Santé publique : entre 2019 et 2021, l’espérance de vie mondiale a reculé de 1,8 an à cause de la covid-19

Selon le rapport 2025 sur les statistiques sanitaires mondiales publié par l’Organisation mondiale de la santé, la pandémie a provoqué la plus forte chute d’espérance de vie jamais enregistrée dans l’histoire récente. Un appel est lancé aux États pour redresser la trajectoire sanitaire mondiale.
En à peine deux ans, entre 2019 et 2021, la pandémie de covid-19 a bouleversé la dynamique des systèmes de santé à l’échelle planétaire. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) tire la sonnette d’alarme dans son dernier rapport, publié ce mois de mai, en relevant que l’espérance de vie mondiale a reculé de 1,8 an – une chute inédite qui efface dix ans d’avancées.
Une régression historique de l’espérance de vie
La covid-19 n’a pas seulement aggravé la mortalité : elle a également détérioré la qualité de vie. L’OMS souligne que l’augmentation des troubles psychiques, notamment de l’anxiété et de la dépression, a entraîné une perte globale de six semaines d’espérance de vie en bonne santé. Ces impacts combinés annulent les progrès jusque-là obtenus grâce à la réduction des décès causés par les maladies non transmissibles (MNT).
Le rapport 2025 met en lumière les effets du choc sanitaire mais aussi une tendance structurelle : le ralentissement des progrès en matière de santé mondiale avait en réalité débuté avant 2020, et se poursuit encore aujourd’hui.
Le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, insiste : «Derrière chaque donnée se cache un être humain», rappelant que les décès évitables traduisent des défaillances persistantes en matière d’accès, de protection et d’investissement.
Des résultats en demi-teinte
Le rapport évalue l’avancée vers les trois grands objectifs stratégiques de l’OMS à horizon 2025 : garantir une meilleure santé à un milliard de personnes supplémentaires, renforcer la couverture des services essentiels pour un autre milliard, et protéger un milliard de personnes face aux urgences sanitaires. Seul le premier objectif semble atteint, avec 1,4 milliard de personnes en meilleure santé en 2024.
Cette progression est attribuée à la baisse du tabagisme, à l’amélioration de la qualité de l’air et à un meilleur accès à l’eau et à l’assainissement. En revanche, les deux autres cibles sont loin d’être atteintes : seulement 431 millions de personnes supplémentaires ont accédé sans obstacle financier à des soins de base, et 637 millions ont été mieux protégées face aux crises sanitaires.
Mortalité maternelle et infantile : l’inquiétante stagnation
Malgré deux décennies de progrès – la mortalité maternelle a chuté de plus de 40% entre 2000 et 2023, celle des enfants de moins de cinq ans de plus de moitié – la dynamique est désormais enrayée. La lenteur des progrès met en péril des millions de vies. En l’absence de mesures urgentes, l’OMS estime que 700.000 décès maternels et 8 millions de décès d’enfants pourraient encore survenir d’ici à 2030. Parmi les causes identifiées : des investissements insuffisants dans les soins de santé primaires, la pénurie de personnels qualifiés, et des services essentiels tels que la vaccination ou l’accouchement sécurisé, toujours hors de portée dans de nombreux pays.
Les MNT en hausse, malgré quelques avancées
La croissance démographique et le vieillissement alimentent l’augmentation des décès prématurés liés aux maladies non transmissibles (MNT) – cardiopathies, AVC, diabète, cancers – qui représentent désormais la majorité des décès chez les moins de 70 ans. Cette tendance pourrait compromettre durablement les équilibres sanitaires mondiaux.
Dans un registre plus positif, le rapport note que les taux d’infection au VIH et à la tuberculose sont en baisse, et que le nombre de personnes nécessitant un traitement pour des maladies tropicales négligées diminue. Toutefois, des menaces persistent : le paludisme connaît une résurgence depuis 2015, et la résistance aux antimicrobiens reste une urgence mondiale.
Sami Nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO