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Développement en Afrique. L’analyse de la DEPF

 

Selon une étude réalisée conjointement par l’Agence française de développement (AFD) et la Direction des études et prévisions financières (DEPF) sur le développement des entreprises marocaines en Afrique, la plupart des entreprises et en dépit de plusieurs problèmes, dressent un bilan généralement positif de leurs aventures africaines. Globalement, elles estiment que le climat des affaires en Afrique est favorable aux investisseurs marocains.

«Le fait de se tourner vers l’Afrique a été le résultat d’opportunités qui se sont concrétisées». C’est la réponse de plusieurs entreprises interrogées lors d’une étude réalisée conjointement par l’Agence française de développement (AFD) et la Direction des études et prévisions financières (DEPF), relevant du ministère de l’Économie et des finances marocain et qui a porté sur le développement des entreprises marocaines en Afrique. Elle a pour objectif de «mettre en relief le potentiel dont recèle l’Afrique et de cerner les stratégies déployées par les entreprises marocaines opérant dans le continent, leurs motivations et leurs modes d’implantation», note-t-on auprès des initiateurs de l’étude.

Cette dernière précise que par la suite la majorité de ces entreprises a lancé des stratégies de développement dans le continent prenant en compte l’expérience acquise. Quant aux raisons qui ont poussé ces sociétés à investir en Afrique, l’étude relève que ces dernières sont liées à la croissance économique de l’Afrique et les opportunités qui en découlent, au plus faible niveau de concurrence existant sur le continent se traduisant par des marges bénéficiaires potentielles plus importantes, et à la recherche de relais de croissance pour les entreprises ayant atteint un certain niveau de maturité sur le marché marocain.

Dans certains cas, et qui sont rares, c’est la recherche des ressources naturelles ou l’optimisation de structures de coûts qui motivent les entreprises marocaines. L’étude relève aussi que le dynamisme économique et le potentiel des marchés africains sont les premières motivations des entreprises qui comptent se développer en Afrique. Elles tablent sur la croissance démographique du continent, de l’augmentation du pouvoir d’achat des populations et de l’évolution des habitudes de consommation consécutive à l’émergence de classes moyennes. Ce n’est pas tout, puisque l’étude a fait ressortir que plusieurs entreprises estiment que «l’Afrique est un marché porteur où il est plus aisé de se développer sur le marché national». Elles estiment aussi que la concurrence sur ce continent est moins engagée qu’au Maroc. Sur ce point, l’étude rappelle que certaines activités restent peu développées dans le continent. C’est le cas, entre autres, de l’assistance, un service complémentaire de l’assurance à cause notamment du peu d’intérêt manifesté par les grands groupes internationaux de l’assurance qui ont délaissé le marché de l’assistance en Afrique.

«Par ailleurs, la moindre concurrence, dans certains secteurs, en Afrique permet de dégager des marges plus importantes. La concurrence grandissante dans le secteur des travaux publics au Maroc a ainsi poussé l’une des entreprises du panel à envisager le marché africain comme un relais de croissance. Selon celle-ci, le marché marocain est devenu particulièrement compétitif au tournant des années 2000, limitant les marges obtenues sur les projets», souligne l’étude.

Bien entendu, les entreprises marocaines, dont la taille est devenue critique, pensent à l’Afrique comme relais de croissance. Le faible coût notamment pour les entreprises de services est un facteur déterminant du choix du continent. Ces implantations ont été permises, il faut le reconnaître, par le travail en amont ou en parallèle de la diplomatie marocaine. En tout cas, c’est l’avis de plusieurs sociétés interrogées. Bien entendu, la stabilité politique figure parmi les principaux critères de sélection des pays ciblés qui comprennent aussi la proximité géographique et culturelle. Cela étant, la plupart des entreprises, lancent des études de marché avant leur implantation. «Ainsi, la Mauritanie ou encore le Sénégal sont prisés par les entreprises marocaines exportatrices en raison de leur plus grande facilité d’accès», note l’étude. En effet, un camion peut arriver en moins de 24 heures en Mauritanie, et faire la liaison Casablanca-Dakar en 35 heures. Il faut aussi rappeler que des lignes maritimes directes ont été lancées récemment et desservent plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest (Mauritanie, Sénégal, Guinée Conakry, Côte d’Ivoire, Nigéria). Toutefois, les coûts logistiques et de dédouanement sont encore très élevés par rapport à d’autres régions du monde. Ce qui ne favorise pas le développement des échanges intra-africains. Là, il faut également rappeler que le non-développement des lignes aériennes directes pénalise également les entreprises nationales. À titre d’exemple, les managers sondés disent que si l’Éthiopie, est un marché à fort potentiel, le pays reste difficile d’accès à cause de l’absence de ligne aérienne directe avec le Maroc. Ainsi, au regard des critères de choix avancés par les entreprises marocaines, l’Afrique de l’Ouest est souvent considérée comme une porte d’entrée en Afrique. De ce fait L’UEMOA est particulièrement prisée par les entreprises marocaines.

Modalités de développement
«S’agissant des modalités de développement des entreprises marocaines en Afrique, ces dernières se divisent en trois grandes catégories non mutuellement exclusives», précise l’étude. La première approche consiste à exporter des biens ou des services sans implantation locale. La seconde porte sur les partenariats et alliances sans présence directe. Et la troisième approche est l’investissement direct, par acquisition ou création de structure ex-nihilo, avec ou sans partenaire. Cela dit, dans leurs aventures africaines, la plupart des entreprises marocaines s’appuient en général sur l’autofinancement, qui est dans certains cas complété par celui extérieur. Mais là, l’étude note que pour les PME, l’accès au financement bancaire, en Afrique comme au Maroc, reste très difficile. «Les représentants du secteur bancaire, que nous avons rencontrés, soulignent que les outils de financement pour les entreprises, souhaitant se développer en Afrique, existent. Par ailleurs, les banques marocaines ont mis en place des mécanismes d’accompagnement pour leurs clients exportant ou s’implantant en Afrique (conseil, organisation de rencontres B to B, participation aux caravanes Maroc Export…). Les difficultés de financement de certains projets en Afrique sont liées aux risques inhérents à ces projets», souligne l’étude.

La gestion des risques
Sur le volet gestion des risques, il faut rappeler que ceux sécuritaires et politiques sont le quotidien africain en dépit du recul enregistré depuis plusieurs années. Ainsi, le premier risque est mis en avant par les entreprises sondées, notamment lorsqu’il concerne les ressources humaines et les installations. «Lorsque le risque est fort, celui-ci peut-être un motif de renoncement», précise l’étude. Et pour gérer ce genre de problèmes, certaines approches adoptées par les sociétés marocaines préconisent de n’intervenir dans les pays considérés comme particulièrement dangereux qu’avec des partenaires ayant des moyens de sécurité conséquents.. «Les entreprises de taille moyenne n’ont pas nécessairement les moyens financiers nécessaires pour faire appel à des sociétés privées. Elles se reposent alors parfois sur leurs partenaires locaux ou clients», ajoute l’étude. Quant au risque lié à l’instabilité politique, il est également présent notamment dans les secteurs où les principaux commanditaires sont les pouvoirs publics. C’est le cas du secteur de la construction. À ces risques s’ajoutent ceux administratifs (retards de projets imputables à des retards de procédures administratives), juridiques et fiscaux (difficulté à concrétiser des dispositions fiscales annoncées). «Ainsi, un acteur des services financiers a fait face à des redressements fiscaux dont l’issue est restée longtemps incertaine, ce qui a eu pour conséquence un manque de prévisibilité des résultats», révèle l’étude. Toutefois, ces risques peuvent être atténués à travers par l’association avec des partenaires solides capables de débloquer des situations avec les pouvoirs publics. Ils ont aussi été atténués via des diligences fiscales en amont. Et bien entendu, le risque paiement fait énormément peur aux entreprises marocaines, car il reste l’un des facteurs de non-développement du continent. Mais il faut dire qu’au Maroc ce risque existe aussi. 


Recommandations

En dépit de tous ses problèmes, les entreprises marocaines sondées à l’occasion de cette étude, dressent un bilan généralement positif de leurs aventures africaines. Globalement, elles estiment que le climat des affaires en Afrique est favorable aux investisseurs marocains. Selon l’étude, «les entreprises marocaines et notamment les PME et PMI ont toute leur place en Afrique pour apporter leur expertise et bénéficier d’une image du Maroc déjà bien établie sur place». Et pour leur permettre de mieux se positionner l’étude recommande à ces entreprises de mettre en place des chaînes de valeur régionales (CVR) porteuses. «Dans un environnement, marqué par l’éclosion de nouveaux pôles régionaux, il paraît fondamental de tirer meilleur profit de l’émergence de CVR. Grâce à ses atouts géostratégiques et ses avancées sectorielles, le Maroc s’impose en effet comme un vecteur d’intégration intracontinentale. Le Maroc est en effet un des rares pays du continent à participer à des chaînes de valeur globale dans différents secteurs industriels, tels que l’industrie automobile ou l’industrie textile…», souligne l’étude. Celle-ci préconise aussi de construire des alliances stratégiques pour faire face à la concurrence, souvent générée par les entreprises turques. «Il faut aussi mobiliser davantage les acteurs privés dans la construction de la stratégie économique marocaine en Afrique en s’appuyant bien évidemment sur les leviers publics mis en place dans cet objectif (appui à l’export, analyses marchés, couverture des risques…)», ajoute l’étude. Enfin, il est nécessaire de monter des alliances Grandes entreprises-PME, comme vecteur de l’intégration économique du Maroc en Afrique.


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