Opinions

Centres régionaux d’investissement : Comment être plus efficaces

Le projet de loi 47-18 portant «Réforme des Centres régionaux d’investissement et création des Commissions régionales unifiées d’investissement», sera examiné au cours du prochain Conseil du gouvernement. Il intervient suite aux orientations du souverain et au rapport d’évaluation effectué par la Cour des comptes de l’expérience des 16 CRI créés en application de la lettre royale du 9 janvier 2002 adressée au Premier ministre, relative à la Gestion déconcentrée de l’investissement.

L’actuel projet, comme son intitulé l’indique, est venu donc remédier aux lacunes et faiblesses des CRI actuels en intégrant les changements institutionnels intervenus depuis, notamment l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2011 instituant la régionalisation avancée, la reddition des comptes, la constitutionnalisation des droits économiques et sociaux… Les modifications introduites dans le nouveau texte, qui fera certainement l’objet d’un débat de fond tant par les membres du gouvernement que par les parlementaires, portent tant sur la forme que sur le fond. Sur la forme, le projet prévoit de doter les prochains CRI de statut d’établissements publics jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie financière, au lieu du statut SEGMA attribué aux CRI actuels.

En tant que tels, ils seront dirigés par un Conseil d’administration que préside le wali de la région et dans lequel siègent pratiquement tous les représentants des principales administrations concernées: président du Conseil régional, Agence nationale de promotion de la PME, ANAPEC, OFPPT, CCG, Agence urbaine, président de la Chambre de commerce et de l’industrie, le représentant régional de l’organisation patronale la plus représentative, trois personnalités indépendantes choisies pour leur compétence…Ce qui est de nature à faciliter la prise de décision et assurer la fluidité de l’information sur la dynamique régionale et l’intelligence territoriale. Sur le fond, le projet accorde de larges prérogatives à ces nouvelles entités (art. 4). Elles concernent l’octroi de facilités à la création des entreprises, la mobilisation du foncier, l’accompagnement des investisseurs en matière de financement, de ressources humaines et d’information, la déclinaison territoriale des programmes sectoriels élaborés au niveau national, l’amélioration de l’attractivité régionale, le règlement des différends qui pourraient exister entre administrations et investisseurs, etc. Toutefois, le fer de lance des nouveaux CRI sera constitué sans doute par les Commissions régionales unifiées d’investissement qui seront de véritables organes d’exécution.

Présidée par le wali de la région, cette commission se réunit au moins une fois par semaine et à chaque fois que la situation l’exige, sachant que ses décisions sont opposables à tous. Elle jouera en quelque sorte, au niveau de la région, le rôle que joue la Commission ministérielle d’investissement, que préside le chef de gouvernement. C’est dire toute la charge qui sera celle du wali qui doit désormais se concentrer sur les questions de développement économique. Et par conséquent, la réussite de sa mission sera jugée à l’aune de l’évolution des indicateurs économiques et sociaux de son territoire ! Par ailleurs, le projet prévoit la création d’une commission ministérielle de pilotage présidée par le chef de gouvernement et dont la constitution et les modalités de fonctionnement seront définies par voie réglementaire. Telle est brossée, à grands traits, l’économie de ce projet de loi qui répond sans nul doute à des attentes sur le terrain. Mais ne nous trompons pas : une loi, quel que soit son degré de perfectionnement, ne peut pas, à elle seule, chambouler les habitudes ancrées et les pratiques enracinées. Pour être efficace et atteindre ses objectifs, elle doit être portée par des hommes et des femmes entièrement dévoués à la chose publique et à l’intérêt général. Les élites locales et régionales, seront appelées à jouer un rôle de premier plan. Tout le monde est invité à mettre la main à la pâte et apporter sa contribution à ce projet de vaste envergure. À ce titre, il aurait été utile que les syndicats des travailleurs les plus représentatifs, à l’instar de l’organisation patronale, aient leur place au sein du Conseil d’administration des futurs CRI. Ce serait un moyen d’impliquer davantage les forces vives de la nation dans l’effort de développement du pays et d’appréhender l’entreprise sous sa nouvelle réalité socio-économique : une «unité de production» dans laquelle chaque composante apporte sa contribution qu’elle soit sous forme de capital, d’organisation ou de travail. 

Abdeslam Seddiki
Économiste et ancien ministre de l’Emploi et des affaires sociales



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