Accueil des MRE: Amal Karioun: “Les agences de voyage ont été exclues”
Amal Karioun.
Ex-président de la Fédération nationale des agences de voyages du Maroc
Dépités par le traitement qui leur sont réservés d’année en année dans la chaîne de valeur du tourisme, les agences de voyages montent au créneau. Amal Karioun, ex-président de la Fédération nationale des agences de voyages du Maroc analyse de la saison estivale 2021, notamment l’opération Marhaba, l’affluence des touristes, l’accompagnement de l’État, la fermeture des frontières Maroc-Espagne, les rapports avec les compagnies aériennes ou encore les réservations en ligne… Il faut dire que les agences de voyage ont connu un premier trimestre 2021 «catastrophique».
Suite aux instructions royales visant à faciliter la traversée des Marocains du monde, quel rôle pourraient jouer les agences de voyage dans la concrétisation de ce projet, dans le cadre de l’opération Marhaba 2021 ?
Très honnêtement, vu les changements intervenus dans la chaîne de valeur, et plus particulièrement le rôle que jouaient les agences de voyages, leur implication qui était souvent une mobilisation 24/7, celles-ci ne peuvent jouer aucun rôle actuellement. Elles ont, en effet, été exclues tant par les partenaires privés, qui voyaient en elles un «intermédiaire inutile» n’apportant pas de valeur ajoutée, que par l’administration qui les a paupérisées. Je peux parler de leur rôle en 2003, quand la Fédération nationale des agences de voyages du Maroc (FNAVM) avait organisé, géré pendant tout l’été non seulement les MRE, mais aussi les résidents au Maroc avec des offres comprenant séjour, transport aérien, terrestre et rail.
Quelles sont les dispositions prises pour assurer le voyage au plus grand nombre de Marocains du monde ?
Les agences de voyages, à ma connaissance -sauf si c’est de manière individuelle pour des offres particulières- n’ont pris aucune disposition de manière collégiale. Et même si elles le voulaient, les agences de voyages n’obtiendraient aucun soutien des partenaires privés et de l’administration.
Pour cet été 2021, le Maroc s’attend à une forte affluence des MRE. Comment l’expliquez-vous ? Par ailleurs, avez-vous des attentes particulières en termes de soutien et d’accompagnement de l’État ?
Nous ne pouvons donner aucune indication à ce sujet, puisque les ports de transit sont fermés et que, pour le moment, tous les sièges d’avion mis à la disposition des visiteurs du Maroc (compatriotes ou étrangers) sont occupés. Nous verrons après l’afflux de toursites, comment se porte le marché. En attendant, la forte affluence s’explique plus par un phénomène similaire au tourisme ethnique, mais cette fois, avec des MRE qui veulent retrouver leurs habitudes, plus particulièrement passer Aïd el Adha en famille, vu que cette fête est devenu impossible à célébrer en Europe. En ce qui concerne le soutien et de l’accompagnement de l’État, les attentes sont nombreuses. Mais, à vrai dire, nous n’en attendons rien parce que nous n’avons jamais rien reçu. Oui, l’Etat a fait un geste en faveur de nos collaborateurs, mais en tant qu’entreprises, nous n’avons rien. L’on nous dit de contracter des crédits, mais nous n’en voulons pas.
Quel est l’impact de la fermeture des frontières Maroc-Espagne sur les traversées en ferry ? Quelles sont les alternatives les moins coûteuses qui s’offrent aux voyageurs venant d’Espagne ?
En fait, la fermeture des frontières Maroc-Espagne est une véritable catastrophe pour les agences de voyages marocaines qui réalisaient un gros chiffre d’affaires avec les touristes marocains qui se rendaient, dans le cadre du tourisme familial, à la Costa del Sol. Et là, nous parlons de plus d’un million de personnes. On peut estimer cela à quelque 200.000 véhicules (pour la partie maritime).
Qui dit réduction des tarifs, dit baisse des marges. Quelle devrait être la formule la plus viable pour l’écosystème du voyage, sachant que les agences de voyages traversent une situation financière très difficile ?
Nous allons essayer de survivre et compter qui aura survécu. Nous avons les agences de voyages en ligne (celles que préfèrent nos amis «marchands de sommeil»). Les compagnies aériennes préfèrent avoir les clients en direct alors qu’elles ne rémunèrent quasi plus les agences de voyages. De plus, aujourd’hui, les voyageurs aiment utiliser leur clavier pour leurs réservations jusqu’au jour où ils ont des problèmes qu’ils n’arrivent pas à solutionner. Bien malin celui qui pourrait proposer une formule aujourd’hui, parce que le mode de voyage évolue et qu’un grand nombre de nouveaux intervenants voient le jour et se mettent en place.
Modeste Kouamé / Les Inspirations Éco