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Secteur minier. Aziz Rabbah : “Le Maroc a choisi d’offrir un cadre fiscal attrayant pour attirer l’investissement dans le secteur minier”

Aziz Rabbah. Ministre de l’Energie, des Mines et de l’Environnement

Réformes des rémunérations des services rendus, respect des engagements RSE des sociétés minières, stratégie minière et Plan Maroc mine, fiscalité…Le ministre de tutelle Aziz Rabbah revient en détail sur toutes ces grandes questions de l’heure du secteur minier marocain.

Un arrêté conjoint des départements de l’énergie et des finances révise les rémunérations des services rendus. Pouvez-vous en dire plus sur cette réforme, les enjeux, perspectives et lacunes observées dans la prise de cette décision ?
Le Maroc a choisi d’offrir un cadre fiscal attrayant pour attirer l’investissement dans le secteur minier à l’instar d’un impôt sur les sociétés au taux réduit de 17,5% (pour les sociétés minières exportatrices ou pour celles qui vendent des produits miniers à des sociétés exportatrices) et d’un taux d’imposition sur le revenu permanent de 20%. Hormis la taxe régionale allant d’un à trois dirhams par tonne extraite et les rénumérations des services rendus exigées aux détenteurs de titres miniers lors de l’obtention ou de renouvellement desdits titres, le secteur minier n’est assujetti à aucune charge fiscale particulière hors du droits commun. Sachant que l’impact de la pandémie a été ressenti au niveau du secteur minier comme les autres secteurs, et cette crise a eu des répercussions économiques et sociales importantes et afin d’alléger cet impact sur les opérateurs miniers, il a été décidé de revoir ces montants et ce conformément aux dispositions de la loi n° 33-13 relative aux mines portant sur la procédure d’octroi des titres miniers tel qu’il a été modifié et complété et notamment son article 24. Cette révision ne peut qu’encourager les opérateurs miniers et attirer plus d’investisseurs dans ce secteur, particulièrement dans l’exploration et la recherche qui constituent des phases à haut risque.

Quelles sont les stratégies mises en place pour un respect des engagements RSE des sociétés minières ?
Le secteur minier regorge des réalisations en matière de RSE à travers: sa participation dans des projets d’infrastructure étant donnée qu’une exploitation minière qui se trouve toujours dans des zones éloignées a besoin d’accès, l’assainissement, l’électrification…, le développement du tissu économique par l’établissement des partenariats avec les fournisseurs, les sous-traitants et clients. L’installation des infrastructures sanitaires et sa participation aux différentes compagnes pour les familles de ses employés à savoir la construction de cités minières et réalisation de programme social par les sociétés minières (logements et complexes socio-éducatifs), la promotion de l’éducation: soutenir l’alphabétisation, la scolarisation en milieu rural et le respect de l’environnement par la réduction de la consommation en énergie et économiser les combustibles fossiles et des matières premières non renouvelables, à côté de la réduction des émissions de des gaz à effet de serre…

Développement du secteur des Mines: le point sur la stratégie minière et le Plan Maroc Mine ?
Le Maroc dispose actuellement d’une Stratégie nationale de développement du secteur minier élaboré après un diagnostic du secteur minier soulignant ses forces et ses faiblesses ainsi que les opportunités et menaces auxquelles il fait face, la vision stratégique concerne toute la chaine des valeurs de l’industrie minière depuis l’exploration minière jusqu’à la valorisation et la transformation des minerais en passant par l’exploitation et l’enrichissement. La stratégie de développement du secteur minier hors phosphates 2013-2025 repose sur des objectifs ambitieux visant à tripler le chiffre d’affaires du secteur à plus de 15 milliards de DH, la multiplication par 10 du volume d’investissement dans l’exploration et la recherche minière à près de 4 milliards de DH et le doublement des emplois générés par le secteur à plus de 30.000 emplois directs. Conscient de son rôle primordial dans l’économie nationale et après six années d’implémentation de la stratégie de développement du secteur minier hors phosphates, une évaluation à mi-parcours de sa mise en œuvre a été réalisée en 2019 et un plan intitulé « Plan Maroc Mines 2021-2030 (PMM) » a été élaboré.

