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Gestion des déchets : des fonds frais pour assainir les villes

Avec une injection massive de 250 millions de dollars approuvée par la Banque mondiale, le Maroc franchit un pas décisif dans la modernisation de la gestion de ses déchets. Cet investissement, ancré dans les principes de durabilité, promet de transformer les pratiques en soutenant les réformes prioritaires et les infrastructures clés, tout en répondant aux défis environnementaux pressants.

La Banque mondiale vient de renforcer son partenariat historique avec le Maroc en approuvant une nouvelle aide de 250 millions de dollars destinée à transformer la gestion des déchets ménagers et assimilés. Ce programme, qui s’intègre aux objectifs du Programme national de valorisation des déchets ménagers (PNVDM), promet d’apporter des réponses concrètes à des défis persistants en matière environnementale et financière.

Moustapha Ndiaye, directeur de la Banque mondiale pour le Maghreb, a salué cette initiative qui vise à rendre les villes marocaines plus agréables à vivre tout en mettant l’accent sur «la nécessité d’améliorer les services d’infrastructures clés dans les zones urbaines». L’enveloppe permettra notamment d’améliorer la gestion des décharges contrôlées, de fermer les sites non conformes et de promouvoir des modèles de valorisation financièrement viables.

«Ce nouveau Programme s’inscrit dans la continuité de notre engagement de longue date dans le secteur de la Gestion des déchets aménagés et assimilés (GDMA) et complète les efforts du gouvernement pour améliorer la fourniture de services locaux et la qualité de vie des citoyens tout en soutenant les efforts du Maroc, d’adaptation et d’atténuation au changement climatique», a-t-il souligné.

Inverser la tendance
Malgré les progrès réalisés au cours des deux dernières décennies, la mise en décharge reste encore la méthode principale pour traiter les déchets au Maroc, tandis que les pratiques de tri à la source et de valorisation peinent à s’imposer. Ce programme vise précisément à inverser cette tendance, en aidant à réduire la dépendance à l’enfouissement et à renforcer les mécanismes de recyclage.

Depuis le lancement du Programme national de gestion des déchets ménagers en 2008, le Maroc a su faire avancer la collecte des déchets de manière spectaculaire, passant de 40% à 96% en milieu urbain. Cette progression s’est accompagnée d’une modernisation des infrastructures, avec la création de décharges contrôlées et la réhabilitation de nombreuses décharges sauvages.

Toutefois, le taux de valorisation des déchets demeure faible, ne dépassant pas 10 %, bien en deçà des objectifs fixés initialement. Cette situation met en lumière les limites d’un modèle encore largement basé sur la collecte et l’enfouissement, alors même que le potentiel économique et écologique des déchets reste sous-exploité. L’absence d’un tri à la source organisé complique la valorisation en aval, réduisant les opportunités de recyclage et rendant le compostage peu efficace.

Un nouvel élan
L’aide financière de la Banque mondiale vient soutenir le Programme national de valorisation des déchets ménagers, lancé en 2023 pour répondre aux défis actuels. Ce dernier privilégie des pratiques durables et met l’accent sur la création de valeur ajoutée à partir des déchets, qu’il s’agisse de recycler, de récupérer des matériaux ou de produire de l’énergie.

Cette démarche s’inscrit pleinement dans le Nouveau modèle de développement du Maroc, qui place la durabilité au cœur des priorités nationales. Le programme vise également à améliorer le suivi des émissions de gaz à effet de serre liées à la gestion des déchets, une avancée significative pour aligner le Maroc sur les objectifs de l’Accord de Paris.

En parallèle, il ambitionne de renforcer les mécanismes de gouvernance, en clarifiant les rôles et responsabilités des acteurs locaux et nationaux.

Repenser les pratiques pour un avenir circulaire
Les efforts déployés par le Maroc pour moderniser la gestion de ses déchets s’inscrivent dans une dynamique plus large de transition vers une économie circulaire, une démarche dont l’urgence a été mise en avant dans un avis en auto-saisine du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Ce dernier souligne l’insoutenabilité du modèle linéaire actuel, basé sur le triptyque «produire, consommer, jeter», et appelle à une profonde refonte des pratiques pour intégrer des principes comme le tri, le recyclage et la valorisation.

L’avis du CESE insiste sur la nécessité de fixer des objectifs chiffrés pour chaque territoire afin de réduire la mise en décharge et de tendre vers des territoires «zéro déchet». Il recommande également la révision des contrats liant les collectivités aux opérateurs privés, pour y inclure des clauses ambitieuses sur la valorisation des déchets. Au-delà des infrastructures, le Conseil met en lumière le rôle crucial des comportements et des mentalités. Sans tri à la source, la valorisation reste coûteuse et peu efficace.

Le CESE plaide pour une sensibilisation accrue des citoyens et pour une éducation dès le plus jeune âge, afin d’enraciner une culture de la durabilité. Parallèlement, il propose l’adoption d’un cadre juridique adapté, notamment une loi-cadre sur l’économie circulaire et une loi anti-gaspillage, pour encourager la réutilisation et réduire l’utilisation de matériaux polluants. Ces propositions, combinées à un suivi rigoureux des progrès, offrent une vision claire pour aligner le Maroc sur les meilleures pratiques internationales et transformer les déchets en opportunités économiques et écologiques.

Ce modèle repose enfin sur la mobilisation des acteurs locaux, des entreprises aux universités, pour innover et adapter les solutions aux réalités marocaines. Grâce à une gouvernance coordonnée et à une participation citoyenne active, le Maroc peut transformer la gestion des déchets en un moteur de développement durable, au service de son avenir.

Une stratégie nationale pour des régions durables

Le Département de l’Environnement a élaboré la Stratégie nationale de réduction et de valorisation des déchets (SNRVD), qui tient compte des spécificités des 12 régions du Royaume. Chaque région bénéficie ainsi d’une cartographie précise des gisements de déchets et de leurs projections à l’horizon 2030, ouvrant la voie au développement de filières adaptées. L’objectif ? Faire des déchets une source de richesse et d’emplois pour les populations locales.

À l’horizon 2030, la SNRVD ambitionne notamment d’atteindre un taux de recyclage des déchets ménagers de 20%, de valorisation énergétique de 10%, et d’élimination contrôlée des déchets de 60%. Elle prévoit également de recycler entre 40% et 80% des déchets de filières spécifiques et de formaliser 50% des chiffonniers, offrant ainsi des opportunités économiques tout en réduisant les impacts environnementaux.

Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO



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