pays, pour postuler, ailleurs, à des postes plus valorisants, une meilleure organisation d’entreprise, ou tout simplement une meilleure couverture sociale avec, notamment, l’accès à des soins de qualité ou encore un système d’enseignement performant pour leurs enfants. En parallèle, le fait est que les «cerveaux» marocains sont particulièrement sollicités et nombre d’entreprises étrangères sont à l’affût de tels profils. Et le Maroc en dispose au vu de la qualité de la formation qui a connu un bond remarquable ces dernières années. Ce sont des ingénieurs Big Data, ingénieurs web, architectes système ou encore des ingénieurs consultants qui sont «interceptés», dès leur parcours académique achevé.

Pourtant, nos entreprises sont aussi en manque de ces profils pointus sans arriver à en trouver suffisamment. Avec la montée en puissance des opérateurs nationaux, surtout dans les domaines technologiques avancés, elles peinent à dénicher ces oiseaux rares et souffrent d’un turnover important… D’où un précieux temps perdu à recruter, puis à former des profils de valeur qui iront faire le bonheur de concurrents étrangers ! L’exode de ces ingénieurs représente aussi une lourde charge financière pour l’État. Selon une récente déclaration du ministre de l’Industrie et du commerce, le pays débourse environ 2,5 millions de dirhams pour former un ingénieur tout au long de son cursus, ce qui n’empêche visiblement pas beaucoup de ces bénéficiaires de faire le choix du départ. À la lumière de la croissance que notre pays connaît dans plusieurs domaines, l’enjeu est important. Il devient, de ce fait, impératif de sédentariser ces ressources humaines, en les incitant à contribuer localement au développement et à l’enrichissement du Royaume. Il est désormais clair que les alertes, déjà enclenchées depuis plusieurs années, iront en s’intensifiant. Et le Maroc a plus besoin que jamais de l’ensemble de ses forces vives pour assurer une relance économique fortement impactée par les deux crises successives du Covid-19 et de la guerre en Ukraine.



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