Quels sont les objectifs du PMM ?
Les objectifs stratégiques du PMM est d’impulser une nouvelle dynamique au secteur minier national à l’horizon 2030. Ce Plan, qui a capitalisé les acquis accomplis dans le cadre de la stratégie 2013-2025 a porté les ajustements nécessaires et appropriés en tenant compte de la convergence des intérêts des différentes parties prenantes, afin de faire du secteur minier une locomotive du développement responsable et durable à l’échelle locale, régionale et nationale alliant de la gouvernance et transparence, le développement économique durable et le développement local et la protection de l’environnement. Le PMM qui pose les bases d’une approche globale et pragmatique visant le développement d’un secteur minier national performant et compétitif, repose sur quatre piliers stratégiques à savoir. Pilier I: le Développement d’un tissu d’acteurs compétitifs. Pilier II: Refonte de l’organisation institutionnelle du secteur. Pilier III: Renforcement de l’impact social et du caractère responsable et durable du secteur. Pilier IV: Adaptation du financement et des moyens juridiques et fiscaux aux nouvelles ambitions du secteur.

Un plan d’actions à court et moyen terme a été élaboré dans le cadre de l’opérationnalisation du PMM. Quels sont les chantiers prévus à ce propos ?
De ces piliers découlent plusieurs axes de développement, déclinés en leviers et actions afin de garantir l’opérationnalisation du PMM et assurer son implémentation. Dans le cadre de l’implémentation du PMM, plusieurs chantiers vont être lancés et qui prévoient: la dynamisation de la recherche et de l’exploration minière ; la professionnalisation des opérateurs miniers, l’adaptabilité de l’organisation du secteur: Rôles, Structures, Moyens et Procédures, l’Amélioration de l’image, l’acceptabilité sociale et l’impact du secteur minier sur le développement local, la disponibilité du capital humain qualifié et capitalisation du savoir nécessaire pour le développement et la pérennité du secteur, l’adaptabilité de la fiscalité et de la réglementation aux spécificités du secteur. Dans ce cadre, un amendement à la loi n° 33-13 relative aux mines qui est entrée en vigueur en 2016 est en voie d’approbation et qui prévoit des dispositions importantes portant essentiellement sur la prise en compte de l’ensemble des principaux enjeux économiques, sociaux, environnementaux et de gouvernance.

Combien de titres miniers sont aujourd’hui en exploitation au Maroc ?
À fin décembre 2020 le nombre de titres miniers en activité s’élève à 1071 licences d’exploitation et 3597 permis de recherche. Il y’a lieu de signaler que ce Ministère a procédé à un assainissement des titres miniers inactifs ce qui mettra à concurrence 3147 permis miniers dont 163 licences d’exploitation.

Quels sont les leviers et initiatives actionnés pour renforcer la résilience de cette industrie-clé? Les cartes à jouer pour la reconstruction relance post-Covid ?
Le Département de l’énergie et des Mines a entrepris une série de mesures pour une relance de l’activité minière en vue de redynamiser l’activité minière pour la période post-Covid 19, celles-ci concernent notamment. La mise à réattributions de 2984 permis de recherche et 163 licences d’exploitation révoqués par le bais d’un appel d’offre en faveur des investisseurs disposant des moyens techniques et financiers, ainsi un premier lot de 672 permis de recherche et 30 licences d’exploitation ont fait l’objet de publication au mois de novembre dans la région de Souss-Massa et un deuxième lot au mois de décembre 2020 de 2312 permis de recherche et de 133 licences. Le lancement de l’application de réservation et du suivi des demandes de l’exploitation des haldes et terrils, cet outil développé par le département de l’Énergie et des mines constitue une suite des réformes entreprises par le Ministère pour la simplification des procédures d’octroi des permis et autorisations, et a pour objectif ultime l’instauration de la transparence, le renforcement des pratiques de la bonne gouvernance et la contribution à l’égalité des chances dans le secteur minier, notamment dans la gestion des autorisations d’exploitation des haldes et terrils, et permet également de mettre à disposition des sociétés, une plateforme informatique permettant la réservation du site souhaité parmi ceux soumis à l’autorisation de l’exploitation des haldes et terrils. Ainsi une première liste des haldes et terrils soumise à réservation a été publiée au niveau de l’application. La restructuration de l’activité minière artisanale région minière de Tafilalet et de Figuig a été découpée en zones dont les superficies sont de 144 km2, 16 km2, 4 km2 et 1 km2 et ce conformément à l’arrêté du Ministre de l’Energie, des Mines et de l’Environnement n° 1924.20 du 20 juillet 2020. L’Administration procède au lancement progressif de ces zones à la promotion via des appels publics à la concurrence. Dans ce cadre, le premier appel à la concurrence sur les zones objet du découpage de la région minière de Tafilalet et de Figuig et qui concerne 294 zones est lancé et affiché au site WEB du ministère.

Quelles sont les opportunités à saisir pour libérer le potentiel de croissance du secteur minier marocain ? En quoi le secteur minier est propice à l’investissement ?
Le Maroc est un pays de tradition minière avec une structure géologique variée et particulièrement renommée pour sa richesse en substances minérales et un potentiel minier prometteur, une expertise importante et une main-d’œuvre qualifiée. Il est à rappeler que le Maroc a une législation minière très ancienne, le 1er Code minier date de 1913, et a été régulièrement révisé dont le dernier code minier est promulgué en 2015. Avec potentiel en métaux précieux, métaux de base, roches et de minéraux industriels et une politique de développement en recherche, promotion, diversification de la production, modernisation des méthodes et des moyens d’extraction et de valorisation, ce qui matérialise l’attractivité du secteur pour des investissements nationaux et internationaux.

Pour ce qui est des avantages fiscaux ?
Le Maroc dispose d’un cadre fiscal transparent et les incitations spécifiques au secteur minier sont: Exemption du droit d’importation et de la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux matériels importés pour un investissement supérieur ou égal à 200 millions DH. Rabattement du Taux d’imposition de 17,5% pour: les sociétés minières exportatrices, les sociétés minières qui vendent leurs produits à des entreprises qui les exportent après valorisation. Une contribution de l’État aux besoins d’infrastructures (y compris les routes, l’approvisionnement en eau et l’électricité) dans la limite de 5% de la valeur de l’investissement (pour les projets dont l’investissement dépasse 200 millions DH). L’ouverture de la région minière de Tafilalet et de Figuig aux investissements moyennant des accords de partenariat avec les artisans mineurs détenteurs d’autorisations minières artisanales, constitue des opportunités aussi bien pour les opérateurs miniers que pour le développement durable de la région, étant donnée qu’il s’agit d’une région connue par ses potentialités minières qui sont devenues de plus en plus profond et nécessitent des capacités techniques et financières importante.

Plusieurs défis à relever

Le secteur minier a toujours constitué une composante essentielle de l’économie nationale, l’importance de ce secteur se traduit par sa contribution au produit intérieur brut entre 7% et 10%, sa part dans les exportations nationales de plus de 19,2 % en valeur et ses retombées bénéfiques sur le développement régional et rural. Le Maroc possède d’importantes réserves de phosphates et dispose d’une industrie phosphatière développée: 72% des réserves mondiale et a produit en 2019 plus de 35 millions de tonnes de roche de phosphate marchand, 6,7 millions de tonnes d’acide phosphorique et 10 millions de tonnes d’engrais. Cependant, il y a lieu de préciser que le secteur minier hors phosphate est aujourd’hui confronté à plusieurs défis, notamment la nécessité de découvrir de nouveaux gisements miniers, d’optimiser la valorisation des substances minérales exploitées et d’assurer son développement durable.

Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco Docs



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