Monde

Échec du congrès de Sotchi

Déjà mal engagé après la défection des principaux représentants de l’opposition syrienne puis des Kurdes, le sommet pour la paix en Syrie, qui s’est ouvert à Sotchi hier a buté sur un obstacle supplémentaire inattendu. Alors que les délégations arrivaient les unes après les autres, dans la station balnéaire russe au bord de la mer Noire, les passagers d’un avion en provenance d’Ankara (et soutenu par la Turquie) ont refusé de sortir de l’aéroport à la vue du drapeau officiel syrien présent sur tous les panneaux d’accueil dès leur descente d’avion.

Pour calmer les ardeurs de cette délégation, une longue nuit de tractations a alors commencé pour les quelque 70 opposants dépêchés par Ankara à Sotchi, comme une concession d’allié à allié, pour ne pas laisser trop dégarnis les rangs des principaux adversaires de Bachar Al-Assad. Selon les turques, il s’agit d’opposants «venus à titre individuel» et non d’un groupe de l’Armée syrienne libre, comme la rumeur avait commencé à circuler. Les organisateurs russes ont bien tenté de dénouer la crise, en proposant de refaire tous leurs badges d’accréditation au Congrès, également porteurs du drapeau. Les panneaux lumineux de l’aéroport ont été éteints. L’emblème honni a été prestement masqué à l’hôtel où devait descendre la délégation. Mais rien n’y a fait lorsque les passagers contrariés se sont rendu compte que toute la ville avait ainsi été pavoisée. Des images surréalistes d’hommes épuisés, dormant à même le sol, dans une salle de l’aéroport, sont peu à peu apparues sur les réseaux sociaux. «Les promesses que nous avaient faites les Russes n’ont pas été tenues, donc nous allons rentrer à Ankara », y annonce Ahmed Tomah, ex-premier ministre du gouvernement en exil de l’opposition, basé à Gaziantep, dans le sud de la Turquie. Ahmed Tomah dirigeait la délégation syrienne, lors du dernier round de discussions, parrainé par la Russie, la Turquie et l’Iran à Astana (Kazakhstan), en décembre 2017.

Mardi, le Congrès a commencé avec deux heures de retard, le temps pour le ministre des affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, de persuader par téléphone son homologue turc, Mevlüt Cavusoglu, de tenter de convaincre les récalcitrants mais en vain. La plupart des opposants sont remontés dans l’avion. «Ce n’est pas important, le Congrès continue», confiait, dans les couloirs, le vice-ministre des affaires étrangères iranien, Hossein Jaberi Ansari, en prenant à témoin la salle pleine à craquer du centre des expositions de Sotchi. Mais une contrariété ne venant jamais seule, lorsque, enfin, la discussion s’est ouverte, quelques cris ont fusé, contraignant M. Lavrov à réclamer le calme, alors qu’il venait à peine d’achever la lecture d’une lettre de bienvenue du président russe, Vladimir Poutine. « Agresseurs ! », a lancé un homme. « Gloire à la Russie », lui a répondu un autre.



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