Maroc

Éducation : les ambitions du PLF 2026

Face aux défis de l’employabilité et des disparités territoriales, la note d’orientation du PLF 2026 structure sa vision autour d’un triptyque éducatif intégré : écoles de leadership, écoles de la deuxième chance et alternance, socle d’un développement humain aligné sur les ambitions industrielles du Maroc. Détails.

100.000 apprentis, 35.000 décrocheurs «requalifiés», un milliard de dirhams… La note d’orientation du PLF 2026 mise-t-elle sur des effets d’annonce ou prévoit-elle une réelle synergie ANEP-OFPPT-ANAPEC pour sortir le Maroc du piège du chômage des jeunes ? Le futur nous le dira.

Cette note d’orientation place l’éducation et l’emploi au cœur de la transition vers un «Maroc émergent». Avec trois annonces structurantes – la généralisation des écoles de leadership, l’extension des écoles de la deuxième chance (35.000 bénéficiaires visés) et l’objectif de 100.000 apprentis en alternance d’ici fin 2026 –, le gouvernement mise sur une requalification systémique du capital humain. Analysons les implications concrètes pour les jeunes, les territoires et l’économie.

Généralisation des écoles de leadership : une refonte pédagogique «intégrée»
La note d’orientation du PLF 2026 acte la généralisation définitive du modèle des «écoles de leadership» d’ici 2026, après son déploiement massif en 2024 et 2025. Ce dispositif, qui touche déjà 1,3 million d’élèves dans 2.600 établissements, repose sur une approche pédagogique intégrée articulée autour de trois piliers fondateurs : «l’amélioration du niveau pédagogique, la qualification des enseignants et l’équipement des salles de classe en outils numériques».

Pour les élèves, cette refonte devrait marquer une rupture avec les enseignements cloisonnés traditionnels, privilégiant désormais le développement de compétences transversales (leadership, pensée critique, maîtrise du numérique) dès le primaire. Une méthodologie qui vise à former des profils adaptés aux défis économiques futurs, comme le souligne explicitement la note d’orientation.

«Le capital humain formé selon ce modèle intégré sera prêt à accompagner le rythme des grands chantiers nationaux», notamment dans les secteurs stratégiques (digital, énergies renouvelables, aéronautique…).

Pour les enseignants, cette généralisation implique une formation recentrée sur l’innovation pédagogique et l’usage des technologies éducatives, avec un objectif implicite de réduction des inégalités territoriales grâce à un équipement numérique uniformisé. Une transformation systémique, en adéquation avec la Feuille de route 2022-2026, qui consacre ainsi une vision où l’école devient le socle d’un «développement territorial intégré», préparant directement la base humaine nécessaire à l’affirmation du Maroc parmi les nations émergentes.

Écoles de la deuxième chance : 35.000 bénéficiaires pour lutter contre l’exclusion
Le PLF 2026 devrait faire de l’extension du réseau des «écoles de la deuxième chance» un levier stratégique de lutte contre le décrochage scolaire et l’exclusion sociale. Alors que 23.000 jeunes bénéficient actuellement du dispositif dans 227 centres à travers le Royaume, l’objectif est d’atteindre 35.000 bénéficiaires en 2026, avec une couverture territoriale élargie à 400 centres d’ici 2030.

Pour les décrocheurs, ce modèle devrait offrir un parcours sur-mesure combinant remise à niveau scolaire et acquisition de compétences socio-professionnelles, constituant une alternative crédible à la marginalisation. La note d’orientation le présente sans ambiguïté comme un «levier stratégique contre l’exclusion des jeunes».

Pour les territoires, cette extension réduit drastiquement les disparités d’accès : 62 centres supplémentaires sont actuellement en phase finale d’équipement (notamment à dont Dakhla-Oued Eddahab et Marrakech-Safi), ciblant prioritairement les zones rurales et périurbaines.

Pour le marché du travail, ce dispositif devrait agir comme un canal d’intégration ciblé vers les secteurs en tension structurelle (BTP, tourisme, agroalimentaire), grâce à des partenariats opérationnels avec les Cités des métiers et des compétences (CMC) – dont sept sont pleinement fonctionnelles (comme Tanger ou Casablanca), deux en phase d’équipement, et trois affichant un taux d’avancement supérieur à 80%. Une articulation territorialisée qui devrait permettre de transformer l’urgence sociale en opportunité économique, en adéquation avec la Feuille de route pour l’emploi à l’horizon 2030.

Alternance : 100.000 apprentis/an, un «chaînon manquant» vers l’emploi
La généralisation de la formation en alternance à tous les secteurs économiques, avec un objectif de 100.000 apprentis par an d’ici fin 2026, représente une refonte majeure de l’insertion professionnelle. Pour les jeunes, ce dispositif crée un parcours d’insertion accéléré combinant apprentissage théorique (dispensé par l’OFPPT et les CMC) et immersion pratique en entreprise, répondant à l’impératif du PLF d’«intégration des parcours entre formation et marché du travail».

Cette approche duale réduit le décalage entre compétences académiques et besoins réels des filières productives. Pour les entreprises, particulièrement dans les secteurs industriels stratégiques (automobile, aéronautique, énergies renouvelables) confrontés à des pénuries de main-d’œuvre qualifiée, l’alternance offre un vivier de talents «sur mesure», aligné sur leurs exigences opérationnelles et leurs chaînes de valeur.

La note d’orientation du PLF 2026 souligne que cette dynamique soutient directement la création de «nouveaux emplois décents» via les grands chantiers d’infrastructures, tout en répondant à un enjeu macroéconomique central : la réduction du chômage des jeunes non diplômés, objectif clé de la «Feuille de route pour l’emploi à l’horizon 2030». Ce mécanisme devrait agir ainsi comme un stabilisateur social tout en alimentant les secteurs prioritaires identifiés par les stratégies nationales.

Synergies systémiques – atouts et écueils sous-jacents
Le triptyque éducatif du PLF 2026 – leadership scolaire, deuxième chance et alternance – s’articule en un continuum cohérent : les écoles de leadership forment le socle dès le primaire ; les écoles de la 2e Chance rattrapent les décrocheurs ; l’alternance finalise l’insertion via les CMC).

Cette architecture devrait répondre à la logique de «développement territorial intégré» en créant un maillage dense (400 centres de la 2e chance prévus) et en ancrant les formations aux spécificités locales (ex. : alternance adaptée aux Zones industrielles intégrées régionales).

Toutefois, deux défis critiques subsistent. Sur le financement d’abord : si la note d’orientation du PLF mentionne des enveloppes sectorielles, notamment 300 MDH/an pour l’innovation industrielle, attendons de voir l’enveloppe budgétaire qui sera fixée pour les trois dispositifs face aux coûts d’extension (équipement numérique, infrastructures des centres…).

Pour la coordination, l’efficacité repose sur l’interopérabilité entre l’ANEP (politique éducative), l’OFPPT (formation), l’ANAPEC (insertion) et les régions – un défi reconnu par la création d’une «Unité de consolidation des données» chargée d’harmoniser les données emploi. La réussite dépendra de la capacité à transformer cette vision systémique en actions synchronisées sur le terrain, condition sine qua non pour atteindre l’objectif d’un taux de chômage de 9% en 2030.

Un triptyque stratégique pour l’inclusion productive

La note d’orientation du PLF 2026 consacre l’éducation et l’emploi en leviers stratégiques d’une inclusion productive. Ainsi, pour les jeunes, le triptyque leadership scolaire-2e chance-alternance devrait sécuriser les parcours continus du primaire à la vie active, transformant l’école en tremplin vers l’emploi stable plutôt qu’en filtre social.

Pour l’industrie, il répond aux besoins critiques en main-d’œuvre qualifiée dans les «secteurs à haute valeur ajoutée» (automobile, digital, aéronautique), alignant l’offre de compétences sur les ambitions du Plan d’accélération industrielle et des mégaprojets (dessalement, énergies vertes…).

Pour les territoires, il incarne une lutte concrète contre les disparités via l’ancrage local des formations (400 centres 2e Chance, alternance calée sur les Zones industrielles intégrées), matérialisant la promesse de «justice territoriale».

Ce modèle, en connectant capital humain et souveraineté économique, pose les jalons d’un «développement territorial intégré» où chaque jeune devient un acteur du Maroc – à condition que la synchronisation opérationnelle (ANEP-OFPPT-ANAPEC) et le financement pérenne des dispositifs transforment cette vision en réalité tangible pour les nombreux citoyens encore en attente d’inclusion.

Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO



PLF 2026 : cap sur l’investissement et l’inclusion


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