Loi sur les délais de paiement : que nous réserve le Nouvel An ?
Censée assainir les relations commerciales, la loi sur les délais de paiement se révèle être un fardeau administratif et financier de trop pour les TPE marocaines. À quelques mois d’une nouvelle étape cruciale, des voix s’élèvent pour réclamer des ajustements urgents.
Le 31 décembre marquera la fin des mesures transitoires excluant les petites factures de la loi sur les délais de paiement (exemple : les factures inférieures à 10.000 DH), élargissant son champ d’application à l’ensemble des entreprises.
À compter de cette date, toutes les factures fournisseurs, quel que soit leur montant, seront soumises à cette loi pour les entreprises déjà concernées. Une nouveauté de taille qui témoigne de la volonté d’étendre progressivement le champ d’application de ce texte visant à moraliser les relations commerciales. La loi 69-21 avait, en effet, introduit des mesures transitoires. Mais dès le 1er janvier 2025, son périmètre s’élargira davantage avec l’entrée en vigueur pour les sociétés dont le chiffre d’affaires est compris entre 2 et 10 millions de dirhams.
«Après 18 mois de mise en œuvre, il est essentiel d’évaluer l’impact de la loi et d’envisager des ajustements», souligne Mohamed Belkhayat, expert-comptable et commissaire aux comptes dans une publication.
Bilan après 18 mois : des avancées et des défis
Selon plusieurs professionnels du chiffre, un premier constat positif se dégage : «La loi a permis une meilleure régulation des relations commerciales en définissant des cadres clairs pour les délais de règlement, améliorant ainsi la transparence». Néanmoins, les TPE et PME ont rencontré des difficultés, avec une augmentation des coûts de gestion et une complexité administrative accrue.
Mohamed Belkhayat insiste : «Après une expérience de terrain d’un an et demi, il s’avère nécessaire de prévoir un seuil minimal de manière permanente par modification de la loi pour simplifier et assouplir les coûts de gestion, notamment pour les TPE. Et c’est urgent». Le respect des délais imposés reste également un défi pour certaines entreprises, malgré des progrès.
«Des mécanismes de suivi et de sanction renforcés sont nécessaires», alertent plusieurs professionnels du chiffre.
Cette sortie de professionnels du chiffre souligne à la fois les avancées positives apportées par la loi sur les délais de paiement, mais aussi les défis importants qui persistent après 18 mois de mise en œuvre, nécessitant des ajustements.
D’un côté, on ne peut nier le progrès significatif que représente cette loi, en termes de régulation et de transparence des relations commerciales. En définissant des cadres clairs pour les délais de règlement, elle a permis une amélioration notable de la lisibilité entre les différents acteurs économiques.
Cependant, son application concrète sur le terrain a aussi mis en lumière des difficultés majeures, en particulier pour les TPE et les PME. Ces entreprises de plus petite taille ont dû faire face à une augmentation sensible de leurs coûts de gestion et de leur charge administrative pour se conformer aux nouvelles obligations. Une complexité accrue qui pèse lourdement sur leurs ressources souvent limitées. C’est pourquoi ces professionnels insistent sur la nécessité urgente de prévoir un seuil minimal permanent par le biais d’une modification de la loi.
Selon eux, après plus d’un an d’expérience, il apparaît indispensable de simplifier et d’assouplir les coûts de gestion, notamment pour les TPE, en les exemptant en deçà d’un certain seuil. Au-delà de cette problématique des coûts, un autre défi de taille persiste : le respect effectif des délais de paiement imposés par la loi. Malgré des avancées encourageantes, de nombreuses entreprises peinent encore à se conformer aux nouveaux délais légaux.
Face à ce constat, les professionnels du chiffre appellent à mettre en place des mécanismes de suivi et de sanction renforcés. Il s’agit d’une condition essentielle pour garantir l’effectivité réelle de la loi et éviter que certains acteurs économiques ne continuent à s’affranchir des nouvelles règles en toute impunité. En somme, si les objectifs d’amélioration de la transparence sont en bonne voie, les difficultés rencontrées par les TPE/PME et les manquements persistants au respect des délais nécessitent des ajustements rapides. Un équilibre doit être trouvé entre l’impératif de régulation et la préservation de la compétitivité de l’ensemble du tissu économique marocain.
Principale attente : un seuil minimal permanent
Pour plusieurs professionnels du chiffre, l’absence d’un seuil minimal permanent pour certaines factures a alourdi la charge administrative, en particulier pour les TPE. «Une modification de la loi pourrait s’avérer indispensable pour simplifier sa mise en œuvre et garantir son efficacité», estiment-ils. Une évaluation globale s’impose donc pour «concilier les objectifs de la loi avec les réalités du terrain».
Au cœur des attentes : l’instauration d’un seuil en dessous duquel les factures seraient exemptées, afin d’alléger les contraintes pesant sur les très petites structures. Il est important de souligner ce point. La question d’un seuil minimal permanent en-dessous duquel les factures seraient exemptées des obligations de la loi sur les délais de paiement est au cœur des préoccupations des experts et des professionnels du chiffre.
En effet, l’absence d’un tel seuil dans la loi actuelle entraîne une charge administrative considérable, notamment pour les très petites entreprises (TPE). Ces dernières se retrouvent confrontées à des coûts de gestion supplémentaires et à une complexité administrative accrue pour se conformer à la loi, alors même que leur taille et leurs ressources limitées les rendent particulièrement vulnérables à ces contraintes additionnelles.
Face à ce constat, de nombreux experts plaident pour une modification de la loi visant à instaurer un seuil minimal permanent. En-deçà de ce seuil, les factures seraient exemptées des obligations liées aux délais de paiement, ce qui permettrait d’alléger significativement le fardeau administratif et financier pesant sur les TPE. L’instauration d’un tel seuil est perçue comme indispensable pour simplifier la mise en œuvre de la loi et garantir son efficacité.
En effet, sans cet ajustement, le risque est de voir de nombreuses TPE accablées par des procédures complexes et coûteuses, ce qui pourrait nuire à leur compétitivité et leur pérennité.
De plus, l’objectif initial de la loi étant d’améliorer la transparence et la régulation des relations commerciales, il est essentiel de prendre en compte les réalités du terrain et les spécificités des différentes catégories d’entreprises. Un seuil adapté permettrait ainsi de concilier ces objectifs avec la nécessité de préserver la viabilité des plus petites structures. Les experts insistent donc sur l’urgence d’une évaluation globale de la loi et d’ajustements en conséquence. L’instauration d’un seuil minimal permanent pour les factures des TPE figurerait alors parmi les priorités, afin d’alléger les contraintes excessives qui pèsent actuellement sur ces acteurs clés de l’économie nationale.
Sanctions et déclarations obligatoires
En cas de non-respect des délais par le débiteur, la loi prévoit des sanctions financières conséquentes. L’amende s’élève au taux directeur de Bank Al-Maghrib dès le 1er mois de retard, puis à 0,85% par mois supplémentaire, appliqués sur le montant TTC des factures concernées.
La loi impose également une déclaration trimestrielle détaillant les factures en retard, visée par un commissaire aux comptes (entreprises ≥ 50 millions de DH de CA) ou un expert-comptable. Tout manquement à cette obligation est passible d’amendes allant de 5.000 à 250.000 DH selon la tranche de chiffre d’affaires.
Un enjeu de taille pour l’économie nationale
Au Maroc, la problématique des délais de paiement représente un enjeu majeur pour la compétitivité des entreprises et la stabilité du tissu économique. Une loi ambitieuse mais dont la mise en œuvre doit être lissée pour en maximiser les effets bénéfiques.
L’extension prochaine à de nouvelles catégories d’entreprises renforcera la nécessité d’ajustements, afin de préserver les équilibres et d’atteindre les objectifs escomptés. Le gouvernement et les professionnels sont donc appelés à poursuivre le dialogue pour faire de cette loi un réel levier de modernisation des pratiques commerciales au Maroc.
Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO