Kenya : la monnaie est surévaluée, selon le gouverneur de la Banque centrale
La monnaie kényane, le shilling, qui s’échange à un taux historiquement bas, est surévaluée depuis plusieurs années, a affirmé le gouverneur de la banque centrale de ce pays d’Afrique de l’Est.
La devise kényane a connu lundi un nouveau plus-bas historique, à 150 shillings pour un dollar, en recul de 24 % sur un an. En octobre 2018, un dollar valait 100 shillings. «Je pense que depuis plusieurs années maintenant, nous avons un taux de change surévalué», a déclaré mardi le gouverneur de la Banque centrale du Kenya, Kamau Thugge, devant une commission parlementaire. Le responsable a affirmé qu’il y a environ cinq ans, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale considéraient le shilling surévalué de 20% à 25%.
Une dette plus lourde
«Nous avons essayé de maintenir artificiellement un taux de change assez fort, mais au prix d’une perte de réserves internationales (de devises, ndlr)», a affirmé le gouverneur de la banque centrale kényane, qui a pris ses fonctions en juin. Selon le patron de la Banque centrale du Kenya, les réserves de change du pays permettent de couvrir moins de quatre mois d’importations. «C’est encore suffisant pour faire face à d’éventuelles urgences», a-t-il toutefois assuré. Ce taux de change historiquement bas résulte notamment du renforcement de la monnaie américaine, en raison entre autres des rendements élevés des bons du Trésor américain. Cette dépréciation rend les importations plus onéreuses et vient alourdir le poids de la dette kényane, qui s’élevait à plus de 10.100 milliards de shillings (64,4 milliards d’euros) fin juin, selon les chiffres du Trésor, soit environ deux tiers du produit intérieur brut.
Pouvoir d’achat en berne, croissance au ralenti
Élu en août 2022, le président William Ruto a introduit une série de hausses d’impôts et nouvelles taxes censées augmenter les recettes de l’État et redonner des marges de manœuvre au pays. Mais ces mesures pèsent lourd sur le pouvoir d’achat, suscitant incompréhension et mécontentement dans la population alors qu’il avait promis durant la campagne présidentielle d’atténuer les difficultés financières des Kényans les plus pauvres. Locomotive d’Afrique de l’Est, l’économie kényane a été sérieusement ébranlée par la pandémie de covid-19, puis l’onde de choc de la guerre en Ukraine et une sécheresse historique dans la Corne de l’Afrique. La croissance économique a ralenti à 4,8% l’année dernière, contre 7,6% en 2021, et les prévisions de croissance pour 2023 s’annoncent inférieures à 2022.
Sami Nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO