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Croissance : faut-il encore compter sur la demande intérieure ?

Au quatrième trimestre 2021, les dépenses de consommation finale des ménages avaient augmenté de 5,1%, participant pour +3,2 points à la croissance économique. La consommation finale des administrations publiques avait également progressé de 5,2%, contribuant pour +1 point à la croissance économique, ainsi que la Formation brute de capital fixe de 8,1%. Cette année, la demande intérieure subit les retombées de la sécheresse et le renforcement des pressions inflationnistes, ce qui installe un sérieux doute sur sa relance.

Est-ce qu’il est encore possible de compter sur une contribution de la demande intérieure dans la croissance économique de cette année ? La question est en suspens, compte tenu du contexte économique très particulier qui prévaut cette année. En effet, si les différentes composantes de cet indicateur économique s’étaient toutes inscrites à la hausse au quatrième trimestre de l’année dernière, il n’en est pas de même depuis le début de l’année.

Dans un contexte de baisse des revenus agricoles et d’intensification des pressions inflationnistes accentuées par le déclenchement de la guerre en Ukraine, la demande intérieure aurait connu une sensible décélération par rapport à l’année précédente, mais serait restée le principal support de l’activité économique, a notamment informé le Haut-commissariat au plan (HCP) dans sa note de conjoncture n°40 d’avril 2022.

Selon l’équipe d’Ahmed Lahlimi, ce ralentissement aurait résulté de la diminution du rythme de croissance de la consommation des ménages et de l’investissement.

L’équipe du HCP optimiste
La consommation des administrations publiques aurait, pour sa part, conservé presque le même rythme de croissance du trimestre précédent, en ligne avec le renforcement des dépenses de fonctionnement. Subissant les retombées de la sécheresse sur les revenus agricoles et le renforcement des pressions inflationnistes, la consommation des ménages aurait ainsi ralentie, en affichant une augmentation de 0,8%, au lieu de 5,1% un trimestre plus tôt.
La consommation des administrations publiques aurait, pour sa part, progressé de 5,3%, au lieu de 5,2% un trimestre plus tôt, en ligne avec l’accroissement des dépenses de fonctionnement. Alors que la formation brute de capital fixe (FBCF) aurait augmenté de 2,9 % au premier trimestre 2022, par rapport à l’année précédente, au lieu de 13% un trimestre plus tôt, dans un contexte de modération des investissements en construction.
Pour le second trimestre, le HCP s’attend à un léger renforcement de la demande intérieure, par rapport au premier trimestre, grâce à la poursuite de la hausse des dépenses publiques qui devrait situer la consommation publique à 5,4%.
Les dépenses des ménages devraient elles progresser de 1,8%, en variation annuelle ; tandis que l’investissement brut devrait, pour sa part, légèrement progresser par rapport au trimestre précédent avec une hausse de 3,3 %, en variation annuelle, tiré par la bonne orientation de l’investissement en produits industriels et de BTP.
Les centrales syndicales pessimistes
Bref, les centrales syndicales ne partagent pas ces prévisions optimistes du HCP. Au contraire, ils pensent que les tensions inflationnistes et les hausses de prix, qui en découlent et qui sont déjà perceptibles au niveau du panier de la ménagère marocaine, vont encore persister au moins jusqu’à la fin de l’année. En tout cas, l’indice des prix à la consommation n’a cessé d’augmenter depuis le début de l’année.
Entre janvier et mars, il a triplé. Cette forte variation est le résultat de la hausse de 3,8% de l’indice des produits alimentaires et de 0,5% de l’indice des produits non alimentaires. L’indice des produits alimentaires a presque quadruplé entre février et mars, puisqu’il n’a connu qu’une évolution de 1,0% lors du second mois de l’année par rapport à janvier, mois durant lequel il a reculé de 0,1% par rapport à décembre 2021.
Cette augmentation fulgurante et spontanée des prix des produits alimentaires, observée entre février et mars 2022, a été surtout ressentie au niveau des «Légumes» dont les prix ont grimpé de 13,8%, les «Poissons et fruits de mer» (6,2%), les «Fruits» (5,2%), les «Viandes» (3,5%), le «Lait, fromage et œufs» (2,1%), le «Pain et céréales» (1,9%) et les «Huiles et graisses» (1,2%).
Seuls les prix des «Eaux minérales, boissons rafraichissantes, jus de fruits et de légumes» ont connu une baisse notamment de 0,2%.

Du côté des produits non alimentaires, la hausse de l’IPC a été principalement entraînée par la hausse de prix des «Carburants» qui ont bondi de 8,0%, poussant l’État à subventionner les transporteurs routiers à hauteur d’environ 2 milliards de DH pour leur permettre de continuer leur service. Ce qui n’a pas empêché une hausse du prix du «Transport» qui a également progressé de 2,1%.

Tenant compte de tous ces facteurs, les centrales syndicales sont persuadés que la baisse du pouvoir d’achat, qui affecte actuellement de nombreux ménages, n’est pas prête de s’estomper rapidement. C’est pourquoi elles demandent au gouvernement de procéder à une augmentation générale des salaires au plus vite. Une hausse d’au moins 10%, à laquelle il faudrait adjoindre une baisse de l’IR (Impôt sur le revenu) ainsi qu’une unification du salaire minimum entre les secteurs primaire et secondaire.

Ces propositions sont actuellement sur la table du Chef du gouvernement qui devrait, en principe, faire connaître son offre avant le 1er mai, c’est à dire dimanche prochain (Cf. Les Inspirations Éco n°3087 du 26 avril).

Aziz Diouf / Les Inspirations ÉCO



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