Maroc

Enquête PISA/OCDE : toutes les fondations de l’école à bâtir !

Les résultats que révèle la déclinaison «locale» de la dernière enquête PISA, réalisée par le Conseil supérieur de l’Éducation sur les compétences de nos élèves de 15 ans, devraient servir d’électrochoc aux professionnels du secteur mais surtout, de boussole aux réformes (les vraies) de fond que prépare le gouvernement. Pour l’essentiel, l’école apparaît comme l’un des maillons faibles pour la mise en œuvre du «Nouveau Modèle de Développement». 

La population cible de l’enquête PISA, réalisée par l’OCDE, est constituée de jeunes de 15 ans scolarisés au moins en 7e année. Pour la première fois en 2018, le Maroc a pris part à cette enquête avec 73.218 élèves répartis sur 180 établissements. L’intégration dans l’échantillon de cette enquête fut une rupture politique car les différents ministres de l’Éducation s’y étaient toujours opposés par crainte de faire ressortir les «trous béants» du système.

Premier constat, le redoublement gangrène l’école publique, ce qui, à la sortie, entraîne de gros retards. Près d’un jeune sur deux, dans l’échantillon (49%) a redoublé au moins une fois durant son cursus. C’est de loin le pourcentage le plus élevé de tous les pays/économies participants à l’enquête PISA (voir encadré). Le niveau du redoublement est plus de quatre fois supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE (11%). Sans surprise, les conditions socio-économiques sont clairement un facteur discriminant, souligne l’Instance d’évaluation du Conseil supérieur de l’Éducation.

Plus un élève est issu d’un milieu modeste, plus il a une forte probabilité de redoubler. Sans préciser les critères de mesure de niveau économique, le Conseil relève un écart de 37 points de pourcentage avec un élève provenant d’un ménage «aisé». Il en est de même pour les élèves du public (l’écrasante majorité) et qui comptent plus de redoublants dans leurs rangs comparativement à leurs pairs du privé, soit un écart de 29 points.

Enfin, et là aussi, c’est une donnée structurelle, les élèves ruraux «trébuchent» plus durant leur parcours scolaire par rapport à leurs camarades citadins (18 points d’écart) avec une forte concentration sur les garçons qui semblent moins appliqués que les filles.

Sur le plan des niveaux de compétence, les résultats du Maroc, dans l’enquête PISA, les placent dans tout derniers de la classe, selon le Conseil supérieur de l’Éducation. Le Royaume se positionne en bas de l’échelle, avec les pays ayant affiché les scores les plus faibles, et ce, aussi bien en compréhension de l’écrit qu’en mathématiques et sciences.

Les écarts enregistrés par rapport à la moyenne de l’OCDE sont considérables (allant de 112 en sciences à 128 en compréhension de l’écrit), ce qui équivaut presque à quatre ans d’école ! Pour le Conseil, ces écarts auraient été plus élevés si tous les jeunes de 15 ans avaient passé les tests.

En effet, les 36% qui ne sont pas couverts par l’enquête auraient un niveau de compétence plus faible que les participants. À tempérer toutefois, car une part élevée d’élèves redoublants peut tirer les scores moyens vers le bas.

Tout en ayant le même âge, ces élèves ne sont pas au même stade de scolarité, et n’ont évidemment pas acquis les mêmes compétences par rapport aux non-redoublants. Ces derniers performent nettement mieux que les premiers avec des écarts de 82 points en compréhension de l’écrit, 76 points en mathématiques et 72 points en sciences.

Quatre ans de retard par rapport aux pays de l’OCDE
En plus des scores moyens, PISA définit, pour chaque domaine, une échelle de six niveaux permettant de classer les élèves selon leur niveau de compétences et de décrire les tâches que les élèves, appartenant à un niveau donné, peuvent accomplir. Le niveau six est le plus élevé et les élèves y appartenant sont les plus compétents, alors que les élèves du niveau un sont les moins compétents et ne peuvent mener à bien que les tâches élémentaires.

Le niveau deux est défini comme étant le niveau minimal de compétences que doit avoir un élève en fin de premier cycle de l’enseignement secondaire. Il correspond au seuil à partir duquel les élèves commencent à faire preuve de compétences qui leur permettront de participer de manière efficace et productive à la vie de la société.

La répartition des élèves marocains sur les échelles de compétence de PISA montre qu’une part importante d’entre eux n’atteint pas le niveau minimal, et ce dans les trois domaines : 73% en compréhension de l’écrit, 76% en mathématiques et 69% en sciences.

Absentéisme des enseignants
Lors de l’enquête PISA, il a été demandé aux directeurs d’écoles d’estimer l’ampleur de l’impact de l’absentéisme des enseignants sur l’apprentissage dans leur établissement. Ainsi, les résultats font ressortir qu’une part non négligeable d’élèves est scolarisée dans des établissements où les directeurs déclarent que l’apprentissage est entravé, extrêmement (19%) ou dans une large mesure (17%), par l’absentéisme des enseignants.

Ce fléau est une pathologie dans les écoles, encouragé par l’impunité totale dont bénéficient les enseignants sous la protection des syndicats. Contre le phénomène de certificats médicaux de complaisance et les absences de confort (surtout après les fêtes), les directeurs sont totalement désarmés.

La philosophie de l’enquête

L’enquête PISA est une étude internationale menée par l’OCDE tous les trois ans avec la participation de plusieurs pays et économies à travers le monde. Son objectif consiste à déterminer dans quelle mesure les jeunes de 15 ans sont capables de mobiliser les connaissances et compétences acquises pendant leur vie et de les appliquer à des situations de la vie réelle. Cette enquête cherche également à évaluer leur capacité à être préparés à participer pleinement à la vie de la société et à contribuer à une économie, fondée, de plus en plus, sur les savoirs et les technologies.

Pour ce faire, PISA évalue les compétences de ces jeunes au seuil de l’âge adulte dans des domaines clés : en compréhension de l’écrit, en mathématiques et en sciences. Des données contextuelles sont également collectées dans le cadre de cette enquête sur les élèves participants et le milieu dans lequel ils vivent et étudient. Pour ce faire, des questionnaires destinés aux élèves, à leurs parents, aux directeurs d’établissements ainsi qu’aux enseignants sont administrés en parallèle avec les tests.

En analysant les liens entre les résultats des test et ces données contextuelles, notamment les caractéristiques sociodémographiques des élèves et les types d’établissements qu’ils fréquentent, PISA permet d’évaluer dans quelle mesure le système éducatif permet à tous les élèves de réussir, quelle que soit leur situation personnelle.

La comparaison des résultats du Maroc lui permet de se situer sur le plan international avec des pays à économies émergentes tels que l’Argentine, le Chili, la Malaisie, le Portugal et la Turquie et des pays à revenu moyen, notamment la Thaïlande, les Philippines et l’Indonésie. L’analyse a également opté pour d’autres pays de comparaison, tels que ceux de la région MENA, notamment le Liban, la Jordanie et l’Arabie Saoudite.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO


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