Mouna Mekouar : “Cette exposition est une invitation au voyage”
Le musée Yves Saint Laurent Marrakech abrite, jusqu’au 30 mai, une exposition dessinant le portrait de Bert Flint. Regroupant plus de 200 œuvres de sa collection personnelle, celle-ci a été orchestrée par Mouna Mekouar, commissaire de l’exposition. Mouna Mekouar, qui connait Bert Flint nous raconte l’histoire de cet amoureux des arts berbères et africains qui vit au Maroc depuis plus de 50 ans.
Comment avez-vous connu Bert Flint ?
J’ai connu Bert Flint grâce à Teresa Lanceta, une artiste espagnole qui m’a introduite auprès de lui, il y a plus de dix ans. Elle a, elle-même, fait une série de tapis qui s’appelle ‘’Hommage à Bert Flint’’. Grâce également au travail de la Fondation Jardin Majorelle et des liens d’amitié que la Fondation entretient avec Flint, j’ai pu mieux le connaître et collaborer avec lui sur ce projet.
Qu’est ce qui caractérise cette exposition. Quelle histoire raconte-t-elle ?
Elle caractérise le regard de Bert Flint, sa manière d’envisager les territoires, de comprendre à la fois les populations nomades et semi-nomades qui existent au Maroc. Cette exposition symbolise également importance du monde berbère au Maroc et les liens que le Maroc notamment tisse avec l’Afrique subsaharienne grâce à la collection d’objets de Flint.
Qu’est ce qui a motivé cet hommage ?
Les raisons sont nombreuses. D’abord, il y a la donation faite par Bert Flint en 2015 au Musée Pierre Bergé des arts berbères. Il y a, également, l’importance et le rôle de Bert Flint qu’il joue auprès de nombreux artistes. Je dirais aussi son intérêt pour le monde berbère qui date de son arrivée au Maroc et donc il est très important de faire connaître sa passion, son regard sur ces cultures et aussi sa lecture du Maroc qui trouve ses liens avec l’Afrique, beaucoup plus qu’avec le Moyen Orient. On espère que cette exposition contribuera à faire connaitre sa lecture du Maroc mais aussi sa lecture des liens que le Maroc tisse avec l’Afrique mais aussi toute sa connaissance et son savoir sur ces populations et les objets qu’il a lui-même collectionné.
Les objets exposés sont-ils destinés à la vente ?
C’est un musée et comme dans tout musée, rien n’est destiné à la vente. C’est une exposition faite à partir de sa collection personnelle. Bert Flint a son propre musée dont il a fait don à l’université de Marrakech parce qu’il souhaite que les étudiants de l’université de Marrakech puissent s’instruire et découvrir leur propre culture.
Est-ce que vous pensez que ce genre de thèmes intéresse le public marocain?
Je pense qu’à cause de la pandémie de la Covid-19, les gens viennent moins mais qu’au Maroc actuellement cette exposition plait énormément. Je pense que ceux qui connaissaient Bert Flint sont très heureux de voir ces objets et ceux qui ne le connaissaient pas découvrent à la fois le personnage mais aussi certains aspects de certaines cultures et populations qu’ils ne connaissaient pas. Et c’est une manière aussi de pouvoir appréhender, sur l’espace d’exposition, plusieurs territoires en même temps et de comprendre les similitudes et les analogies qui existent entre l’Atlas et le Sahara, entre le Sahara et le Sahel, entre le Sahel et la Mauritanie. Cette exposition est aussi une invitation au voyage et à la découverte.
Combien de temps l’organisation de cette exposition a-t-elle pris et avez-vous eu des difficultés particulières?
Cela nous a pris à peu près un an. C’est en général le temps nécessaire pour préparer une exposition : sélectionner des objets, penser au parcours, définir et construire la scénographie, préparer les documents qui accompagnent l’exposition. Dans ce cas précis, l’ouverture de l’exposition avait été prévue en avril 2020. En raison du confinement, elle a finalement été fixée au mois d’octobre lorsque le musée a pu être réouvert au public.
Parlant de la crise, comment les commissaires d’exposition l’ont vécue et quelles sont vont recommandations pour l’après-covid ?
Pour cette exposition par exemple nous avons fait le choix avec le musée de la laisser durer plus longtemps. Ce qui m’importe, en effet, en tant que commissaire c’est surtout l’après-Covid. Je pense qu’on devrait imaginer autrement les expositions, repenser leur durée, qu’elles soient plus courtes ou plus longues, cela dépendra. Je pense que nous devrons aussi travailler de manière plus locale et que certains formats d’exposition, qui consistaient à faire venir des œuvres de partout dans le monde pour un mois, sont amenés à disparaitre. Par ailleurs, je pense que le fait qu’il y ait eu cette phase de Covid-19 et de confinement va générer une mutualisation des énergies. Les musées sont de plus en plus solidaires et essaient de changer leurs manières de travailler.
Mariama Ndoye / Les Inspirations Éco