Viande rouge : les tensions sur les prix persistent à la veille de l’Aïd

Malgré la suspension du rituel de l’Aid, décidée pour préserver un cheptel affaibli, les tensions sur le marché de la viande rouge ne se démentent pas. Portée par des importations sous perfusion fiscale, en dépit d’un recours accru aux importations, soutenue, entre autres, par des allègements fiscaux, la filière peine à résorber ses coûts logistiques.
À l’approche de l’Aïd al-Adha, la tension habituelle sur le marché de la viande rouge se fait ressentir. Cette année, le contexte revêt une importance particulière à la lumière de la décision exceptionnelle prise par le Souverain visant à annuler le sacrifice rituel, en vue d’accélérer la reconstitution du cheptel national, durement éprouvé par le cumul de plusieurs années de sécheresse.
La flambée du prix des aliments pour bétail, conjuguée à l’épuisement des ressources hydriques, a poussé nombre d’éleveurs à vendre une partie de leurs bêtes à perte pour limiter les charges. Dans les zones pastorales et semi-arides, où l’élevage représente souvent la principale source de revenu, cette situation a profondément fragilisé le tissu productif. Un contexte économique morose, qui restreint les marges d’intervention publique et laisse les petits exploitants en première ligne.
En réponse, le gouvernement a activé des leviers d’urgence, misant sur l’importation de bovins vivants depuis l’Amérique du Sud — principalement du Brésil. Mais malgré la régularité des flux, les prix demeurent élevés. En rayon, la viande bovine s’affiche entre 75 et 88 dirhams le kilo, une tendance que le ministère du Commerce attribue en partie à des comportements spéculatifs.
Pourtant, comme le souligne un spécialiste de la filière, «la hausse des prix n’est pas que conjoncturelle, elle est aussi liée à une série de coûts incompressibles qui s’additionnent tout au long de la chaîne». L’analyse des postes de coût révèle en effet une mécanique implacable. Le prix d’achat du bétail sur pied s’élève actuellement à 46–50 dirhams le kilo. À cela s’ajoutent les coûts logistiques, d’abattage et de distribution qui, mis bout à bout, laissent peu de marge aux détaillants.
Ces derniers, notamment dans les boucheries traditionnelles, proposent le kilo autour de 80 dirhams. Mais sur certaines pièces issues de carcasses plus jeunes ou de coupes prisées — jarret, filet, côtes — les prix peuvent grimper jusqu’à 160 dirhams dans les circuits modernes. «Tout dépend du morceau», observe notre interlocuteur, qui souligne que «les marges des boucheries restent malgré tout relativement réduites».
Contraintes logistiques
En parallèle, les importations européennes, autrefois fréquentes, se sont taries. En cause, le recours à des navires de transport spécialisés, quasi indispensables pour affréter du bétail depuis la France ou l’Espagne, se heurte à une double contrainte de volumes insuffisants et d’indisponibilité de flotte, mobilisée sur d’autres marchés.
«Ces navires sont pris toute l’année, et les volumes ne permettent plus de rentabiliser les rotations vers le Maroc», explique le spécialiste.
Résultat, le bétail européen, en dépit de sa proximité géographique, devient moins compétitif que celui issu de l’Amérique du Sud. Le gouvernement, conscient des enjeux, a reconduit pour 2025 les mesures exceptionnelles prises l’an dernier, notamment l’exonération des droits de douane et de la TVA, ainsi que la prise en charge partielle des frais de transport maritime.
Ces dispositifs visent à atténuer les surcoûts générés par l’importation. Selon nos informations, un animal transporté depuis Montevideo ou Santos engendre des frais supplémentaires de l’ordre de 100 à 200 dollars (fret maritime, alimentation, soins vétérinaires, assurance… ) autant de charges intégrées au prix de revient final.
«L’importation, bien que nécessaire, demeure un palliatif coûteux», insiste un opérateur. Et d’ajouter: «Sans une véritable stratégie de soutien à l’élevage national, cette dépendance accrue à l’import continuera de fragiliser durablement la filière».
Sur le terrain, la décision royale d’annuler le sacrifice de l’Aïd est globalement respectée. Dans ce contexte, l’approche de la Fête du sacrifice se veut un test grandeur nature pour évaluer la résilience du marché et la capacité des politiques publiques à rétablir l’équilibre d’une filière stratégique. Sauf qu’en bout de chaîne le consommateur, lui, continue d’en payer le prix fort.
Volaille : La FISA écarte tout risque sanitaire lié au foyer de Newcastle détecté en février
Suite à la détection d’un foyer isolé de la maladie de Newcastle en février 2024 dans la région Rabat-Salé-Kénitra, la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole (FISA) a confirmé que la situation avait été rapidement maîtrisée conformément aux protocoles sanitaires en vigueur. Elle souligne que cette affection virale, bien que préoccupante pour les élevages, ne présente aucun danger pour la santé humaine.
Les viandes et œufs issus de la filière avicole marocaine restent donc parfaitement propres à la consommation.
La FISA appelle à la vigilance face aux rumeurs infondées circulant sur les réseaux sociaux, notamment celles évoquant un prétendu embargo chinois sur les produits avicoles marocains, rappelant qu’aucun accord commercial n’existe entre le Maroc et la Chine dans ce domaine.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO