Maroc

Tourisme de croisières : le Maroc revient à quai

Le marché international des croisières a retrouvé et dépassé ses niveaux d’avant-Covid, porté par des flottes modernisées et des itinéraires toujours plus variés. Le Maroc, qui avait connu un recul marqué dans les années 2010, voit ses ports reprendre place sur les cartes des grandes compagnies. Et les voyageurs marocains, longtemps absents de ce segment, découvrent à leur tour les atouts d’un tourisme encore perçu comme un luxe.

En 2024, les compagnies de croisières ont accueilli plus de 34 millions de passagers à travers le monde. Les prévisions annoncent une progression à près de 38 millions dès cette année, ce qui illustre une tendance solide, portée par un appétit intact pour les voyages maritimes.

Les chiffres d’affaires atteignent désormais des sommets, oscillant entre 25 et 44 milliards de dollars selon les méthodes de calcul, et les projections annoncent une croissance continue pour les prochaines années. Les Caraïbes continuent de régner sur le marché, concentrant la majorité des itinéraires, tandis que la Méditerranée confirme sa place de destination phare.

Les croisières d’exploration, qu’elles soient polaires ou tropicales, séduisent un public en quête d’expériences uniques. Les armateurs investissent massivement dans des navires toujours plus innovants, capables de transporter plusieurs milliers de passagers tout en offrant des services variés, du théâtre au parc aquatique, en passant par des restaurants gastronomiques et des espaces de bien-être.

Sur le plan international, quelques géants dictent les grandes orientations. Carnival Corporation & plc, groupe américano-britannique, reste le leader incontesté, avec plus de 40% des passagers mondiaux. Royal Caribbean Group, né d’une alliance américano-norvégienne et basé à Miami, détient plus d’un quart du marché et mise sur des navires emblématiques comme ceux de la classe Oasis ou Icon. MSC Cruises, ancré entre l’Italie et la Suisse, poursuit une croissance rapide et affiche des ambitions mondiales grâce à une flotte qui se modernise à grande vitesse.

Cette domination n’empêche pas l’arrivée de nouveaux acteurs sur des segments plus spécialisés, qu’il s’agisse de croisières de luxe ou de petites unités hautement personnalisées. L’essor de ces offres diversifiées alimente une dynamique où le gigantisme côtoie l’intimisme, et où chaque voyageur peut trouver la formule qui correspond à ses attentes et à son budget.

Maroc : un lent retour après l’âge d’or
Le Maroc a connu un véritable âge d’or au début des années 2010, accueillant jusqu’à un demi-million de croisiéristes par an. Mais les années suivantes ont vu un recul marqué, jusqu’à tomber à environ 227.000 passagers en 2018. La crise sanitaire a ensuite quasiment figé toute activité, les escales devenant rares et souvent annulées.

Depuis deux ans, le pays retrouve peu à peu sa place sur la carte mondiale des croisières. Tanger Ville a accueilli 104.000 passagers en 2024, un chiffre qui témoigne d’un regain d’intérêt des compagnies pour cette escale stratégique.

Agadir, fort de son image balnéaire et de ses accès vers le Souss et l’Atlas, voit ses plannings se remplir à nouveau. Casablanca, porte d’entrée vers la métropole et ses environs, reprend également une place dans les itinéraires, notamment pour les croisières transatlantiques et les boucles combinant Méditerranée et Atlantique.

Une programmation 2025 en nette hausse
L’année 2025 confirme cette reprise. Au total, le Maroc accueillera au minimum 71.400 passagers en 2025 rien qu’avec ces escales déjà inscrites dans les plannings publics, un chiffre qui pourrait grimper avec les ajouts de dernière minute.

À Agadir, les programmes affichent au moins 20 escales entre octobre et décembre, avec des navires qui transportent en moyenne 1.800 passagers. Cela représente plus de 36.000 croisiéristes attendus, dont une grande partie débarquera pour profiter de visites et d’excursions. Tanger Ville démarre sa saison dès le mois d’août et accueille ensuite un rythme soutenu jusqu’en décembre, avec des paquebots qui transportent souvent plus de 2.000 passagers chacun.

Casablanca, plus modeste dans ses chiffres, se positionne sur des escales plus espacées mais souvent prestigieuses, attirant une clientèle haut de gamme. Cette concentration sur la fin de l’année illustre la place du Maroc dans des circuits qui privilégient des conditions climatiques agréables et une combinaison d’escales en Espagne, au Portugal, aux Canaries et sur les côtes marocaines.

La dépense moyenne à terre, évaluée entre cinquante euros et cent dollars par passager, laisse entrevoir des retombées directes de plusieurs millions d’euros pour les villes concernées, sans compter l’effet indirect sur la restauration, les transports et les services culturels.

Les grands opérateurs mondiaux sont à nouveau présents. Agadir verra défiler les unités de TUI Cruises, AIDA, Norwegian Cruise Line, Oceania, Azamara, Crystal, Holland America, Viking ou encore Phoenix Reisen. Tanger accueillera Silversea, Celebrity Cruises, P&O Cruises, Oceania et Fred.

Olsen, tandis que Casablanca figure sur les routes de Silversea, Virgin Voyages et P&O Cruises, parfois rejointes par Holland America. Cette diversité de compagnies traduit une ouverture à plusieurs segments de clientèle, du voyageur familial au croisiériste de luxe, et renforce la visibilité du Maroc comme destination maritime. Chaque escale devient une vitrine, où les passagers peuvent découvrir un aperçu du pays et, potentiellement, revenir pour un séjour plus long.

Un engouement croissant chez les voyageurs marocains
Le Maroc ne se contente plus d’accueillir des croisiéristes étrangers, il voit aussi ses propres voyageurs embarquer de plus en plus souvent. Imane Arif, directrice communication de Macrosiere.ma, constate un changement net dans les habitudes de voyage et affirme que cette année, les chiffres sont nettement meilleurs que l’année précédente et que la progression se poursuit. Elle se souvient de la longue parenthèse imposée par la crise sanitaire en expliquant qu’il y a eu une vraie pause pendant le Covid, avec un arrêt complet de l’activité, puis une reprise il y a environ trois ans.

Depuis, selon elle, l’intérêt des Marocains pour ce type de voyage s’est affirmé et nombreux sont ceux qui se laissent tenter, réservent à nouveau et renouvellent l’expérience. Dans le collectif imaginaire, la croisière représentait autrefois un luxe inaccessible réservé aux seniors ou aux personnes disposant de revenus très élevés, mais, aujourd’hui, en s’y prenant tôt, il est possible de bénéficier de promotions particulièrement intéressantes, admet Imane Arif.

Elle décrit la croisière comme une expérience différente où tout est à disposition, des activités sportives aux restaurants, en passant par les soirées et les discothèques, et insiste sur le fait que c’est une formule de vacances riche et souvent addictive. Macrosiere.ma collabore avec des opérateurs tels que MSC ou Norwegian Cruise Line.

Ces partenaires ont félicité l’entreprise pour la hausse de ses résultats et souhaitent désormais travailler avec elle à la mise en place de budgets marketing plus ambitieux, à l’organisation d’événements VIP et à l’implication de personnalités influentes afin de convaincre un public plus large que la croisière peut être un luxe accessible.

Une fenêtre d’opportunité pour le Maroc
La conjonction d’un marché mondial en expansion et d’une redynamisation des escales marocaines ouvre de nouvelles perspectives. Le pays dispose d’atouts indéniables, tant par sa position géographique que par la diversité de ses escales. La réussite dépendra de la capacité à améliorer encore l’accueil portuaire, à fluidifier les formalités et à enrichir l’offre à terre.

Pour les villes côtières, la croisière n’est pas seulement une vitrine touristique. C’est aussi un moteur économique qui génère des retombées directes et stimule des secteurs connexes. Et pour les Marocains eux-mêmes, c’est l’occasion de s’approprier un mode de voyage longtemps perçu comme inaccessible, mais qui pourrait, à terme, devenir un segment à part entière du tourisme national.

Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO



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