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Régionalisation avancée. Le CESE prône la révision du modèle de gouvernance territoriale

Plus de quatre ans après la mise en œuvre de la régionalisation avancée, le modèle actuel de gouvernance territoriale est encore loin de l’ambition initialement affichée. C’est le verdict du Conseil économique, social et environnemental qui vient d’être annoncé lors d’une rencontre tenue conjointement avec la Banque mondiale sur le développement régional et les inégalités territoriales.

Insuffisances à la pelle
Plusieurs insuffisances sont relevées par le conseil dans son avis sur «La gouvernance territoriale, levier de développement équitable». Sur le plan législatif, les textes manquent de précision. Il s’agit particulièrement de ceux en lien avec les compétences des collectivités territoriales. Le conseil pointe du doigt les difficultés que rencontrent les collectivités territoriales en matière d’opérationnalisation de leurs compétences. Le mécanisme de contractualisation se heurte à plusieurs difficultés, relatives notamment aux engagements souscrits et au respect des obligations par les parties contractantes. Les clauses contractuelles des contrats qui seraient conclus entre l’État et les collectivités territoriales sont en principe opposables entre organismes publics, mais cette opposabilité n’aurait qu’un caractère théorique en l’absence des mécanismes de garantie prévus par la loi et des règles prudentielles admises par les parties, relève le CESE.

En matière d’élaboration et de suivi des Programmes de développement régionaux et des schémas régionaux d’aménagement des territoires, on note un manque d’instruments clairs de mise en œuvre qui permettent à la région d’organiser de façon cohérente l’action collective des différents acteurs pour l’élaboration et l’exécution des programmes de développement de la région.

Le constat de l’instance de Reda Chami, qui s’est autosaisie de ce dossier, est sans appel: dans cette première phase de régionalisation avancée, la disposition constitutionnelle relative à la prééminence de la région n’a pas été respectée lors des différentes étapes de planification des programmes de développement au niveau territorial dans certaines d’entre elles. Nombre d’autres problématiques sont relevées: le manque d’attractivité au niveau territorial du système de gestion des ressources humaines, la faible effectivité des mécanismes de démocratie participative et de la participation citoyenne, l’absence d’un système unifié d’information territoriale partagé entre toutes les parties prenantes et l’inexistence, au niveau territorial, d’un dispositif indépendant de suivi et d’évaluation.

Recommandations phares
Ainsi, l’accélération du processus de régionalisation avancée s’avère primordial. La concrétisation de cet objectif passe par l’amendement des lois organiques relatives aux collectivités territoriales en vue de clarifier leurs compétences et préciser le périmètre d’intervention de chaque échelon territorial par nature de compétence. Il faut aussi mettre en place des mécanismes permettant à la région de jouer pleinement son rôle de prééminence par rapport aux autres collectivités territoriales, dans le respect des compétences propres à ces dernières. À cela s’ajoute la nécessité de doter les grandes agglomérations d’un statut spécial de métropole à l’instar de plusieurs pays au monde, et ce afin de prendre en compte leurs spécificités. Par ailleurs, le renforcement des mécanismes de pilotage de coordination et d’évaluation s’impose.

À cet égard, il faut revoir le mode de gouvernance relatif à la préparation et la mise en œuvre du PDR en créant une instance de dialogue et de coordination permettant d’associer les représentants des assemblées élues et des services déconcentrés sous la co-présidence du wali de la région et du président du conseil régional.

Le CESE prône également l’institutionnalisation d’une conférence annuelle de concertation regroupant l’ensemble des acteurs territoriaux. Des études d’impact des actions et des PDR doivent être systématiquement élaborées. Sur le plan financier, il faut concevoir une vision du financement des collectivités territoriales à moyen et long termes. Cette vision doit être adaptée aux nouvelles exigences du développement territorial et aux nouvelles compétences de l’administration territoriale. Le conseil appelle à réduire la fiscalité locale à deux impôts locaux couvrant, d’une part, les taxes en lien avec l’habitation et, d’autre part, celles relavant de l’activité économique.

Le CESE propose aussi de conditionner le visa des budgets des collectivités territoriales par la mise en place effective des fonctions d’audit interne et de contrôle de gestion prévus par les lois organiques relatives aux collectivités territoriales. Le renforcement de la démocratie participative au niveau local n’est pas en reste. À ce titre, il faut parachever le dispositif de participation citoyenne prévu par les dispositions constitutionnelles. 

Des indicateurs inquiétants
Les inégalités territoriales au Maroc sont inquiétantes. À cet égard, le président du CESE, Ahmed Reda Chami, a tenu à citer plusieurs indicateurs: la région de Casablanca est quatre fois plus peuplée que Rabat et cinq à six fois plus que Fès ou Marrakech, sachant que ces deux dernières sont considérées comme les villes les plus peuplées du centre du Maroc. Trois régions (Casablanca-Settat, Rabat-Salé-Kénitra et Tanger-Tétouan-Al Hoceima) sur 12 accaparent 55% des entreprises du royaume, «ce qui impacte négativement la croissance et l’emploi des régions les moins attractives, qui continuent de pâtir de la faiblesse des ressources fiscales propres et sont très fortement dépendantes des transferts de l’administration centrale», souligne Chami. La répartition inégale des activités et des projets d’investissement entre les régions influe sur la persistance des disparités territoriales et sur la contribution relativement faible de certaines régions à la croissance économique nationale, indique Chami.


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