Éco-Business

Fatim-Zahra Ammor : “2023 doit être l’année du tournant pour le tourisme”

Fatim-Zahra Ammor
Ministre du Tourisme, de l’artisanat et de l’économie sociale et solidaire

Dans cet entretien, Fatim-Zahra Ammor dévoile ses ambitions pour le secteur touristique, en s’appuyant sur la feuille de route stratégique de son ministère, visant à doubler le nombre de touristes à l’horizon 2030. 

En se référant aux différents indicateurs, le tourisme est sur le point de retrouver son niveau d’avant Covid-19. Quelle lecture faites-vous des perspectives en la matière ?
Aujourd’hui, nous sommes heureux de constater les résultats de tous les efforts menés en commun, à commencer par la mise en œuvre du plan d’urgence. À fin novembre 2022, nous avons pu récupérer 81% de nos arrivées touristiques malgré la fermeture des frontières pendant les cinq premières semaines de l’année. Si l’on se place à périmètre constant, c’est à dire depuis l’ouverture des frontières à fin novembre, nous sommes sur l’équivalent de 91% de reprise en termes d’arrivées aux frontières, et 120% en termes de recettes, ce qui est extrêmement encourageant quant aux perspectives de notre secteur. Par ailleurs, nous ne pouvons parler de 2022 sans mentionner l’incroyable promotion dont a bénéficié la «destination Maroc» grâce à l’exploit historique des Lions de l’Atlas lors de la Coupe du monde au Qatar. Aujourd’hui, les recherches sur le Maroc et les intentions de visites sont telles que nous ne ménagerons aucun effort pour convertir cet élan planétaire en arrivées touristiques concrètes sur le court, moyen et long terme. Pour vous donner quelques chiffres, le Royaume a été mentionné, depuis le début de la compétition, 17 millions de fois sur les réseaux sociaux, comparé à 500.000 mentions en moyenne sur une année normale.

Qu’en est-il de 2023 ?
Pour l’année 2023, tous les facteurs clés de succès sont réunis pour nous permettre d’atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes déjà fixés. La feuille de route stratégique que nous nous apprêtons à lancer – et qui englobe l’ensemble des leviers de compétitivité – nous permettra d’atteindre notre vision qui est de doubler nos arrivées à l’horizon 2030. Parallèlement, il s’agit non seulement du momentum touristique inédit et de la notoriété de notre destination qui n’est plus à démontrer – et qui se cristallise par de fortes intentions de visiter le Royaume – mais aussi, des potentialités touristiques dont regorge la «destination Maroc».

Le Royaume table sur la captation progressive de 17 millions de touristes à l’horizon 2026 et de 26 millions d’ici 2030. Comment comptez-vous y arriver ?
Notre pays dispose de nombreux atouts pouvant le hisser parmi les premières destinations mondiales. C’est pourquoi nous croyons en notre vision ambitieuse de doubler le nombre de touristes à l’horizon 2030. Ceci implique, comme vous l’avez mentionné, d’être à des arrivées intermédiaires de 17 millions de touristes en 2026. Pour cela, nous avons travaillé sur une feuille de route stratégique du secteur – préparée en concertation avec les professionnels- qui définit l’ensemble des leviers de compétitivité à même de transformer notre secteur, d’améliorer son attractivité et d’augmenter le nombre d’arrivées aux frontières. Parmi ces leviers de compétitivité, le focus sera principalement mis sur le renforcement de l’aérien, à travers l’augmentation de la capacité, et la multiplication des vols point à point, ainsi que la restructuration de l’offre touristique autour des filières touristiques. Nous travaillerons également sur la stimulation de l’investissement public/privé pour le renforcement de la capacité hôtelière et la création d’une nouvelle offre d’animation. Enfin, la promotion sera orientée vers les produits touristiques et les potentialités territoriales tout en exploitant davantage le canal digital.

