Insertion des jeunes : former pour soigner, le pari ambitieux de l’IECD Maroc

À Casablanca, Tanger, Marrakech et ailleurs, de jeunes Marocains sans emploi ni diplôme sont formés aux métiers du soin à la personne grâce à un programme porté par l’IECD Maroc. Depuis 2021, ce projet leur permet d’acquérir des compétences, d’accéder à un emploi et d’accompagner les personnes âgées ou dépendantes à domicile. Alors que la première phase du programme touche à sa fin, une opération de capitalisation démarre pour tirer les leçons de cette expérience et en préparer l’élargissement à l’échelle nationale.
Dans un pays où près d’un tiers des jeunes se trouve sans emploi, sans formation ni perspectives, le défi de l’insertion socioprofessionnelle devient un impératif social. C’est à cette intersection entre exclusion et potentiel que l’IECD Maroc, ONG affiliée à l’Institut européen de coopération et de développement (IECD), a lancé en 2021 un projet consistant en la formation des jeunes Marocains vulnérables aux métiers du soin à la personne. Une réponse à la fois humaine et stratégique à une double urgence — celle de l’inclusion des jeunes, et celle de l’accès aux soins pour une population vieillissante.
Le programme, baptisé FAPAR (Formation aide à la personne à autonomie réduite), cible spécifiquement les jeunes NEETs – ces jeunes ni en emploi, ni en formation, ni en études –, en particulier les femmes issues de milieux précaires. Il ne s’agit pas simplement de dispenser une formation professionnelle, mais de proposer un véritable parcours d’émancipation et d’utilité sociale, dans un secteur aussi exigeant qu’indispensable.
À Casablanca, Tanger, Rabat, Marrakech et Chichaoua, cinq centres de formation se sont transformés en lieux de reconstruction. Les jeunes y apprennent les gestes du soin, mais aussi à se connaître, à s’orienter, à croire de nouveau en leurs capacités. Autour d’eux gravite un réseau d’acteurs engagés : ONG locales, formateurs qualifiés, employeurs, tuteurs, structures d’accueil et patients. Car le soin, ici, n’est pas qu’une compétence ; c’est une relation humaine, un service qui transforme à la fois celui qui donne et celui qui reçoit.
Les bénéficiaires ne sont pas seuls. Quinze formateurs ont été spécifiquement formés pour adapter leur pédagogie à ces publics fragiles. Les ONG locales partenaires, elles, ont été renforcées pour garantir la continuité du dispositif, dans une logique de transfert de compétences et d’autonomisation. Les employeurs ne sont pas en reste : associés dès le départ, ils accueillent stagiaires et jeunes diplômés dans des structures médico-sociales ou au domicile de personnes dépendantes. Et alors que la première phase du projet approche de son terme, l’IECD Maroc lance à l’automne 2025 un vaste processus de capitalisation. Ce n’est pas un simple bilan, mais une démarche stratégique de transformation du savoir en action.
Du 13 octobre au 10 décembre, en l’espace de vingt-cinq jours de travail, des ateliers participatifs, des entretiens de terrain, des focus groups et des analyses croisées seront menés pour documenter l’expérience, tirer les enseignements, identifier les freins et les leviers.
Cinq grandes thématiques guident cette capitalisation. La première porte sur la mobilisation des jeunes : quelles stratégies ont permis d’atteindre les publics cibles ? Quels obstacles, notamment culturels ou genrés, ont limité l’engagement ? Le deuxième axe explore la qualité des formations : quelles méthodes pédagogiques ont su accrocher ces jeunes souvent déscolarisés ? Comment les contenus ont-ils été adaptés ? La troisième thématique se penche sur les stages pratiques, véritables tremplins vers l’emploi. Leur organisation, la pertinence des structures d’accueil, le rôle des tuteurs et les retours des jeunes et des employeurs seront analysés finement. Un quatrième volet est consacré aux partenariats. Institutionnels, associatifs ou professionnels, ils ont constitué l’ossature du projet. La capitalisation doit permettre de comprendre quelles collaborations ont fonctionné, où les synergies ont manqué, et comment renforcer ces dynamiques à l’avenir. Enfin, le cinquième thème concerne l’accompagnement socioprofessionnel : coaching individuel, soutien psychosocial, ateliers collectifs — quels outils ont réellement fait la différence ? La démarche ne s’arrête pas à l’analyse. Elle débouche sur la production d’un rapport illustré, de fiches pratiques thématiques, d’outils de communication et d’un atelier de restitution réunissant tous les acteurs concernés. Ce partage d’expériences vise à nourrir les pratiques des ONG, à informer les politiques publiques et à inspirer d’autres projets similaires dans la région.
S.N. / Les Inspirations ÉCO