Éco-Business

Conjoncture : l’économie marocaine dans un cycle porteur

L’économie nationale entre dans un cycle porteur, soutenu par la détente monétaire, une reprise attendue de l’investissement et un regain d’intérêt pour le marché boursier. Toutefois, la vigilance reste de mise, notamment face aux déséquilibres budgétaires, aux incertitudes géopolitiques et à la volatilité des marchés internationaux.

À première vue, les vents contraires dominent. Tensions géopolitiques, retournement partiel de l’inflation, creusement du déficit budgétaire… Et pourtant, le Maroc s’installe, à contre-courant, dans une dynamique économique et financière plutôt favorable. C’est le constat nuancé, mais confiant, que livre BMCE Capital global research (BKGR) dans son rapport Strategy – Mars 2025, une photographie fine d’un marché en transition, porté par l’anticipation d’un cycle plus accommodant et une reprise sectorielle diversifiée.

Alors que le taux de croissance du PIB a marqué un léger tassement à 3,7% au quatrième trimestre 2024, contre 4,3% au trimestre précédent, les prévisions pour 2025 sont à la hausse. BKGR retient un scénario central de 3,9%, supérieur aux estimations du FMI (3,7%) et de la Banque mondiale (3,6%).

Ce regain d’optimisme s’explique, notamment, par les précipitations tardives mais abondantes de février et mars, qui pourraient améliorer une campagne céréalière jusque-là compromise, tout en améliorant le niveau des barrages. En toile de fond, l’atténuation progressive des tensions inflationnistes dans les grandes économies redonne une marge de manœuvre aux banques centrales, y compris au Maroc.

Un tournant monétaire amorcé
C’est dans ce contexte que Bank Al-Maghrib a surpris les marchés en réduisant son taux directeur de 25 points de base, le ramenant à 2,25% lors de son premier conseil de l’année. Cette décision, interprétée comme un signal de confiance, intervient alors même que l’inflation repart légèrement à la hausse, à 2,6% en glissement annuel à fin février, contre 2% un mois plus tôt.

Mais pour BKGR, cette évolution reste contenue et pourrait refléter un effet de base plus qu’une véritable reprise des tensions inflationnistes. La Banque centrale emboîte ainsi le pas à la Banque centrale européenne, qui a, elle aussi, abaissé son taux de référence, prévoyant deux nouvelles baisses en 2025.

Aux États-Unis, la Réserve fédérale reste prudente, maintenue sous pression par l’Exécutif pour desserrer sa politique. Cette convergence internationale vers l’assouplissement monétaire pourrait bénéficier à des économies émergentes comme le Maroc, qui combine stabilité politique, cadre réglementaire en consolidation et ambitions industrielles clairement affichées.

Un déficit qui se creuse, des équilibres à surveiller
L’autre facette du tableau est moins reluisante. L’exécution budgétaire à fin février 2025 révèle un déficit de 21 MMDH, contre seulement 3,7 milliards un an plus tôt. En cause, une forte hausse des dépenses ordinaires (50,5%), atteignant 74,75 MMDH, alors que les recettes progressent de manière plus modérée (9,7%).

BKGR note que cette dérive s’opère en l’absence de dépenses de compensation sur la période, ce qui laisse craindre une pression accrue sur les équilibres publics si les dépenses sociales venaient à s’intensifier dans le courant de l’année.

Sur le front extérieur, le déficit commercial s’est également alourdi de 22,1%, à 50,7 MMDH à fin février. Le taux de couverture des importations par les exportations est passé de 64% à 59,1%, un plus bas préoccupant.

Néanmoins, la balance des paiements conserve un certain équilibre grâce à des recettes touristiques dynamiques (+2,8%, à 15,8 MMDH) et une forte progression des investissements directs étrangers (+40,6 %, à 6,1 MMDH).

Le Maroc, gagnant potentiel d’un nouveau paysage géopolitique
Dans cette ambiance contrastée, BKGR s’arrête sur un fait géopolitique majeur, la révision unilatérale par les États-Unis de leur politique commerciale, avec l’instauration de nouveaux droits de douane différenciés selon les pays.

Le Maroc, relativement épargné (tarifs plafonnés à 10%, contre jusqu’à 93% pour d’autres pays émergents), pourrait tirer son épingle du jeu. Les analystes y voient une opportunité pour les exportateurs nationaux de renforcer leur présence sur le marché américain et, à moyen terme, une incitation pour certains groupes étrangers à utiliser le Royaume comme base industrielle ou logistique, notamment dans une logique de contournement tarifaire.

Ce repositionnement stratégique s’inscrit dans une perspective plus large, où le Maroc se profile comme hub industriel régional, appuyé par une nouvelle Charte de l’investissement, des projets d’hydrogène vert, des ambitions dans les gigafactories et une volonté affichée d’accélérer la transition énergétique.

BKGR souligne également l’impact possible d’événements structurants comme la CAN 2025 ou la Coupe du monde 2030, susceptibles de stimuler l’investissement dans les infrastructures et de doper la consommation intérieure.

Vers une reconfiguration prudente mais optimiste
BKGR conclut son analyse sur une note pragmatique. «Le Maroc dispose d’un potentiel d’accélération économique si les conditions externes restent relativement stables, à condition toutefois de maîtriser les risques budgétaires, de préserver la compétitivité extérieure et de poursuivre l’effort de réforme», écrivent ses analystes.

La dynamique boursière, si spectaculaire soit-elle, ne peut se substituer à une consolidation durable des fondamentaux économiques. Dans un monde en recomposition, marqué par le retour des barrières commerciales et les arbitrages géostratégiques, le Maroc semble avoir une carte à jouer. Reste à transformer l’essai !

Une bourse dopée par les perspectives

Dans ce contexte de reprise anticipée et d’orientation monétaire favorable, la Bourse de Casablanca s’inscrit dans une dynamique haussière spectaculaire. L’indice MASI progresse de 6,17% sur le seul mois de mars, portant sa performance annuelle à 20,19%, tandis que le MASI 20 affiche 21,21%.

Cette progression, qualifiée d’historique par BKGR, est soutenue par un volume transactionnel en forte hausse et un regain d’intérêt pour les valeurs industrielles et cycliques. Les secteurs les plus porteurs ? L’électricité, dopée par les anticipations de transition énergétique, affiche un envol de 72% depuis le début de l’année, suivie par les mines (60%) et la santé (44%).

Une dynamique qui reflète à la fois l’amélioration des perspectives domestiques et l’attrait retrouvé des investisseurs institutionnels pour un marché perçu comme relativement résilient face aux chocs exogènes.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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