Financement collaboratif : le “crowdfunding” a un bel avenir au Maroc
Le financement collaboratif, connu à l’international sous le nom de «crowdfunding» est à la mode au Maroc. Si le potentiel de ce mode de financement de projets est encore sous-exploité, il n’en constitue pas moins un outil de financement prometteur pour les entreprises, auto-entrepreneurs et organisations de la société civile au Maroc.
La startup Agenz, premier site d’estimation immobilière en ligne au Maroc, a récemment levé la somme de 5 millions de DH auprès du fonds public privé d’amorçage. Dans la même foulée de fin d’année, de passage à l’émission «Qui veut investir dans mon projet ?», de la chaîne 2M, la startup Entomonutris, œuvrant dans l’élevage d’insectes, a réalisé la plus grande levée de fonds dans l’histoire de ce rendez-vous, initié par l’opérateur inwi.
On pourrait citer d’autres exemples de levées de fonds au Maroc car le financement participatif est un outil de collecte de fonds qui est devenu à la mode. Fonctionnant sur une plateforme Internet, il permet à un ensemble de contributeurs de choisir collectivement de financer directement, et de manière traçable, des projets identifiés. Toutefois, si ce constat est largement partagé, il faut noter que les pays africains, Maroc inclus, constituent encore le parent pauvre du crowdfunding au niveau mondial.
En 2020, le montant global collecté par ce biais a atteint 34 milliards de dollars. Ce montant est, cependant, très inégalement réparti, l’Amérique du Nord concentrant 50% des fonds levés lorsque le continent africain n’en représente que 0,07%. Seulement, pour Omar Agodim, Head of Experimentation au sein de l’unité de l’Accelerator Lab du PNUD Maroc, le potentiel très faiblement exploité de ce mode de financement représente, aujourd’hui, une énorme opportunité pour les auto-entrepreneurs, startups et associations du Royaume. C’est d’autant plus vrai que le Maroc a rejoint la liste des pays qui ont décidé d’encadrer le crowdfunding par un texte juridique.
En effet, le Parlement a adopté, en février 2021, le projet de loi n°15-18 relatif au financement participatif, lequel est venu à point nommé et devrait permettre de voir l’écosystème du crowdfunding se développer avec, notamment, la création des premières Plateformes de financement collaboratif (PFC). À cela s’ajoutent la définition du dispositif d’agrément des Sociétés de financement collaboratif (SFC), ainsi que celle des procédures et modalités de création et de fonctionnement des PFC et des engagements et obligations en matière d’information du public, de publicité et de reporting.
Ces mesures, visant à réglementer le financement participatif au Maroc, sont venues se greffer à un effet accélérateur, en l’occurrence la crise liée au covid-19. En d’autres termes, la pandémie a fait évoluer le comportement du consommateur marocain vis-à-vis des achats en ligne, permettant un fort développement du e-commerce alors que, jusqu’ici, le scepticisme concernant l’acceptation de faire des dons sur des plateformes en ligne, était dominant.
En effet, depuis le début de la crise, les habitudes des Marocains, en matière de paiement en ligne, ont considérablement évolué comme partout dans le monde, d’ailleurs. Rien qu’en 2020, l’e-commerce a ainsi représenté 13,4% du total du commerce au détail en 2020, contre 9,8% en 2019, générant 1,8 milliard de transactions, en hausse annuelle de 5,8%. Toutefois, relativise Omar Agodim, le crowdfunding nécessite d’être vulgarisé auprès des organisations de la société civile (OSC) comme outil novateur pour la mobilisation de fonds. C’est dans cette logique que l’Accelerator Lab Morocco a eu l’idée d’expérimenter le financement participatif en déployant «Tadamon Crowdfunding Academy», un programme de formation interactif qui permet aux OSC d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour préparer et mener à bien une campagne de crowdfunding.
«Cette initiative doit permettre, en premier lieu, d’aider les OSC à lever des fonds pour leurs projets mais aussi de permettre au PNUD Maroc de tester la capacité du crowdfunding à devenir un outil de collecte de fonds efficace et populaire, pour les OSC et plus largement, pour les startups et PME au Maroc. Dans cette continuité, l’expérimentation menée par le PNUD Maroc vise à évaluer la capacité du crowdfunding à combler le chaînon manquant de l’écosystème d’investissement local», explique le spécialiste. Pour repérer des projets d’OSC «finançables» par le crowdfunding, un appel à projets a été lancé et les projets les plus adaptés ont été sélectionnés pour participer à cette académie qui se déroule en parallèle dans 4 pays, à savoir l’Indonésie, le Liban, le Kazakhstan et le Maroc. Les différents modules d’accompagnement portent, notamment, sur la stratégie à déployer, l’objectif financier à atteindre, la mobilisation des ressources, le «storytelling» et la communication.
Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO