Métiers mondiaux : les reco de l’IRES pour assurer la reprise
Dans son dernier rapport stratégique, l’IRES estime qu’il est important de repenser le futur des nouveaux métiers du Maroc, fortement impactés par la crise sanitaire, afin d’opérer pour les années à venir les changements nécessaires dès que possible.
L’année 2020 a été marquée par un ralentissement général de la part des exportations des Métiers mondiaux du Maroc dans les exportations, à l’exception de l’industrie alimentaire, affirme l’Institut royal des études stratégiques (IRES) dans un zoom sur les Métiers mondiaux, publié dans son rapport stratégique 2021, intitulé «Vers un nouveau monde post-Covid 19 ?». Vu ce constat, l’institut estime qu’il «est peut-être temps de s’interroger sur le devenir de ces métiers mondiaux du Maroc dans les décennies à venir, afin de prendre au plus tôt les virages nécessaires…». En premier, l’IRES rappelle que, dans le cadre d’un vaste programme d’action visant à améliorer sa compétitivité pour hausser son industrie au niveau mondial, le Maroc a opté pour le développement de métiers mondiaux. Parmi ces métiers figurent l’automobile, l’aéronautique, l’agroalimentaire, le textile et cuir et l’offshoring électronique. D’ailleurs, les différentes stratégies industrielles adoptées par le Maroc ont enclenché une réelle dynamique dans certains secteurs (automobile et aéronautique). Toutefois, la crise sanitaire est survenue pour casser ce rythme de croissance enclenché depuis plusieurs années.
L’industrie automobile toujours attractive
Dans son analyse détaillée sur le secteur de l’industrie automobile, l’Institut indique que cette activité, à la croissance soutenue, est devenue, en 2014, le premier secteur exportateur du royaume. Elle a créé près de 150.000 emplois entre 2014 et 2019, cumulant 27% de créations d’emplois industriels. Toutefois, le ralentissement des échanges mondiaux, durant l’année 2020, a entraîné une diminution de 10% du chiffre d’affaires à l’export du secteur automobile marocain. En outre, l’IRES reste optimiste pour le secteur, puisque dès le début de l’année 2021, de nouveaux investissements étrangers ont conforté la bonne réputation du Maroc auprès des leaders mondiaux de l’automobile. Par ailleurs, l’IRES relève que la crise économique consécutive à la pandémie a, aussi, suscité l’émergence d’une volonté de restructuration des chaînes de valeur mondiales, conduisant à un raccourcissement de la chaîne logistique et à une possible relocalisation vers l’Europe de certaines activités du secteur automobile; ceci dit, la position du Maroc devrait en sortir renforcée. «La capacité de l’industrie automobile marocaine à demeurer compétitive et attractive au cours des prochaines décennies est, donc, fortement liée à sa capacité d’anticipation et d’adaptation à ces nouvelles perspectives», estime l’IRES dans son rapport.
L’aéronautique a besoin d’un second souffle
De par le monde, l’industrie aéronautique est l’un des secteurs les plus touchés par les effets de la crise sanitaire. Pour le cas du Maroc, les répercussions se sont rapidement fait sentir, «mais leur gravité est relative», estime le think-tank. Chiffres à l’appui, l’industrie a affiché un recul de 29% de son chiffre d’affaires à l’export, entre 2019 et 2020, contre 50% au niveau mondial. Elle a aussi enregistré 10% de pertes d’emploi contre 43% au niveau international. Il est noté dans ce sens que le secteur ne devrait pas retrouver son niveau de 2019 avant 4 ans, compte tenu des lourdes pertes que Boeing et Airbus, les deux géants mondiaux, devront éponger (production réduite d’un tiers). Parmi les solutions proposées pour la relance de ce secteur au Maroc, l’institut estime qu’«il est essentiel tout d’abord que la main-d’œuvre fortement spécialisée, qui fait la force du Maroc, ne se déqualifie pas. C’est l’occasion de mettre en place de nouveaux programmes de formation sur des aspects techniques qui seront essentiels demain : la motorisation, la nature du carburant, la forme et le dimensionnement de la voilure, l’allègement de la conception et des matériaux».
L’agroalimentaire, un secteur résilient
L’IRES assure, dans son rapport, que l’agroalimentaire représente une industrie qui a pu résister au choc induit par la crise sanitaire. Le chiffre d’affaires à l’export, assurant une croissance continue de 7,6% en moyenne par an sur la période 2010-2019, a progressé de 1,2% entre 2019 et 2020. Sa part dans les exportations totales – près de 11% sur la période 2010-2019 – a augmenté d’un point de pourcentage entre 2019 et 2020. Malgré ses chiffres encourageants, les performances de cette industrie demeurent, globalement, en deçà de ses potentialités. Selon l’IRES, «une grande partie des produits exportés ne subit qu’une simple transformation. Et les produits de la pêche hauturière, à forte valeur ajoutée, ne constituent encore que 6% de la production halieutique». Pour le think-tank, la crise sanitaire représente une opportunité pour la transition vers un nouveau modèle agro-alimentaire marocain, reposant sur le renforcement de la vocation exportatrice de ce secteur et le développement d’une production de proximité, plus durable, à même de garantir la souveraineté alimentaire du pays.
Une impérative mutation pour le textile
Avec une part des exportations totales en baisse constante depuis une décennie, le modèle du secteur du textile, qui a prévalu au Maroc depuis les années 60, «est dépassé» selon l’IRES, à cause de «la haute intensité de main-d’œuvre, le faible niveau technologique, le schéma obsolète de partage de valeur entre donneurs d’ordre et exécutants», martèle l’IRES dans ce sens. Le fait que la Chine ait évolué vers une économie de services et des coûts élevés de main-d’œuvre vont conduire de nombreux fabricants de vêtements à transférer leur production vers les pays en développement. Cette opportunité est l’occasion pour le Maroc de procéder à une véritable mutation de son industrie textile. Outre la restructuration nécessaire du secteur, le textile doit accéder à un niveau supérieur d’intégration technologique et de diversification. Notamment, l’utilisation de composites en fibres naturelles au bénéfice de l’industrie automobile et du secteur médical ; la production de textiles non tissés pour les produits hygiéniques et les géotextiles ; le développement des textiles intelligents, incorporant des capteurs, des batteries ou diverses substances ; ou encore l’intégration des automates intelligents dans les processus de production.
L’offshoring doit se préparer aux futures évolutions
Ce métier figure parmi les activités ayant le plus évolué au Maroc ces dernières années. Pour ce secteur à fort potentiel, l’IRES estime que trois leviers seront déterminants pour le développement des délocalisations au Maroc. il s’agit de l’expertise et du niveau de compétence imposés par les exigences de productivité et de compétitivité internationale, des incitations fiscales flexibles et adaptées, susceptibles d’attirer une clientèle étrangère, ainsi que la qualité et la vitesse des connexions Internet, la sécurité d’infrastructures immatérielles… l’institut affirme que ces leviers demandent des investissements importants non seulement en matière de ressources humaines, formation et rémunération, mais aussi dans la mise à niveau des systèmes d’information et d’équipements.
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO