Banque mondiale : croissance molle pour le Maroc en 2024
Le PIB réel du Royaume devrait ralentir, passant de 3,4% en 2023 à 2,9% en 2024, en raison de la contraction du secteur agricole, marqué par une sécheresse prolongée. Le pays devrait connaître, selon le dernier rapport de Banque mondiale, un déficit des comptes courants de 1% du PIB cette année, contre 0,6% en 2023, le plus faible depuis 2007.
Une panne de croissance. L’horizon de l’économie marocaine apparaît morose compte tenu de la contraction du secteur agricole dans un contexte de sécheresse prolongée, selon le dernier rapport semestriel de la Banque mondiale. Celui-ci prévoit en effet une croissance molle dans la Région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA).
Baptisé «Croissance au Moyen-Orient et en Afrique du Nord», ce rapport indique que le PIB réel du Maroc devrait ralentir, passant de 3,4% en 2023 à 2,9% en 2024, en raison de la contraction du secteur agricole, marqué par une sécheresse prolongée. En comparaison avec les chiffres du HCP, le taux de croissance a été revu à la baisse, à 2,5% au quatrième trimestre 2024, en rythme annuel, au lieu des 2,8% attendus au troisième trimestre, selon les perspectives de croissance de cette institution pour le T4 – 2024.
À noter que le HCP a déjà prévu un taux de croissance de 3% durant la même année au lieu de 3,4% en 2023 comme il se dégage du budget économique exploratoire du Haut-commissariat au plan qui a présenté une révision de la croissance économique nationale en 2024, ainsi que les perspectives pour l’année 2025. Parallèlement, dans le cadre de la Loi de finances 2024, ce taux a été fixé à 3,7% pour 2024 sur la base des éléments conjoncturels ayant précédé ce projet de loi.
De ce fait, la conjoncture du quatrième trimestre 2024 sera décisive quant à l’atteinte ou non de la barre de 3% alors que l’économie nationale aurait enregistré, en variation annuelle, une progression de 2,8% au T3 – 2024. Et ce, grâce à une poursuite de la reprise de la demande intérieure et à une hausse plus soutenue des exportations qui auraient stimulé une amélioration de la valeur ajoutée de toutes les branches à l’exception de l’agriculture et la pêche.
Maroc : un déficit des comptes courants de 1% du PIB en 2024
Le Maroc devrait connaître, selon le même rapport, un déficit des comptes courants de 1% du PIB en 2024, contre 0,6% en 2023, le plus faible depuis 2007. Ce creusement anticipé est principalement dû à une augmentation des importations de céréales causée par une baisse de la production nationale due à la sécheresse. Cette tendance est généralisée à presque tous les pays de la région MENA en 2024.
De ce fait, les soldes des comptes courants des pays en développement importateurs de pétrole de la région MENA sont déficitaires et devraient atteindre 4,3% du PIB, ce qui représente une augmentation significative par rapport au déficit de 1,7% enregistré en 2023. Quant au déficit budgétaire, il devrait légèrement diminuer, passant à 4,2% du PIB en 2024, contre 4,4% en 2023, reflétant les efforts continus de consolidation budgétaire, axés sur la mobilisation des recettes fiscales et non fiscales, ainsi que sur la suppression progressive des subventions sur le butane et le gaz.
En ce qui concerne l’inflation, elle a considérablement ralenti selon le rapport en question, passant de 6,1% en 2023 à 1,5% en 2024, ce qui a encouragé Bank Al-Maghrib à baisser ses taux directeurs en juin 2024. Toutefois, il est à signaler qu’au troisième trimestre 2024, elle aurait légèrement repris selon le HCP, après avoir reculé pendant plusieurs trimestres, s’établissant à 1,2%, au lieu de 0,8% un trimestre plus tôt.
À noter que le HCP table sur un niveau d’inflation de 1,8% en 2024 au lieu de 6,4% en 2023. De plus, le rapport a indiqué que le marché de capitaux au Maroc est resté résistant depuis le début du conflit au Proche-Orient, maintenant une performance robuste et sans revers majeur.
Un niveau d’éducation relativement faible
Le rapport a révélé que parmi les pays importateurs de pétrole de la région MENA, y compris le Maroc, la croissance du revenu par habitant a été en moyenne de 2,4% par an. Dans le détail, le revenu par habitant a augmenté à un taux moyen de 2,9% par an au cours des 50 dernières années dans quatre pays de la région (2,5% au Maroc). De surcroît, le Royaume, avec ses faibles niveaux d’indice des années de scolarisation (51% du niveau des pays à la frontière), a une productivité globale qui représente 24% du niveau frontière, tandis que la consommation par habitant est de 10%.
Aussi, le taux d’emploi selon le rapport était de 32% du niveau des pays à la frontière, tandis que son taux d’emploi ajusté en tenant compte des travailleurs à domicile était de 40%. Selon le rapport, le Maroc a un niveau d’éducation relativement faible, et son PIB par habitant est inférieur à celui des pays à la frontière, principalement en raison de son faible taux d’emploi.
Les auteurs du rapport soulignent aussi que les données sur la qualité des infrastructures et l’emploi public au Maroc laissent croire que le Royaume pourrait avoir un secteur public trop important par rapport à l’efficacité des biens publics. Le niveau d’emploi public est deux fois plus élevé que la moyenne de l’OCDE, mais affiche une qualité d’infrastructures inférieure de 32%.
Sur le plan de la pauvreté, bien que treize pays de la région dont le Maroc aient réalisé des enquêtes (2023 et 2022) et ont partagé les données avec la Banque mondiale, la capacité de la banque à mesurer la pauvreté après la pandémie de Covid-19 est très limitée.
Un ralentissement attendu dans la Région MENA
Globalement, le rapport prévoit une croissance modeste du produit intérieur brut (PIB) de la région, avec une augmentation en termes réels prévue à 2,2% en 2024, contre 1,8% en 2023. Cette légère hausse est principalement due aux pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG), où la croissance devrait passer de 0,5% en 2023 à 1,9% en 2024.
En revanche, dans le reste de la région MENA, un ralentissement est attendu. La croissance des pays importateurs de pétrole devrait passer de 3,2% en 2023 à 2,1% en 2024, tandis que celle des pays exportateurs de pétrole hors CCG devrait reculer de 3,2% à 2,7%. Malgré une nette amélioration des niveaux d’éducation au cours des 50 dernières années, le taux d’activité des femmes au Moyen Orient et en Afrique du Nord reste le plus faible au monde, à seulement 19%.
Combler les écarts entre les sexes en matière d’emploi pourrait entraîner une augmentation significative de 51% du revenu par habitant dans un pays moyen de la région MENA. Pour que les économies prospèrent, les femmes doivent être incluses, indique le rapport. Ce dernier montre qu’en l’absence de conflit du Proche-0rient, le revenu par habitant dans les pays de la région MENA touchés par un conflit aurait pu être en moyenne 45% plus élevé.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO