Comment l’Afrique peut tirer son épingle du jeu
Le sujet était au cœur des échanges entre experts lors de la 3e édition d’Energy Week Morocco clôturée hier à Marrakech. Quelques-unes des pistes présentées.
Est-ce que le continent africain peut relever le défi de l’électrification afin que ses 600 millions d’habitants aient enfin accès à l’électricité ? Une question qui divise quelque peu les les experts qui ont animé les panels de la 3e édition d’Energy Week Morocco, clôturée jeudi à Marrakech. Ainsi, il y a d’un côté ceux qui invoquent la période fastueuse que vit actuellement l’Afrique en termes de croissance économique et les importantes dotations factorielles dont regorge le continent et de l’autre ceux qui sont effectivement engagés dans des projets qui contribuent à changer la donne. En effet, l’Afrique connaît une période de croissance soutenue et sans précédent.
Selon la Banque mondiale, 6 des 10 pays ayant la plus forte croissance en 2018 sont africains. Il s’agit notamment du Ghana avec 8,3%, de l’Éthiopie (8,2%), de la Côte d’Ivoire (7,2%), de Djibouti (7%), du Sénégal (6,9%) et de la Tanzanie (6,8%). Ces chiffres rapportés aux 54 pays du continent montrent que les économies africaines connaissent actuellement une croissance annuelle moyenne de plus de 4%. Et selon le cabinet McKinsey, 25 des 54 pays du continent auront une croissance supérieure à 5% jusqu’en 2025. Si cette tendance se poursuit, le PIB de l’Afrique sera multiplié par 3 d’ici 2030 et par 7 d’ici 2050. Pour les autres experts qui misent sur les ressources, cette période fastueuse de croissance ne saurait perdurer sans des investissements conséquents à moyen et long termes dans l’énergie. Ces derniers sont notamment convaincus que les décideurs ont pris conscience que l’Afrique a tout intérêt à développer des solutions sobres en carbone et qu’une démarche stratégique de grande ampleur ne saurait tarder parce que le continent a un potentiel considérable en matière d’énergies propres. Un potentiel en gaz naturel, énergie hydroélectrique, solaire, éolien et géothermie encore très insuffisamment exploité. Ces derniers rejoignent quelque part ceux qui sont déjà dans le feu de l’action. En plus des nombreuses initiatives d’off grid et de mini grid lancées ça et là sur le continent par des privés et dans le cadre de la coopération internationale, le fameux projet Desert to power de la BAD a été plusieurs fois évoqué parce qu’interconnectant plusieurs pays.
En effet, ce projet grandiose auquel vient d’adhérer Masen (l’Agence marocaine de l’énergie durable) va littéralement illuminer l’Afrique en général et l’Afrique occidentale en premier lieu. Lancé par la BAD en partenariat avec l’Agence française de développement (Afd), l’Agence internationale des énergies renouvelables (Irena), le secteur privé et des partenaires techniques et financiers, ce projet vise à faciliter l’accès à l’électricité à 250 millions de personnes dans 11 pays de la zone sahélo-sahalienne, notamment le Burkina Faso, Djibouti, l’Érythrée, l’Éthiopie, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Nigéria, le Sénégal, le Soudan et le Tchad. S’agissant des moins optimistes, ils lient leur réponse affirmative à plusieurs conditions. Parmi ces conditions, on peut notamment citer en premier lieu le fait de devoir revoir à la hausse les ambitions des stratégies énergétiques de l’Afrique. Ensuite, il s’agira de renforcer les réformes en matière de gouvernance énergétique notamment aux niveaux local, national, régional et international. Enfin, il faudra supprimer les subventions aux énergies fossiles et augmenter considérablement la capacité de production d’électricité en favorisant l’électrification à partir de solutions mini-grid et off-grid.