Eau potable dessalée: l’extension du réseau de transfert, un défi à Souss-Massa
Neuf mois après le démarrage de la livraison d’eau dessalée à la RAMSA, qui en assure la distribution aux communes du Grand Agadir, le prochain défi de l’ONEE sera celui du renforcement de la sécurisation de l’alimentation en eau potable en faveur des communes éloignées. Aujourd’hui, les retenues de barrages et ressources souterraines arrivent à épuisement.
Si le bassin d’Oum Er Rbia enregistre le taux de remplissage national le plus faible (6,8%), les retenues d’eau stockées dans les principaux barrages de la Région Souss-Massa affichent à peu près le double (12% de taux de remplissage). Un niveau, toutefois, pas suffisant pour lever la pression aussi bien sur les ressources en eau souterraines que sur l’approvisionnement en eau potable et d’irrigation.
Dans ce sens, le prochain défi sera celui du renforcement de la sécurisation de l’alimentation en eau potable dessalée à travers les infrastructures de transfert d’eau. Un transfert qui profitera aux 12 communes du Grand Agadir ainsi qu’aux collectivités situées dans les zones éloignées du périmètre de l’unité mutualisée de dessalement d’eau de mer, implantée à Chtouta Ait Baha, dans les environs d’Agadir. Réceptionnée sur le plan industriel en septembre 2021, l’unité mutualisée de dessalement d’eau de mer a démarré, le 29 janvier 2022, ses livraisons d’eau potable à la Régie autonome multi-services d’Agadir (RAMSA).
Pour rappel, c’est l’ONEE qui est l’acheteur de l’eau dessalée livrée à la RAMSA, en vertu de la convention de gestion déléguée d’eau potable et du cahier des charges conclue entre lui et son concessionnaire privé (la Société d’eau dessalée d’Agadir-SEDA) composée d’Abengoa et InfraMaroc (filiale de la CDG). D’une durée de 30 ans, cette convention comporte une phase de réalisation des travaux, déjà achevée, et une phase d’exploitation qui est actuellement en cours. Sur le plan technique, la société SEDA est rémunérée par une redevance sur l’eau potable dessalée recouvrée auprès de l’ONEE.
Les ressources conventionnelles arrivent à épuisement
Cette réalisation majeure, qui a permis de sécuriser l’alimentation en eau potable des quartiers du Grand Agadir, intervient suite à l’accomplissement, en juin 2022, de l’ensemble des tests contractuels marquant la déclaration de l’exploitation commerciale de l’usine. À noter que la capacité de cette dernière sera portée à terme à 400.000 m3/jour, répartis à parts égales entre les besoins en eau potable et eau d’irrigation. D’un coût global de 2,7 MMDH pour sa composante eau potable, l’unité de dessalement bénéficie à une population d’environ 1,6 million d’habitants dont les besoins en eau conventionnelles sont actuellement assurés par la nappe phréatique du Souss et par traitement des eaux régularisées des barrages Abdelmoumen et Moulay Abdellah, à hauteur de 198.000 m3/jour. Cependant, ces ressources arrivent à épuisement et sont vulnérables aux aléas climatiques. Quant aux deux barrages précités, ils ne sont remplis, respectivement, qu’à hauteur de 2,46% et 13%, en se référant à la situation journalière du 14 octobre 2022. L’objectif recherché par la mise en exploitation de cette unité de dessalement est également d’éviter le risque d’intrusion marine tout en permettant l’irrigation de la zone de Chtouka et en soulageant la nappe de la région, actuellement surexploitée.
Transfert d’eau dessalée : un linéaire de 44 km entre Agadir et Chtouka
Il faut préciser que le transfert des eaux produites par la station de dessalement est assuré moyennant une conduite de transport d’eau potable, réalisée par l’ONEE, depuis la sortie de la station jusqu’à l’entrée de la ville d’Agadir, sur un linéaire de 44 km. Dans le cadre du renforcement et de la sécurisation de l’alimentation en eau potable du Grand Agadir, la RAMSA a déjà prévu de réaliser une infrastructure de transfert des eaux dessalées alimentant actuellement le complexe Tassila jusqu’aux réservoirs de la zone nord d’Agadir (complexe Bouargane). Le projet consiste en la réalisation d’une conduite d’adduction qui reliera la station de pompage située au complexe de Tassila à celui de Bouargane ainsi que l’extension et le renforcement de ladite station. L’objectif étant de sécuriser l’alimentation en eau potable du Grand Agadir dans le court, moyen et long terme. À noter que la qualité d’eau à la sortie de l’unité de dessalement, répond selon l’ONEE, à la norme marocaine relative à la qualité des eaux à usage alimentaire (NM 03.7.001) et aux seuils de qualité contractuels garantis pour les eaux produites, tel que stipulé dans la convention de gestion déléguée.
Un système de captage d’eau de mer via deux émissaires
Fruit d’un Partenariat public-privé (PPP) entre le ministère de l’Agriculture et l’ONEE avec les deux filiales du groupe espagnol Abdengao (Aman El Baraka et la Société d’eau dessalée d’Agadir), la station de dessalement dont les travaux ont démarré en 2018 dispose d’une capacité de 275.000 m3/jour. 150.000 m3/jour sont destinés à l’alimentation en eau potable du grand Agadir et 125.000 m3/jour à l’eau d’irrigation de la plaine de Chtouka. Cette unité emploie aussi des technologies de dernière génération garantissant un coût de production d’eau optimisé. Ce projet inclut des équipements connexes pour un coût de près de 600 MDH, réalisés par l’ONEE via un financement contracté auprès de la Banque islamique de développement (BID). Lesdits équipements sont constitués d’une alimentation en électricité par un réseau de trois lignes Haute tension sur un linéaire de 55 km, à partir du poste source de Tiznit, d’une puissance de 68 MVA à terme.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO