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La balle est dans le camp du gouvernement

L’entrée en vigueur des modalités de délivrance des autorisations spéciales, pour les associations qui veulent ester en justice, met le mouvement consumériste devant un sérieux test. C’est le ministère de la Justice qui tire les ficelles de cette option, nouvellement cadrée par une décision conjointe des départements de la justice et du commerce.

Après une attente de près de 4 ans, le gouvernement a dévoilé les modalités d’obtention des autorisations spéciales destinées aux associations non reconnues d’utilité publique, qui veulent défendre les intérêts des consommateurs qui se déclarent lésés par un produit commercialisé dans le circuit formel. Après l’adoption du nouvel arsenal réglementaire portant sur l’étiquetage des produits qui fournit des informations complètes sur les diverses catégories d’opérateurs sur le marché marocain, le nouvel arrêté signé conjointement par les ministères de la Justice et de l’Industrie, détaille la procédure à suivre pour les associations qui veulent saisir les tribunaux. Ce sont au total 8 documents qui sont  exigés par la nouvelle réglementation, avant que les demandes ne soient examinées. Ainsi, toute association qui postule pour l’obtention d’une autorisation spéciale, doit impérativement fournir une copie du contrat conclu avec l’avocat sensé la représenter, accompagnée d’une copie de la résolution de l’instance décisionnelle de l’association qui a choisi la voie de la justice. L’État veut surtout avoir des garanties sur le fonctionnement normal de l’association, avec une série de conditions exigées sur leur constitution, la conformité de ses statuts à la loi, ainsi que l’attestation de validité de l’assemblée générale ayant élu l’organe dirigeant de l’association. La nationalité des membres de l’association a été également insérée dans la liste des informations imposées par la décision conjointe des ministères de la Justice et de l’Industrie, ainsi que de la liste complète des adhérents et les montants de leurs cotisations. Les rapports moral et financier des deux dernières années sont aussi exigés avant de procéder au dépôt de la demande auprès du greffe central du ministère de tutelle. La demande doit aussi indiquer le champ d’activité visé par la plainte projetée.

Contraintes multiples
Le président de l’Association marocaine de la protection et de l’orientation du consommateur, ne cache pas l’importance de la nouvelle réglementation «qui remplit un vide et pourrait être améliorée». Bouâzza Kharrati précise surtout que «le grand hic du nouvel arrêté reste la demande de l’avis du département concerné avant le recours en justice». Cette aberration risque de freiner l’option d’ester, «attendue par les associations de protection du consommateur depuis 2014». Le second reproche du président de la fédération n’est autre que la centralisation, au niveau de Rabat, de la procédure de dépôt. «Cette autorisation restera problématique pour les associations situées dans les villes éloignées du Maroc», insiste Kharrati. La convention signée préalablement avec un avocat, a été aussi pointée du doigt par le président de la fédération qui note que «les associations n’ont pas de budgets pour supporter les charges liées aux honoraires des avocats et de la procédure judiciaire». Pourtant, l’optimisme semble toujours primer pour les représentants des associations de protection des consommateurs. «Voyons voir», tient à indiquer Kharrati qui voit dans la formule de l’arrêté choisi, une souplesse de l’État pour une éventuelle amélioration du nouveau système d’agrément mis en place. «S’il s’agissait d’une loi, les choses seraient beaucoup plus compliquées pour améliorer le texte», tient à noter le militant
associatif.


Pourquoi le ministère et pas le parquet ?

L’une des grandes questions posées par la nouvelle réglementation se réfère à la compétence délivrée au ministère de la Justice, de procéder à la réception des demandes d’ester en justice formulées par les associations non déclarées d’utilité publique. En effet, depuis la séparation officielle du parquet général et du ministère de la Justice, ce sont les procureurs qui sont les représentants exclusifs des intérêts de la collectivité. Le texte conjoint ne semble pas par conséquent prendre en considération cette nouvelle donne, en donnant au département de la justice le droit de regard exclusif sur les demandes des associations. À rappeler que la loi 33-17 confirme aussi «la séparation du ministère public du pouvoir exécutif et son placement sous la tutelle du procureur général du roi près la cour de cassation. En plus de confier la présidence du ministère public au procureur général du roi au sein de la plus haute juridiction, la nouvelle législation donne ainsi au représentant du parquet général, la mission de «communiquer des instructions écrites légales aux procureurs généraux» et «d’informer le ministre de tutelle».



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