Agroalimentaire : Le contrat-programme État-Fenagri fin prêt

Les opérateurs de l’agroalimentaire plaident pour une révision de la TVA sur les intrants agricoles. Malgré la concurrence déloyale de la contrebande et du secteur informel, les industriels marocains voient d’un bon œil les perspectives d’évolution des marchés à l’export, notamment en Afrique.
Le secteur de l’agroalimentaire au Maroc est animé par 2.600 entreprises organisées sous l’égide de la Fédération nationale de l’agroalimentaire (Fenagri), générant environ 150.000 emplois et contribuant à hauteur de 4% au PIB national. «Le secteur présente un fort potentiel de croissance eu égard au nombre élevé de produits non encore valorisés et aux innombrables débouchés qu’offrent les marchés à l’export, notamment en Afrique», a souligné Mohamed Fikrat, président de la Fédération nationale de l’agroalimentaire (Fenagri), lors d’une conférence-débat, mercredi 22 mars à Casablanca, à l’initiative de la Chambre de commerce britannique (Britcham).Cette rencontre organisée sous le thème «L’agro-industrie marocaine : quels leviers de croissance pour disposer d’un véritable secteur agro-industriel national fort et capable de s’exporter», avait pour but de dresser un diagnostic du secteur et de présenter les stratégies susceptibles de soutenir sa croissance à l’échelle nationale et internationale. L’occasion également de débattre des défis qui s’imposent aux exportateurs marocains.
Rappelons que le débat de Britcham intervient à quelques jours de l’ouverture de la 12e édition du Salon international de l’agriculture de Meknès, qui fera la part belle à l’agrobusiness et aux chaînes de valeur agricoles qui y sont associées. Ceci au moment même où le Plan Maroc Vert devra entamer une nouvelle étape mettant davantage l’accent sur la valorisation des produits agricoles, ce qui de facto nécessite une forte implication de l’industrie agroalimentaire.
Compétitivité
Pour booster ce secteur et garantir les conditions nécessaires à sa compétitivité, un contrat-programme, a confirmé le président de la Fenagri, est actuellement en cours de préparation. Axé sur un partenariat public-privé, ce contrat devrait relier la Fenagri à l’État représenté par trois départements ministériels (Agriculture, finances, industrie). En effet, les professionnels veulent lutter contre les obstacles qui freinent l’essor de l’industrie marocaine et surtout son accessibilité sur les marchés de l’exportation.
D’autant plus que les produits marocains n’ont rien à envier aux produits fabriqués par les mastodontes internationaux. «L’industrie marocaine a tout pour réussir : le savoir-faire, les matières premières, la qualité, la marque, etc», affirme Hassan Khalil, directeur général de Dari Couspate. «Nous avons une carte à jouer. Nous devons faire preuve d’innovation pour adapter nos produits aux spécificités des marchés de l’export», ajoute-t-il, en annonçant au passage le lancement de la distribution des produits Dari dans trois nouveaux pays (Le Bahreïn, la Corée du Sud et l’Éthiopie), portant à 45 le nombre des marchés d’exportation de cette entreprise basée à Salé, par ailleurs cotée à la Bourse de Casablanca. L’avis de Khalil est partagé par un autre dirigeant, non moins jeune, représentant une entreprise agroalimentaire installée à Meknès, spécialisée dans le jus de fruits. «Le nectar d’orange que nous vendons au Maroc n’est pas le même demandé ailleurs. Il nous importe d’adapter à la fois nos prix et nos produits aux besoins du marché africain», souligne Ibrahim Belkora, dg d’Agro Juice Processing (AJP), en évoquant les perspectives de l’adhésion du Maroc à la Cedeao. Hors du Maroc, le marché africain génère 60% du chiffre d’affaires à l’export de l’entreprise de la famille Belkora, connue pour sa marque phare Velencia. AJP vient de signer un gros contrat avec Al Rawabi, le numéro deux du marché des jus de fruit et du lait au Moyen-Orient, ce qui devra doubler son chiffre d’affaires à l’export. Ibrahim Belkora saisit l’occasion pour soulever le manque de visibilité et les difficultés d’approvisionnement en matières premières dont souffrent les industriels de l’agroalimentaire, en particulier ceux spécialisés dans l’extraction de jus.
L’amélioration de cette visibilité, s’accorde-t-on à dire, passe par la normalisation des produits agricoles qui, sans doute, sera bénéfique à la fois au consommateur, à l’industriel et à l’agriculteur. Les professionnels ne manquent pas, par ailleurs, de pointer du doigt la concurrence déloyale de la contrebande et du secteur informel qui, à leurs yeux, compromettent la santé des consommateurs. Aussi, pour remédier à ce phénomène, ils invitent les autorités à revoir la fiscalité (TVA) des produits agricoles destinés à l’industrie agroalimentaire. Après les fruits et légumes lors de la loi de Finances 2016, la Fenagri appelle à la généralisation vers d’autres plantes, de la taxation, non pas du chiffre d’affaires, mais plutôt du différentiel, c’est-à-dire de la valeur ajoutée du secteur, notamment en déduisant le prix d’achat des intrants agricoles.
CAM lance le «Club des exportateurs»
L’Établissement autonome de contrôle et de coordination des exportations (EACCE) vient de mettre en place un nouveau dispositif de promotion, apprend-on de son directeur du développement, Mehdi Larhrib. Appuyé sur les résultats d’une étude d’un cabinet international, ce dispositif, a-t-il détaillé devant les membres de Britcham, sera axé sur quatre piliers : Salons & foires, B to B, B to C, le digital. À l’égard des coopératives, l’EACCE a mis sur pieds le concept d’une caravane qui vient d’effectuer sa première escale, cela fait trois semaines, dans la région d’Agadir. Intervenant lors de la même conférence, la directrice du Pôle international du Crédit agricole du Maroc (CAM), Sanaa Bellamine, a présenté la palette des produits et services réservés au monde agricole, notamment ceux destinés aux exportateurs (crédit documentaire, instruments de couverture, etc). Elle annonce en substance le lancement du «Club des exportateurs» facilitant des mises en relation B to B. «Nous venons d’organiser une première opération à Rennes à laquelle ont pris part des professionnels marocains du secteur de l’élevage», souligne Bellamine.