Maroc

Stress hydrique : des débuts prometteurs ternis par une évolution défavorable

Malgré les récentes précipitations, l’angoisse persiste face à la baisse constante des débits en eau. Au cours d’une réunion marquant la Journée mondiale de l’eau, divers sujets ont été soulevés, allant des projets en cours aux budgets alloués, reflétant ainsi une prise de conscience croissante de l’urgence de la situation.

La question du stress hydrique anime toutes les discussions, en raison des inquiétudes qu’elle suscite. Si les récentes précipitations dans plusieurs régions du Royaume offrent une lueur d’espoir, l’avenir demeure incertain, sans promesse de changement garanti. Au coeur de cette problématique, les campagnes de sensibilisation s’affirment comme des leviers essentiels.

«Les campagnes de sensibilisation jouent un rôle crucial dans la gestion de la ressource en eau», a affirmé Nizar Baraka, ministre de l’Équipement et de l’Eau, lors d’une conférence à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau.

En ouverture d’un séminaire portant sur la «Gestion de la sécheresse dans un contexte de changement climatique : défis et solutions», il a souligné l’impératif d’une mobilisation collective. La persistance de la sécheresse au cours des dernières années a exacerbé le stress hydrique, alertant ainsi sur la rareté croissante de l’eau et appelant à une action concertée pour sa conservation.

De même, Nizar Baraka a mis en garde contre une détérioration potentielle de la situation à l’avenir, en raison des effets dévastateurs du changement climatique sur les ressources en eau. La sécheresse est désormais une réalité structurelle au Maroc, exigeant une coordination renforcée entre les institutions impliquées dans la gestion de l’eau et une amélioration de la gouvernance. Il a souligné l’urgence de renforcer les initiatives de sensibilisation pour encourager une utilisation responsable de l’eau et stimuler un changement de comportement en faveur de son économie.

Entre l’arrosé et le sec
Zakaria El Yaacoubi, en charge de l’irrigation au ministère de l’Agriculture, ne le cache pas : l’agriculture au Maroc navigue entre deux eaux, pluviale et irriguée. Mais quand la pluie se fait rare, c’est l’irrigué qui trinque, étant souvent relégué au dernier plan après la satisfaction des autres secteurs d’usage.

«L’agriculture pluviale, qui occupe près de 80% des terres agricoles du pays, a connu un début d’année prometteur avec des pluies encourageantes pour les agriculteurs. Malheureusement, les espoirs ont été ternis par une évolution peu favorable», indique l’intervenant.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : seulement 2,8 millions d’hectares ont été ensemencés en automne, dont 2,3 millions en céréales, soit environ la moitié de ce qui est réalisé lors d’une année normale. Face à cette situation critique, un programme a été lancé avec un budget de 10 milliards de dirhams pour atténuer les effets des conditions pluviométriques défavorables et soutenir les agriculteurs et éleveurs.

L’objectif est de préserver le patrimoine agricole et le cheptel du pays, tout en assurant un approvisionnement régulier des marchés en produits agricoles de base. Dans les zones irriguées, le constat est tout aussi préoccupant.

«Le Maroc compte trois principaux systèmes d’irrigation», explique El Yaacoubi.

Le premier concerne les grands périmètres irrigués, alimentés par les barrages. Cependant, la plupart de ces périmètres sont touchés par des restrictions hydriques, exception faite de quelques-uns sur les neuf existants. Le deuxième système concerne la petite agriculture irriguée, principalement située en altitude et alimentée par des sources. Malheureusement, les années de sécheresse ont entraîné une baisse drastique du débit de ces sources, réduisant les ressources de plus de la moitié.

Enfin, le troisième système est l’irrigation privée, principalement alimentée par les nappes souterraines. Mais, là encore, la baisse des niveaux d’eau dans ces nappes menace la pérennité de cette forme d’irrigation. Face à ces défis, des chantiers structurants sont en cours pour moderniser les infrastructures et promouvoir une gestion plus efficiente de l’eau. «L’objectif est de doubler l’efficacité hydrique et de valoriser davantage l’eau utilisée en agriculture», relève-t-il.

Le changement climatique pourrait changer la donne
Sur un autre registre, Omar Chafki, à la tête de l’Agence du bassin hydraulique du Bouregreg et de la Chaouia, a levé le voile sur un projet d’ampleur mené en partenariat avec l’Agence française de développement (AFD). Ce projet vise à anticiper les risques d’inondation et à préparer les zones à risques au sein de la vallée du Bouregreg.

De plus, des efforts sont déployés pour élaborer des modèles hydrologiques et hydrauliques au niveau d’Ezzhiliga et de Maâziz. Déjà amorcé la semaine dernière, cette initiative d’envergure prend toute sa signification dans un contexte où les défis liés au changement climatique se font de plus en plus pressants.

«Dans le contexte actuel, nous sommes témoins d’une montée en puissance des discours sur la rareté des ressources hydriques. Cependant, il est crucial de garder à l’esprit que le changement climatique pourrait tout aussi bien changer la donne dans les années à venir, laissant envisager une possible abondance», a souligné Chafki.

De son côté, Quiterie Pincent, en sa qualité de directrice Pays à l’Agence française de développement, clarifie la position de l’organisation concernant le financement des entreprises œuvrant dans le domaine de l’économie de l’eau. «L’AFD n’octroie pas de financements directs aux entreprises, mais plutôt aux programmes et projets portés par des maîtrises d’ouvrage nationales», souligne-t-elle. Toutefois, Pincent souligne que l’AFD peut financer de manière directe ou indirecte les travaux d’études liés aux projets, offrant ainsi un soutien pour l’acquisition d’informations et l’exploration des innovations.

Kenza Aziouzi / Les Inspirations ÉCO



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