Omar Kettani : “Les statistiques plaident davantage pour une stabilité que pour une relance”

Omar Kettani
Économiste
Dans une économie où l’investissement repose historiquement sur le crédit, la croissance semble progresser sans réel soutien bancaire. De quoi s’interroger sur la consistance et la pérennité de la reprise.
La dernière sortie de Bank Al-Maghrib évoque une reprise dans certains secteurs, mais sans rebond significatif du crédit bancaire. Peut-on vraiment parler de relance dans ces conditions ?
Non, justement. Une véritable relance suppose plusieurs éléments. Une dynamique d’investissement, un recours croissant au crédit et une hausse significative de l’emploi. Or, ce n’est pas ce que traduisent les chiffres. La décélération du crédit bancaire laisse penser qu’on observe plutôt une stabilisation qu’une reprise. Concrètement, les effets concrets dans l’économie réelle se font toujours attendre.
Vous soulignez aussi l’absence de données claires sur l’emploi. Cela fausse-t-il le diagnostic ?
Tout à fait. Il y a un discours officiel qui promet des milliers d’emplois, notamment dans les services. Mais sans statistiques précises, il est difficile de valider cette promesse. Des efforts sont certes consentis en matière de formation professionnelle, c’est vrai. Mais la création d’emplois, elle, reste difficile à documenter. Il y a un écart entre les intentions affichées et la réalité mesurable. Et sans emploi, la relance demeure incomplète.
Quel regard portez-vous sur le comportement des ménages face à cette situation ?
L’accélération des dépôts à vue, au détriment des dépôts à terme, traduit une forme de méfiance. Les ménages préfèrent garder leur argent disponible, ce qui reflète une incertitude sur l’avenir.
Dans le même temps, les crédits immobiliers progressent très légèrement, mais sans impulsion forte. La consommation stagne. Tout cela montre que les conditions d’une relance durable ne sont pas encore réunies.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO