Inclusion financière : les modèles classiques ne suffisent plus
Le ton a été donné dans le dernier rapport de Bank Al-Maghrib dédié à la Stratégie nationale d’inclusion financière. Il faudrait un véritable choc pour combler les écarts les plus significatifs en termes de pénétration des services financiers. Des solutions alternatives devraient être mises en place afin de dépasser les paradigmes des modèles classiques.
Considérée comme composante importante des modèles de développement des pays, l’inclusion financière ne cesse de susciter l’intérêt des autorités publiques soucieuses de lutter contre la pauvreté et de favoriser le bien-être social et économique des populations. Elle s’avère ainsi nécessaire pour combler les écarts les plus significatifs en termes de pénétration des services financiers entre femmes et hommes, ruraux et urbains, jeunes et adultes. Au Maroc, la Stratégie nationale d’inclusion financière (SNIF) a été élaborée afin de mettre en place des solutions idoines capables de combler ces écarts.
La stratégie fixe ainsi un cap à l’ensemble de l’écosystème et établit un cadre de coordination et de collaboration autour des axes clairement définis suivant une approche participative. Selon le dernier rapport de Bank Al-Maghrib (BAM), la SNIF a défini cinq grandes orientations pour concrétiser ses ambitions. Il s’agit, en premier lieu, d’accélérer le développement des modèles alternatifs afin de créer un choc d’inclusion financière en développant de nouveaux modèles qui ont fait leur preuve dans des pays comparables en termes de PIB/habitant. Et ce, dans l’objectif d’atteindre les populations les plus exclues à moindre coût, à travers des offres adaptées aux spécificités de la demande exclue.
Cette stratégie entend aussi encourager les modèles classiques à renforcer leur rôle dans l’inclusion financière en levant les freins qui entravent l’accessibilité des services financiers de base pour les segments peu desservis, voire exclus, et ainsi rendre la bancarisation de ces derniers attractive. Elle prévoit aussi de renforcer les outils permettant de mieux appréhender le risque, via le développement des prérequis d’une bonne connaissance des usagers par les opérateurs, et la capacité de ces derniers à octroyer des financements au profit des populations ayant des caractéristiques spécifiques rendant complexe la prise en charge de leur risque inhérent. Cette orientation, précise BAM, couvre aussi bien les Très petites entreprises (TPE) que les startups. Il est question également de créer les conditions d’un plus grand usage des produits financiers, à travers notamment la dématérialisation des paiements et l’éducation financière, dans l’objectif d’ancrer l’utilisation responsable des services financiers formels dans le comportement des citoyens et des TPE.
«Dans ce cadre, la dématérialisation des paiements, en particulier, ceux entre l’État et les usagers et l’éducation financière, joue un rôle catalyseur», souligne BAM.
Enfin, la stratégie prévoit de piloter l’inclusion financière dans la durée, en mettant en place un dispositif de pilotage, de suivi et de coordination, dédié à l’inclusion financière. Parallèlement, le rapport fait ressortir que la SNIF définit une vision nationale issue de la définition adoptée de l’inclusion financière, à savoir «assurer un accès équitable pour l’ensemble des individus et entreprises à des produits et services financiers formels (transactions, paiements, épargne, financement et assurance) pour une utilisation adaptée à leurs besoins et à leurs moyens, afin de favoriser l’inclusion économique et sociale tout en préservant leur droit et dignité».
Genèse de la SNIF
Le ministère de l’Économie et des finances a travaillé conjointement avec Bank Al-Maghrib depuis 2016 sur le processus de développement d’une SNIF, dans un cadre de partenariat national permettant de coordonner les efforts et d’aligner les visions des acteurs de l’écosystème financier. Après avoir finalisé la phase de formulation, l’année 2019 représente ainsi une année de transition marquée principalement par l’opérationnalisation des organes de gouvernance de la stratégie, l’adoption de sa feuille de route détaillée et le lancement des travaux de mise en œuvre. Ce premier rapport porte donc sur les principales étapes franchies dans le processus de la SNIF, depuis le lancement en 2016 jusqu’à 2019, année au cours de laquelle les travaux de mise en œuvre ont été initiés. En outre, le bilan des principaux chantiers de la feuille de route est présenté et servira de référence pour les prochaines éditions du rapport.
Aida Lô / Les Inspirations Éco