Maroc

Souveraineté numérique : sur quels axes l’Afrique doit-elle capitaliser ?

Mieux exploiter l’IA pour combattre les cybercriminels, intégrer l’éthique dans les projets numériques, renforcer la protection des données, investir dans la santé numérique… Autant de recommandations formulées lors du Gitex Africa 2025. Round-up.

Le rideau est tombé sur la troisième édition du Gitex Africa hier à Marrakech. Un clap de fin après trois jours rythmés par des conférences sectorielles qui ont mis en exergue les enjeux majeurs liés à la souveraineté numérique en Afrique. Bien évidemment, la cybersécurité a pris une place prépondérante dans les débats, dans un contexte marqué par les récentes attaques subies par la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et d’autres institutions marocaines. Le ton est donné dès la cérémonie d’ouverture par Mohamed Al Kuwaiti, chef du Conseil de la cybersécurité des Émirats Arabes Unis.

Durant son allocution, il a insisté sur l’importance de la cybersécurité dans toute stratégie de développement numérique. «La sécurité est un pilier sans lequel aucune souveraineté numérique ne peut émerger. C’est une condition de la confiance, sans laquelle les citoyens, les entreprises et les États ne peuvent s’approprier les technologies de demain», a-t-il indiqué. Selon lui, il est urgent de bâtir des systèmes résilients, interopérables et alignés sur les standards internationaux, tout en étant adaptés aux contextes régionaux.

«La cybersécurité n’est pas uniquement une affaire de technique : elle doit être pensée dans un cadre de coopération entre gouvernements, entreprises et centres de recherche. C’est dans cet esprit que les Émirats poursuivent leur engagement dans le Gitex Africa, qu’ils considèrent comme une plateforme idéale pour développer des synergies Sud-Sud», souligne le responsable émirati.

Mieux exploiter l’IA pour combattre les cybercriminels
L’intelligence artificielle (IA), utilisée par de nombreuses startups africaines, pourrait grandement aider les États africains dans ce chantier de la cybersécurité. C’est la conviction partagée par de nombreux experts lors de cette grand-messe de l’innovation, qui estiment que l’IA permet une détection plus fine et plus rapide des menaces.

Toutefois, préviennent-ils, cette technologie est également aussi un outil puissant pour les cybercriminels, dans un continent qui compte près de 700 millions d’internautes, un nombre qui devrait passer à 1,1 milliard en 2029. D’où la nécessité de privilégier «une IA souveraine, éthique et maîtrisée, conçue à partir de données locales et respectueuses de la vie privée». La réussite de cette guerre numérique contre les hackers passe également par la formation des compétences.

Dans ce domaine, l’Afrique traîne les pieds, puisque ne comptant que 10.000 experts en cybersécurité, alors qu’il en faudrait vingt fois plus à l’horizon 2030, selon l’expert en cybersécurité Imad El Baraka. Ce dernier invite les pays africains à mettre en place une stratégie mutualisée, inspirée de modèles collaboratives comme celui de l’Estonie, et à une formation de masse inclusive, pour faire de la cybersécurité un véritable levier d’innovation.

«L’Afrique ne doit pas seulement se défendre, elle doit créer ses propres solutions de cybersécurité», a-t-il préconisé.

Intégrer l’éthique dans les projets numériques
«Science sans conscience n’est que ruine de l’âme». La célèbre maxime de Rabelais a été remise au goût du jour lors d’un panel placé sous le thème : «Vers une digitalisation de confiance : construire la souveraineté technologique et l’inclusion de l’Afrique». Les différents intervenants ont plaidé pour l’instauration d’un modèle de digitalisation inclusive, porteur de valeurs éthiques fortes.

Selon eux, ce challenge ne saurait être un simple levier technologique, elle doit impérativement s’inscrire dans une dynamique de confiance, de protection des données et de respect des valeurs humaines. Cela permettra non seulement de réduire la fracture numérique, mais aussi de renforcer la souveraineté numérique du continent.

Renforcer la protection des données
«Le défi n’est pas seulement technologique, mais aussi institutionnel et humain», a martelé Lacina Koné, directeur général de l’organisation panafricaine Smart Africa.

À l’en croire, il est urgent de bâtir des écosystèmes où les citoyens se sentent protégés, écoutés et représentés.

«La confiance digitale ne saurait réussir sans une confiance entre les États, les opérateurs technologiques et les populations», a-t-il souligné.

Pas de confiance sans une sécurité des données. C’est le message transmis par Omar Seghrouchni, président de la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel (CNDP). Pour lui, la protection des données personnelles est indispensable dans la mise en place d’un écosystème numérique africain durable.

«Pour vivre le digital, il faut respirer la protection des données», a-t-il déclaré.

Les experts invitent aussi les États africains à adopter des cadres règlementaires harmonisés et transparents, et à miser sur l’éducation, la recherche et l’innovation locale, pour favoriser l’émergence d’une souveraineté numérique fondée sur la confiance.

Investir dans la santé numérique
Pour lancer des projets numériques, il est impératif d’être en bonne santé, un secteur de plus en plus caractérisé par l’usage de technologies de pointe, des solutions principalement proposées par des startups spécialisées dans la healthtech.

La santé numérique a ainsi occupé une place de choix au Gitex Africa 2025, car les défis sont énormes. Avec un marché de la santé estimé à 259 milliards de dollars et qui pourrait, d’ici 2030, devenir le deuxième plus grand marché mondial, juste derrière les États-Unis. Le Maroc entend jouer un rôle majeur dans cette révolution.

Elimane Sembène / Les Inspirations ÉCO



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