Industrie agroalimentaire : la levure, nouveau cheval de bataille d’Anouar Invest

Le groupe Anouar Invest a lancé à Jorf Lasfar les travaux de sa nouvelle unité Anouar Yieldest Additives (AYA), un projet de 480 millions de dirhams qui ambitionne de transformer la mélasse en levures et additifs alimentaires, tout en ouvrant au Maroc les portes d’un marché mondial dominé par quelques grandes puissances. Soutenu par un partenariat institutionnel inédit et un financement bancaire structuré, ce fleuron biotechnologique inscrit le Royaume dans la dynamique de souveraineté alimentaire et industrielle voulue par le Souverain.
Un demi-milliard de dirhams pour transformer la mélasse en un produit à haute valeur ajoutée et positionner le Maroc parmi les rares pays au monde capables de produire de la levure et ses dérivés. Tel est l’ambitieux pari du groupe Anouar Invest, qui vient de lancer officiellement les travaux de son unité industrielle Anouar Yieldest Additives (AYA) à Jorf Lasfar.
Une cérémonie marquée par la présence de quatre membres du gouvernement a souligné l’importance nationale d’un projet qui ne se limite pas à la simple expansion d’un groupe, mais qui ouvre de nouvelles perspectives à l’ensemble de la filière agroalimentaire marocaine.
L’usine AYA, implantée à proximité du complexe sucrier de Sidi Bennour, illustre la logique de l’économie circulaire. Elle exploitera la mélasse, sous-produit de l’industrie sucrière, pour en faire de la levure fraîche, de la levure sèche et des améliorants alimentaires, avec à terme le développement de l’extrait de levure, un savoir-faire rare à l’échelle mondiale.
«La mélasse acquiert ainsi une nouvelle vocation agro-industrielle et économique», a souligné le ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, Ahmed El Bouari, rappelant que ce projet s’inscrit pleinement dans la stratégie Génération Green qui place l’agriculture au cœur du développement économique et social.
Avec une capacité initiale de 25.000 tonnes extensible à 58.000 tonnes, le site de Jorf Lasfar se veut l’un des plus modernes de la région. Conçu sur une superficie de 71.000 m² dont 28.700 m² couverts, il répond aux normes internationales les plus exigeantes en biotechnologie.
«Ce chantier illustre parfaitement la dynamique d’industrialisation que connaît le Maroc et la confiance des investisseurs nationaux dans le potentiel de notre économie», a déclaré le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, insistant sur la double contribution du projet à la souveraineté alimentaire et à l’émergence d’une nouvelle filière exportatrice.
Un projet 100% marocain, soutenu par l’État et les banques
Portée par la holding Anouar Invest, l’initiative revendique un ancrage national fort. «Notre ambition est de bâtir un acteur national et régional de premier plan dans l’industrie de la levure et des améliorants alimentaires, en combinant excellence industrielle, innovation biotechnologique et durabilité», a affirmé le président-directeur général, El Hachmi Boutgueray.
Conçu et pensé au Maroc, AYA mise sur 95% de matières premières locales et un taux d’intégration estimé à 60%, confirmant la volonté du groupe de mobiliser prioritairement les ressources industrielles nationales. Le projet bénéficie par ailleurs d’un soutien institutionnel inédit. Une convention de partenariat a été signée entre quatre ministères – Industrie et Commerce, Agriculture, Investissement et Commerce extérieur – et Anouar Invest, preuve que le projet est reconnu comme structurant et intégré dans les orientations stratégiques du Royaume.
«Ce projet innovant, soutenu dans le cadre de la Nouvelle Charte de l’investissement, incarne la montée en puissance d’une industrie nationale durable, compétitive, créatrice d’emplois et portée par des talents marocains», a rappelé Karim Zidane, ministre délégué à l’Investissement.
Pour donner corps à cet élan, le financement a été confié à un consortium bancaire mené par CDG Capital, avec la participation du CIH Bank, renforçant ainsi la solidité financière de l’opération et son ancrage institutionnel.
Une ouverture internationale et une ambition verte
Avec plus de 500 emplois directs et indirects attendus, AYA contribuera à la dynamisation de l’économie locale tout en ouvrant le Maroc sur de nouveaux marchés. «Grâce à son orientation exportatrice, cette unité contribuera à renforcer la présence du Maroc dans les chaînes de valeur mondiales et à valoriser notre savoir-faire national», a souligné pour sa part le secrétaire d’État au Commerce extérieur, Omar Hejira.
Environ 30% du chiffre d’affaires sera ainsi réalisé à l’export, avec pour cibles l’Europe, l’Afrique, le Moyen-Orient et les pays caucasiens, plaçant le Royaume en concurrence directe avec les acteurs historiques que sont la France, l’Australie, la Chine et le Canada. L’usine se distingue aussi par son engagement environnemental. Une station de traitement des eaux respectant les normes internationales sera mise en place, et 40% des 14 MW de puissance électrique installée proviendront d’énergies renouvelables.
Pour Saad Bennani, directeur de l’usine, «la capacité verte installée équivaut à l’alimentation électrique de 250.000 personnes, soit une ville moyenne».
Enfin, le projet suit une trajectoire planifiée qui a démarré avec les études techniques en 2022, avant la signature de la convention d’investissement en février 2025 et le lancement des travaux en septembre de la même année. La mise en production est prévue pour mi-2027 et une deuxième phase d’expansion viendra renforcer les capacités en 2029.
Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO