Secteur des assurances: entre défis et nouvelles opportunités de croissance
Comparé à d’autres secteurs, celui des assurances au Maroc affiche une bonne résilience aux effets de la crise. Toutefois, les opérateurs concernés sont, aujourd’hui, confrontés à de nombreux défis, parmi lesquels des mutations réglementaires.
Les compagnies d’assurance ont affiché une bonne résilience aux effets engendrés par la crise sanitaire. Le secteur avait entamé des chantiers importants pour développer des solutions efficientes garantissant, aux citoyens et aux entreprises, un soutien pour concrétiser leurs ambitions et une protection efficace face aux aléas. L’objectif est également d’accélérer la transformation du secteur, en le modernisant et le digitalisant afin d’accompagner les assurés et les bénéficiaires de prestations, qui sont de plus en plus connectés.
Les défis du PLF 2023
Le projet de loi de Finances prévoit l’augmentation du taux de l’Impôt sur les sociétés (IS), l’imposition par voie de retenue à la source ou encore la rationalisation de certains avantages fiscaux au profit, notamment, des salariés des entreprises d’assurance ayant le statut Casablanca Finance City (CFC). Sont concernés également les revenus sur les produits de certaines compagnies d’assurance, en particulier les produits de retraite.
À noter que la retenue à la source de l’IS est une disposition qui n’a pas été bien accueillie par les professionnels du secteur d’où les amendements qui ont été déposés, mais qui ont tous été rejetés, à l’heure où nous mettions sous presse. En effet, les intermédiaires d’assurance (agents généraux et courtiers) ont énergétiquement protesté contre cette disposition considérée comme étant «déconnectée de la réalité de leur activité».
Elle constitue, selon eux, une contrainte supplémentaire alors que leurs revenus sont déclarés par les compagnies d’assurance à la Direction générale des impôts (DGI) et à l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS).
Pour rappel, le PLF 2023 envisage d’augmenter le taux de l’IS applicable aux entreprises d’assurances et de réassurance de 37% à 40%, suivant un échéancier s’étalant jusqu’à 2026. Par ailleurs, une analyse des mesures les plus significatives en la matière a mis en évidence trois aspects majeurs : «une hausse des taxes pour les compagnies d’assurance, à travers l’augmentation des taux de l’IS et de l’impôt sur les dividendes OPCI, ainsi que la reconduction de la Contribution de solidarité sociale, impacteront automatiquement les coûts des polices d’assurance sur le marché», estime Claudio Braidotti, CFO allianz Maroc.
Le second aspect concerne des répercussions d’un point de vue business, lesquelles sont à prévoir avec l’imposition forfaitaire de 30% des rachats des contrats épargne retraite.
«Cette mesure pourrait impacter le comportement de souscription et de rachat de ces contrats», affirme le CFO d’Allianz Maroc. En outre, des impacts sur le réseau d’experts et d’intermédiaires sont aussi à prévoir avec l’instauration de la retenue à la source au titre des honoraires, commissions et autres rémunérations de même nature.
Le management d’Axa assurance Maroc relève, pour sa part, qu’il s’agit d’un retour en arrière sur l’incentive fiscal des placements OPCI, qui est un nouvel outils de financement innovant. De plus, en ce qui concerne la retenue à la source au profit de la DGI des 30% d’IR sur les rachats (partiel ou total) des comptes retraite avant leur maturité (durée de contrat supérieur à 8 ans et âge supérieur à 50 ans), le management d’Axa assurance Maroc estime que «cette mesure sera bénéfique à l’épargne si elle est accompagnée de plus de souplesse sur les sorties des contrats matures ou des évènements exceptionnels, tels que l’achat d’un logement principal».
Rappelons que pour les rachats des cotisations et primes se rapportant aux contrats individuels ou collectifs d’assurance retraite, le PLF-2023 prévoit que l’imposition en matière d’IR sera appliquée par voie de retenue à la source au taux non libératoire de 30%, au lieu des taux du barème progressif actuel. Pour qu’elles soient exonérées de l’IR, les cotisations relatives à l’épargne retraite doivent remplir certaines conditions.
Ainsi, le contrat d’assurance retraite doit avoir, au minimum, une durée de huit ans et la prestation doit être servie au bénéficiaire à partir de l’âge de 50 ans révolus. S’agissant de l’exclusion des salariés des banques et entreprises d’assurance ayant le statut CFC du taux spécifique de 20%, les salaires bruts versés aux salariés, qui travaillent pour le compte des sociétés ayant le statut CFC, sont passibles de l’impôt sur le revenu au taux spécifique de 20%, et ce pour une période maximale de 10 ans, à compter de la date de leur prise de fonction. Dans ce cadre, le PLF-2023 propose l’exclusion des entreprises d’assurances et de réassurance et des sociétés de courtage en assurance et en réassurance du bénéfice de cet avantage.
Le secteur résilient
En attendant d’y voir plus clair sur les changements qui seront opérés dans le PLF 2023, le secteur continue de faire preuve de résilience, en dépit d’une économie nationale mise à rude épreuve depuis le déclenchement de la crise sanitaire. Il a ainsi maintenu, malgré tout, son rythme de croissance.
En 2021, l’industrie a affiché des indicateurs très satisfaisants : 50 milliards de dirhams (MMDH) de primes émises et une croissance de près de 10%, au moment où le PIB a réalisé une croissance de 7,9%. En ce qui concerne la distribution, le secteur a versé 4 MMDH de commissions, en progression de près de 7% par rapport à 2020.
Au terme du troisième trimestre de cette année, les primes émises ont atteint 12,4 MMDH, en hausse de 11,5% comparativement à la même période un an auparavant, selon l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS). La branche «Vie» a progressé de 16,3% à 6,42 MMDH et la branche «Non vie» de 6,8% à 6 MMDH, précise l’ACAPS dans un document sur les statistiques trimestrielles.
Au niveau de la branche «Vie», le segment «Épargne-supports dirhams» a affiché une hausse de 22,7% à plus de 5,47 MMDH, le «Décès» a progressé de 9%, tandis que «l’Épargne-support unités de compte» a reculé de 43,3%. Dans la branche «Non vie», les primes se répartissent principalement sur «l’Automobile» avec 2,99 MMDH, les «Accidents corporels» (1,23 MMDH), les «Accidents du travail et maladies professionnelles» (+13,5%) avec 456,7 millions de dirhams (MDH), «l’Incendie» (311,5 MDH), «l’Assistance–crédit–caution» (289,0 MDH), «La Responsabilité civile générale» (145,9 MDH), le «Transport» (197,8 MDH), les «Évènements catastrophiques» (121,7 MDH) et les «Risques techniques» (53,1 MDH).
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO