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Bourse : les arbres montent-ils jusqu’au ciel ?

Dans un marché qui semble céder à l’euphorie, l’indice vedette continue de gravir les sommets en franchissant à la hausse la barre des 18.800 points. Derrière cet emballement, certains analystes appellent à la prudence et n’excluent pas le risque d’un retournement brutal avec un Price Earnings Ratio (PER) qui frôle les 23, à quelques encablures de son pic historique.

Le MASI tutoie les sommets porté par un regain d’optimisme. Après une période de doute lié à l’annonce des tarrifs Trump, le marché fleurit avec un niveau de valorisation rarement atteint. Au cours de la séance du jeudi 6 juin, l’indice phare a franchi le pallier des 18.800 points, avant de terminer la séance sur une note solide, à plus de 18.600 points. Ce plus haut annuel vient consolider un mouvement haussier amorcé depuis le début de l’année, ce qui porte la performance annuelle à 26,52%.

Sur le plan technique, plusieurs analyses font état d’un potentiel haussier intact. Les projections chartistes évoquent pour cibles les seuils de 19.000, voire 20.000 points à moyen terme. Une perspective confirmée par une note de BMCE Capital Global Research, selon laquelle l’indice pourrait tester les 18.300 à 18.400 points à court terme avant de prolonger son rallye vers les 20.000 points. Ceci dit, le repli du RSI, indicateur technique scruté de près par les analyses, suggère un possible ralentissement de la dynamique haussière.

À l’approche des sommets historiques, cette perte de souffle pourrait ouvrir la voie à une consolidation plus marquée, font valoir certains spécialistes.

Signal confiance
Dans ce contexte, plusieurs valeurs vedettes continuent de jouer un rôle moteur. TGCC figure parmi les locomotives de cette reprise. L’annonce récente d’une augmentation de capital destinée à refinancer le closing de l’acquisition de 60% de STAM a ravivé l’intérêt des investisseurs.

Le marché perçoit cette opération comme un signal de confiance dans la capacité du groupe à consolider sa position sur le segment du BTP, au moment même où l’on anticipe d’autres introductions potentielles sur le marché. Plus globalement, la hausse reste portée par des valeurs industrielles bien ancrées, notamment dans les secteurs de la chimie et de l’agroalimentaire, soutenues par des fondamentaux solides et des carnets de commandes fournis.

Côté bancaire, les grandes capitalisations affichent une certaine résilience, même si la contribution sectorielle reste en retrait par rapport aux valeurs industrielles à plus forte volatilité. Le marché demeure ainsi fortement polarisé, avec une rotation sectorielle observable au sein des portefeuilles orientés mid-cap. Du côté de la construction et des industries manufacturières, les voyants sont au vert.

Les derniers indicateurs de conjoncture publiés par le HCP font état, pour le premier trimestre 2025, d’une progression modérée de l’activité dans le bâtiment, portée par le génie civil et les travaux spécialisés, tandis que le segment résidentiel demeure globalement stable.

Pour le deuxième trimestre, les anticipations tablent sur une poursuite de cette dynamique haussière, portée par les commandes publiques et la montée en puissance des chantiers structurants. Dans l’industrie manufacturière, les chefs d’entreprise anticipent une amélioration de leur activité, notamment dans les branches de l’automobile, de la chimie et de l’agroalimentaire.

Le taux d’utilisation des capacités de production s’établit autour de 74 %, tandis que les difficultés d’approvisionnement en matières premières, bien qu’encore présentes, tendent à se résorber. Seules l’industrie extractive et l’énergie restent à la traîne, affichant respectivement un recul des volumes et une baisse des prix de vente. Derrière l’élan haussier, la lecture fondamentale appelle à davantage de nuance. En effet, la progression de l’indice semble moins refléter une amélioration des fondamentaux qu’un basculement du sentiment de marché, résolument orienté à la hausse.

«Les investisseurs, en particulier les petits porteurs, reviennent sur le marché avec confiance, portés par des résultats trimestriels jugés rassurants et une série d’annonces concrètes», estime un analyste de marché.

Cette nouvelle donne marque un tournant. La place boursière, longtemps dominée par les institutionnels, est désormais animée par des mouvements impulsifs, ce qui se reflète sur les fluctuations du marché.

«La psychologie des petits porteurs agit comme un catalyseur. Ils pèsent près de 30 % des volumes échangés, et réagissent au quart de tour à chaque signal perçu comme favorable», note un expert qui appelle toutefois à une certaine prudence.

La vigilance est de mise
Car sous l’euphorie apparente, le marché s’approche d’une zone de surchauffe. Le niveau actuel du Price Earnings Ratio (PER) frôle les 23, contre un record historique de 24 observé hors contexte pandémique.

«Si l’on raisonne sur l’année 2025 seule, le momentum est bon, certes, mais il intègre des anticipations élevées. En cas de déception sur les résultats, le PER pourrait rapidement grimper à 27 ou 28, synonyme de risque de correction brutale», avertit l’expert qui préfère parler de zone grise plutôt que de bulle tant les projections à l’horizon 2030 restent porteuses.

Pour l’heure, le marché semble vouloir capitaliser sur cette phase d’expansion, soutenu par des perspectives de croissance des bénéfices et un environnement économique plus lisible. Mais la vigilance reste de mise.

«Rien n’empêche le MASI d’aller au-delà des 20.000 points. Mais plus le seuil est élevé, plus l’écart entre les attentes et les résultats devra être maîtrisé», conclut-il.

Car sur des niveaux aussi tendus, ce n’est plus la tendance qui guide le marché, mais la capacité des résultats à justifier les valorisations.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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