Après le plan d’urgence, quels seront vos chantiers prioritaires pour l’année 2023 ?
Maintenant que le secteur a récupéré ses niveaux d’avant la pandémie, nous voulons que 2023 marque un vrai tournant pour le tourisme marocain. Notre priorité sera donc d’accélérer le développement du secteur en agissant sur tous les leviers importants dont, prioritairement, le bon déploiement de la feuille de route, en garantissant toutes ses conditions de réussite.

Le produit touristique constitue un impératif pour atteindre les objectifs escomptés. Est-ce que la capacité litière actuelle est en mesure d’accompagner les flux prévus ?
Il est clair que l’offre hôtelière est un maillon très important dans la chaîne de valeur, et c’est la raison pour laquelle nous avons dédié 1 MMDH du plan d’urgence à la mise à niveau des établissements d’hébergement touristiques classés. Cela dit, l’enjeu sur la capacité hôtelière est double. Il faut, d’une part améliorer le taux d’occupation moyen actuel pour rentabiliser la capacité existante, c’est à dire atteindre un minimum de 60% de taux d’occupation ; et d’autre part, développer la capacité hôtelière pour accueillir les arrivées massives que nous prévoyons sur les prochaines années. Ainsi, dans le cadre de la feuille de route, nous avons prévu un dispositif global de mise à niveau du parc hôtelier existant, combiné à des mesures incitatives visant à attirer de nouveaux investissements hôteliers privés.

Parallèlement à la question du produit, l’investissement touristique et l’aérien revêtent une importance cruciale. Comment votre Département compte consolider ces deux volets avec l’appui des autres partenaires ?
L’aérien et l’investissement touristique figurent évidemment parmi nos axes prioritaires. Dans le cadre du plan de relance 2022, l’aérien a fait l’objet d’un renforcement important, garantissant ainsi un nombre important de sièges avec les principales compagnies aériennes et Tour-opérateurs. Notre pays a ainsi pu sécuriser à date 7,2 millions de sièges grâce à l’offensive menée par l’ONMT. D’ailleurs, la programmation du Maroc dans les voyages a dépassé celle de 2019 grâce aux nombreux partenariats établis avec les compagnies aériennes régulières et low-cost. L’année 2023 connaîtra aussi le renforcement de la connectivité pour les différentes régions, l’augmentation de la capacité aérienne pour les marchés traditionnels et la création de nouvelles liaisons avec les nouveaux marchés émergents. Par rapport à l’investissement touristique, l’animation et les services sont deux leviers prioritaires, à côté de la capacité hôtelière. Nous avons, de ce fait, orienté nos efforts vers la stimulation d’investissements privés qui vont enrichir notre offre d’animation et de services. Un dispositif global a été pensé dans le cadre de la nouvelle feuille de route, dont une banque de projets dédiée à l’animation, et un accompagnement end-to-end que nous détaillerons prochainement. Pour accélérer tous ces chantiers, notre ministère joue un rôle fédérateur pour mobiliser les efforts et ressources nécessaires auprès de l’ensemble de nos partenaires institutionnels et privés.

À votre avis, quels sont les gisements touristiques encore inexploités qui peuvent apporter des opportunités de développement à l’offre Maroc ?
La «destination Maroc» est unique avec un potentiel touristique extraordinaire et une transversalité frappante sur toutes les filières touristiques qui existent : le balnéaire, la culture, le city break, le désert, le MICE,… La nouvelle ingénierie de l’offre repose sur un changement de paradigme en passant d’une logique de «destination» pure à une logique de filière touristique, ou «d’expérience» pour parler plus simplement. Nous avons identifié plusieurs filières touristiques thématiques, qui vont valoriser chacune des expériences à vivre, et qui nous permettront de mieux répondre à la demande touristique internationale et nationale, tout en valorisant et exploitant les potentialités que recèle notre pays. Par ailleurs, nous sommes sûrs que la «destination Maroc» connaîtra une demande plus importante et plus élargie grâce à l’exposition planétaire qu’elle a connue pendant la Coupe du monde. Nous avons constaté, selon nos analyses, l’émergence de plusieurs nouveaux marchés potentiels qui créeront des opportunités de développement inédites aux côtés de nos marchés émetteurs traditionnels.

Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO



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