Dialogue social : les agriculteurs montent au créneau

Le Syndicat national des travailleurs agricoles alerte sur les écarts de rémunération persistants entre les secteurs, le gel des conventions collectives, la précarité dans les exploitations et le silence du ministère de l’Emploi. Il dénonce aussi les campagnes de diffamation visant les ouvrières agricoles saisonnières marocaines en Espagne et appelle à une mobilisation nationale à l’occasion du cycle de dialogue social prévu en avril. À l’approche du 1er mai, il exige la concrétisation des engagements et la fin des atteintes aux droits sociaux fondamentaux.
À moins d’un mois du 1er mai, Fête du travail, les centrales syndicales se mobilisent, comme à l’accoutumée, pour faire part de leurs revendications au ministère de l’Emploi dans le cadre du cycle annuel de dialogue social prévu ce mois.
Le bureau national du Syndicat national des travailleurs agricoles (SNTAG) – affilié à l’Union marocaine du travail (UMT) – dresse un constat alarmant sur la situation des travailleuses et travailleurs du secteur agricole. Dans ce sens, il interpelle les autorités sur l’ampleur des injustices sociales, économiques et juridiques qui minent encore ce pilier essentiel de l’économie nationale.
Du retard sur les engagements de 2022
Le point d’achoppement majeur reste l’écart entre le salaire minimum appliqué aux ouvriers agricoles et celui en vigueur dans les autres secteurs d’activité. Bien qu’un accord conclu en 2022 ait prévu l’unification progressive du SMIG et du SMAG d’ici à 2028, aucune mesure concrète n’a pour l’heure été enregistrée pour mettre en œuvre cet engagement.
Le syndicat réclame la publication urgente d’un décret précisant les modalités et les étapes de cette convergence, estimant que l’inaction actuelle constitue «une violation manifeste des droits fondamentaux des travailleurs». La hausse de 5% du SMAG, annoncée récemment, n’a pas contribué à apaiser les tensions. Jugée dérisoire et tardive, elle est perçue comme une tentative du gouvernement et du patronat de «jeter de la poudre aux yeux» à la veille de la reprise du dialogue social.
Le SNTAG dénonce également la situation de centaines de travailleurs laissés pour compte dans des exploitations agricoles ayant connu l’échec de partenariats publics ou privés. Le syndicat appelle de ce fait à une résolution rapide de ces cas de précarité prolongée. L’autre sujet de discorde reste le mutisme du ministère de l’Emploi face aux revendications syndicales jugées urgentes.
Le SNTAG rappelle également avoir transmis à deux reprises, en mai puis en octobre derniers, un dossier revendicatif détaillé, sans retour à ce jour. Il fustige en particulier le blocage de la convention collective conclue avec la société El Mazraa, en attente de validation ministérielle depuis plus de deux ans. Ce silence est interprété comme un mépris des engagements sociaux et du droit à la négociation collective.
Précarité persistante
Sur le plan international, le syndicat exprime son indignation face aux campagnes de diffamation dont sont victimes les travailleuses marocaines saisonnières dans le sud de l’Espagne. Objet de calomnies dans les médias et sur les réseaux sociaux, ces femmes subissent, selon le SNTAG, «une violence symbolique et raciste qui perpétue une vision rétrograde des femmes travailleuses».
Le syndicat appelle les autorités marocaines et espagnoles à agir de concert pour lgarantir leurs droits et leur dignité. Dans ce contexte de tensions, le SNTAG annonce le lancement d’une campagne nationale de mobilisation et de communication, dont les modalités seront rendues publiques dans un appel distinct.
L’objectif affiché est de faire entendre la voix des ouvrières et ouvriers agricoles dans le cadre du cycle de dialogue social prévu ce mois d’avril. Le syndicat demande en parallèle le gel immédiat de la loi encadrant le droit de grève, qu’il qualifie de «texte répressif», et se dit prêt à mener une lutte unitaire pour obtenir son retrait. Il appelle à la défense des «rares acquis» obtenus en matière de retraite et de législation du travail, tout en exigeant la mise en œuvre de l’accord fixant le seuil d’éligibilité à la retraite à 1.320 jours de cotisations, ainsi qu’une revalorisation du minimum des pensions.
Le Bureau national revient également sur les engagements pris par le ministre de l’Agriculture envers les travailleurs journaliers de la région de Chtouka Aït Baha, appelant à leur concrétisation rapide afin de mettre un terme aux drames sociaux qui y perdurent.
À l’approche de la Fête du travail, ces revendications s’inscrivent dans un contexte où les fractures sociales s’élargissent et où le dialogue social peine à offrir des perspectives crédibles aux catégories les plus vulnérables.
Maryem Ouazzani / Les Inspirations ÉCO