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Impôt : la Cotisation minimale résiste à tous les assauts

Décriée par le patronat et le CESE, qui réclament en vain sa suppression, la Cotisation minimale est perçue par les pouvoirs publics comme une contribution aux charges de la collectivité quel que soit le résultat de l’entreprise. En réalité, elle traduit un certain aveu de faiblesse à lutter contre l’évasion de l’assiette fiscale. 

Si la France a inventé la TVA en 1954, le Maroc tient également son brevet d’invention en matière fiscale : la Cotisation minimale (CM). Depuis le 1er janvier 2022, le taux de cet impôt, dont le chiffre d’affaires sert de base de calcul, a été ramené à 0,4% pour les entreprises bénéficiaires (résultat courant hors amortissements), mais il reste à 0,6% pour les sociétés déficitaires depuis deux ans, 0,25 % pour les entreprises opérant dans les secteurs des produits pétroliers, du gaz, du beurre, de l’huile, du sucre, de la farine, de l’eau et l’électricité.

En revanche, les professions libérales et autres prestations de services sont redevables de 6 % de leur chiffre d’affaires. La Cotisation minimale est vivement critiquée par la CGEM depuis des années qui, dans son dernier livre blanc publié en octobre dernier, suggérait sa suppression au plus tard en 2025 (c’est son expression) après des réductions progressives de taux pendant trois ans.

Pas sûr que la confédération patronale sera entendue car tous les ministres des Finances, quelle que soit leur obédience politique, ont toujours défendu le principe de ce qui est considéré au ministère des Finances comme étant un «minimum de contribution aux charges de la collectivité même lorsqu’une entreprise n’a pas gagné de l’argent». La justification est ailleurs, observe un expert-comptable à Casablanca.

Au regard de l’ampleur de la dissimulation des revenus potentiellement imposables et de l’énorme proportion des sociétés structurellement déficitaires, la Cotisation minimale est considérée comme «un mal nécessaire». C’est un instrument qui permet à l’État de s’assurer que les agents économiques participent à la couverture des charges collectives. La polarisation du poids de l’impôt, telle qu’elle ressort des rapports de la DGI, ne laisse que très peu de marge de manœuvre aux pouvoirs publics.

Selon le Conseil économique, social et environnemental (CESE), près de 400 entreprises, dont le chiffre d’affaires représente la moitié du total du chiffre d’affaires déclaré, ne constituent que 0,16% par rapport à la base des entreprises déclarantes. La moitié des recettes de l’IS proviennent de 80 entreprises alors que l’état-civil du fisc compte près de 380.000 sociétés inscrites à l’impôt sur les sociétés.

Cette concentration de grands comptes dans les recettes n’est pas une spécificité marocaine, mais ce qui l’est en revanche c’est que cette polarisation reste figée alors que l’économie nationale a fait émerger ces dernières années quelques «grandes PME», des entreprises à taille intermédiaire (les ETI), s’étonne un fiscaliste à Casablanca.

Seuls les contribuables disposant de revenus professionnels, soumis aux régimes du résultat net réel ou du résultat net simplifié, rentrent dans le champ d’application de la CM. La base de calcul est constituée par le montant du chiffre d’affaires fiscal hors TVA.

Le Code général des impôts (CGI) et les circulaires d’interprétation qui l’accompagnent sont pourtant clairs. Font partie de la base de calcul de la Cotisation minimale, le chiffre d’affaires et les autres produits d’exploitation, les produits financiers et les subventions et dons reçus.

Dans les faits, les éléments à intégrer dans l’assiette ne sont pas toujours bien compris. Mal conseillées ou par mauvaise foi, bien des PME auraient tendance à restreindre le périmètre du chiffre d’affaires et, donc, à minorer le montant de l’impôt.

Elles se retrouvent ainsi à affronter régulièrement des rappels d’impôt et se mettent dans le viseur de l’administration fiscale. Des chefs d’entreprise sont souvent étonnés lorsque leur conseil fiscal les informe que les subventions reçues de l’État, de collectivités locales ou des tiers, font partie de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.

Il y a quelques années, le management de l’ex-Omrane avait sauté au plafond en recevant un redressement fiscal de 250 millions de dirhams pour avoir «omis» d’intégrer, dans le chiffre d’affaires, les subsides que versaient l’État à la holding dans le cadre de la politique de lutte contre l’habitat insalubre.

Ces subventions, lorsqu’elles sont destinées à acquérir ou à créer des éléments non amortissables, sont à rapporter à l’exercice au cours duquel elles ont été perçues et sont retenues au titre de cet exercice pour la détermination de la base imposable de l’IS et pour le calcul de la cotisation minimale.

Toutefois, lorsqu’elles concernent des biens amortissables, elles peuvent être réparties sur la durée d’amortissement desdits biens financés par ladite subvention, conformément aux dispositions de l’article 9 du Code général des impôts.

Dans son rapport sur le Nouveau modèle de développement, le CESE avait également suggéré l’abandon de la Cotisation minimale «au terme d’un processus qui donnerait plus de maîtrise des bases et des activités». En phase transitoire, le Conseil propose de prévoir une CM plus faible, mais dont le taux augmente progressivement en fonction du nombre d’années où l’impôt payé correspond à la Cotisation minimale, tout en tenant compte du cas particulier des secteurs dont la marge est réglementée. Encore une usine à gaz.

Un maquis d’exonérationsen place

• Les sociétés exportatrices qui bénéficient de l’exonération totale de l’IS pendant la période des cinq ans consécutifs, qui court à compter de l’exercice au cours duquel la première opération d’exportation a été réalisée, bénéficient également, au titre du chiffre d’affaires réalisé à l’exportation, de l’exonération totale de la Cotisation minimale pendant la même période de cinq ans.

• Les contribuables soumis à l’impôt sur le revenu sont exonérés de la cotisation minimale pendant les trois premiers exercices comptables suivant la date du début de leur activité professionnelle.

• Les promoteurs des logements sociaux bénéficiant, pour l’ensemble de leurs actes, activités et revenus afférents à la réalisation de logements sociaux, de l’exonération totale des impôts, droits et taxes ci-après : l’impôt sur les sociétés, l’impôt sur le revenu et les droits d’enregistrement et de timbre.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO


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