Maroc

Programme Forsa. Oumayma Kabbaj : “1.200 porteurs de projets supplémentaires intégrés”

La deuxième édition du programme Forsa a soulevé une vague d’indignation et de protestation au point que des sit-in ont été tenus devant le siège du ministère du Tourisme chargé de la gestion du programme. Bon nombre de prétendants se sont proclamés «victimes» du programme. Pour connaître les véritables raisons, Oumayma Kabbaj, directrice de l’Unité de gestion du programme Forsa, tire les choses au clair. 

Comment expliquer le mouvement de contestation auour de  Forsa ?
Nous avons récemment clôturé la 2e édition du programme Forsa, qui a largement dépassé ses objectifs. Lors de l’édition Forsa 2023, le programme visait à financer un maximum de porteurs de projets dans la limite de l’enveloppe budgétaire allouée. Ainsi, nous avons pu intégrer 1.200 porteurs de projets supplémentaires, portant ainsi le nombre total des projets financés à 11.200.

Toutefois, il est à noter que certains candidats en lice n’ont malheureusement pas pu franchir l’ensemble des étapes nécessaires au financement. Je rappelle qu’à ce jour, nous avons reçu plus de 300.000 demandes entre les deux éditions et que le nombre total des réclamations représente moins de 400 dont des porteurs de projets n’ayant même pas démarré leur parcours de formation. Nous rappelons également que le processus de qualification compte plusieurs étapes. Chaque étape est sanctionnée par un avis favorable pour passer à l’étape suivante. À titre indicatif, l’attestation de Forsa Academy permet de valider l’étape de formation en e-learning, ou le PV favorable pour l’étape de passage en comité de financement régional et/ou phase d’accompagnement. Ce sont des supports de validation desdites étapes, mais sans pour autant donner droit à l’accès au financement.

L’octroi du financement est acté uniquement par la signature du contrat par le porteur du projet et l’institution de financement. Il est bien entendu évident que le programme s’assure de certains équilibres (équité territoriale, conformité, équilibre genre, etc.) avant de permettre la signature des contrats. Considérant l’engouement qu’a connu le programme auprès des porteurs de projet et la qualité des projets qui ont été proposés, nous aurions souhaité permettre l’accès au financement à tous nos participants, mais l’enveloppe budgétaire dédiée ne le permettait pas.

Certains candidats nous reprochent de leur avoir imposé la création d’une structure juridique et la location d’un local avant de pouvoir leur accorder le financement, ceci est faux. Il leur a bien été demandé de créer une structure juridique formelle comme suite naturelle de leur accompagnement en entrepreneuriat. Toutefois, les candidats avaient la liberté de choisir la forme juridique qu’ils souhaitaient, comme le statut d’autoentrepreneur, qui ne nécessite pas de frais initiaux, et qui a d’ailleurs été le plus adopté. Quant au local, le programme requérait simplement un justificatif de disponibilité pour les projets qui l’exigent, comme une simple promesse de bail.

Certains bénéficiaires se sont retrouvés surendettés vu que le financement n’a pas été débloqué dans les temps, quelles sont les raisons du retard ?
Le programme ne présente aucun retard dans son processus, bien au contraire. Nous avons atteint et dépassé les objectifs bien avant la date limite initialement prévue en fin décembre. Actuellement, plus de 10.000 porteurs de projets ont déjà reçu les virements de leur financement, et les 1.200 supplémentaires sont en cours de financement. À aucun moment le programme n’a incité les porteurs de projets à s’engager dans une situation de surendettement. En témoigne notre approche en matière de remboursement des financements accordés. Nous avons mis en place des modalités souples, avec un différé de deux ans, permettant ainsi aux porteurs de projets de développer leur projet et de générer du cash-flow avant d’entamer le remboursement de leur prêt sur une période pouvant s’étendre jusqu’à 10 ans.

Il paraît que les incubateurs ont incité les prétendants à s’engager dans le business, quels rôles jouent-ils dans ce process ?
Les incubateurs sont des acteurs majeurs du programme qui ont joué un rôle essentiel dans sa réussite. Ils interviennent tout au long du process de sélection, de formation et d’accompagnement. Leur mission a été d’accompagner les participants au programme dans les premières étapes pour acquérir les bases entrepreneuriales et les mettre en œuvre pour structurer leurs idées de projets et ou développer leurs activités en amorçage : réussite des modules de formation, conception des business modèles, construction des business plan viables… Une fois l’étape de financement franchie, les institutions de financement prennent le relais. À aucun moment du programme les candidats ne sont incités à démarrer leur activité avant de recevoir leur financement. Les porteurs de projets financés ont attendu de percevoir leur financement avant de débuter leur activité effective.

Quid du suivi des projets ?
Le programme accorde une importance capitale à la réussite des projets financés. Étant conscient que les deux premières années représentent la période la plus délicate dans la vie d’une entreprise, nous avons mis en place un dispositif d’accompagnement post-financement en collaboration avec les incubateurs et les institutions de financement, s’étendant sur une période de deux ans.

Les précédents programmes n’ont pas permis de réaliser les objectifs escomptés, quelles sont les erreurs du passé à éviter pour que Forsa ne s’inscrive pas dans cette lignée?
Le Programme Forsa, dans sa conception, s’est basé sur des bonnes pratiques, des initiatives publiques et privées, aux niveaux national et international, pour répondre à un besoin pressant en entrepreneuriat notamment auprès des jeunes. Le programme a tenu à donner autant d’importance à la formation qu’au financement. C’est avant tout un programme de formation et d’accompagnement à l’entrepreneuriat avec un financement en prêt d’honneur incluant une subvention.

Forsa est donc venu donner des outils à des porteurs de projets ambitieux ne sachant pas par où commencer. C’est dans ce sens qu’une formation en e-learning sur les bases de l’entrepreneuriat a été dispensée, l’objectif étant de vulgariser les étapes de création d’un projet auprès du plus grand nombre. Vient ensuite l’étape d’accompagnement par des experts à travers des échanges rapprochés, des séminaires, des bootcamps, etc. Aujourd’hui on compte plus de 54.000 porteurs de projets formés et accompagnés et 21.200 financés entre les deux éditions.

La gouvernance est pointée du doigt, quelle stratégie le ministère a-t-il adopté pour garantir une gouvernance efficiente ?
La gouvernance est l’une des plus grandes forces du programme Forsa, et c’est grâce à ce dispositif de gouvernance que des objectifs aussi ambitieux ont été réalisés. Le suivi stratégique du programme a été assuré à plusieurs niveaux, notamment par la mise en place de comités de suivi centraux et régionaux.

Au niveau opérationnel, un dispositif innovant a été mis en place pour assurer le déroulement du programme au niveau de chaque région, à savoir une unité de gestion du programme (UGP) rattachée à la SMIT avec des équipes centrales et des responsables régionaux au niveau de chaque région, des commissions régionales de sélection incluant l’équipe régionale Forsa, les incubateurs, les acteurs institutionnels et les institutions financières, et des commissions régionales de financement incluant l’équipe régionale Forsa, les incubateurs et les institutions financières.

Le pilotage au niveau central a été réalisé par une task force présidée par la ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Economie sociale et solidaire, en charge du programme, avec des réunions de suivi hebdomadaires. Un pilotage rapproché a été réalisé au niveau de l’UGP avec des réunions quotidiennes de l’ensemble de l’équipe, et ce, depuis le lancement du programme. Il est à noter que ce dispositif de gouvernance s’est basé sur une digitalisation de bout en bout de toutes les étapes du programme. Pour chaque projet, il existe un historique et une traçabilité de l’ensemble des étapes, et ce, pour une transparence totale.

Quel est le bilan détaillé du programme ?
Au total, plus de 300.000 candidatures ont été reçues entre les deux éditions, témoignant d’une forte volonté d’entreprendre chez les jeunes. Le programme a fait quelques mécontents et beaucoup d’heureux. Au-delà des chiffres et réalisations précités, le programme Forsa a contribué aux côtés des autres programmes existants à insuffler une réelle dynamique entrepreneuriale et participer à la création de plus de 40.000 emplois dans le secteur formel. Avec 21.200 porteurs de projets financés à son actif, dont 32% de femmes et 64% en milieu rural et petites villes, le programme gouvernemental Forsa aura donc largement tenu ses promesses. Engagement gouvernemental tenu.

Maryam Ouazani / Les Inspirations ÉCO



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