Maroc

Souss-Massa : déchets agricoles, un énorme manque à gagner

Avec une production de l’ordre de 55.532 tonnes en 2018-2019 de Déchets Plastiques Agricoles (DPA), seulement 25% de ce patrimoine est capté par les opérateurs implantés dans la région alors que l’essentiel de cette quantité est acheminé en dehors de la région.

Bien que les déchets plastiques agricoles soient parmi les segments les plus simples à capter dans le cadre de l’économie circulaire, 75% de ce gisement échappe à l’économie de la région Souss-Massa. Sur la base des chiffres présentés lors de la table ronde, initiée jeudi à Agadir dans le cadre de la convention entre le ministère de l’Energie, des mines et de l’environnement et l’association Agro Technologies ( AgroTech) du Souss-Massa, autour de la valorisation des déchets plastiques agricoles dans la région, seulement 25% des Déchets plastiques agricoles (DPA) est capté par les opérateurs implantés dans la région. « En tant qu’acteurs régionaux, notre finalité est de renforcer l’investissement dans ce gisement d’économie et de revenus potentiels y compris en termes de création d’emplois et de conditions de stabilité pour les jeunes ruraux », explique Abdellah Jrid, Président de l’Agrotech. Le patrimoine régional en DPA a atteint 55.532 tonnes durant la campagne 2018-2019, soit une augmentation de l’ordre de 37,7% en comparaison avec la saison 2013-2014 qui avait recensé 40.326 tonnes.

Plaine de Chtouka: 58% des déchets
Il va sans dire que la production des DPA continuera, selon l’Agrotech, à augmenter puisque la région se caractérise au niveau de ses plaines -en particulier celle de Chtouka- par une agriculture intensive orientée vers l’export alors que les filières pratiquées se développent essentiellement en abris sous serre (maraîchage). De plus, la mise en service prévue en avril prochain de l’unité mutualisée de dessalement d’eau de mer destiné à l’eau potable et l’eau d’irrigation consolidera davantage les investissements agricoles dans la région et drainera par conséquent des volumes en DPA. Dans le détail, la région de Chtouka Ait Baha, première zone primeuriste du Royaume, concentre 58% des DPA en 2018-2019, soit 32.347 tonnes essentiellement à travers la filière des fruits et légumes, les fruits rouges, la banane et les agrumes. Elle est suivie par le périmètre notamment agrumicole de Taroudant, à hauteur de 35%, avec l’équivalent de 19.667 tonnes grâce à la filière d’agrumes, la banane et les légumes. Le reste est partagé par la préfecture d’Inzegane Ait Melloul à hauteur de 6% (3010 tonnes) et Agadir Ida Outanane qui produit 1% (588 tonnes).

L’AgroTech veut transposer ce modèle
Par typologie, les déchets régénérés par le secteur agricole sont de différentes natures. On distingue globalement deux catégories : les déchets organiques et les déchets inorganiques qui sont constitués d’emballages vides des produits phytosanitaires et de produits fertilisants, le plastique de couverture des serres, le plastique de paillage en plus de la gaine et tuyaux d’irrigation et l’armature métallique et fils de palissage. Depuis 2011, l’Association Agro Technologies (AgroTech) du Souss-Massa s’est attelée à cette question avec l’appui de ses partenaires, notamment la Conseil régional Souss-Massa, le ministère de l’Energie, des mines et de l’environnement, la Wilaya de la région Souss-Massa et la Fondation Crédit Agricole en plus de la Chambre régionale d’agriculture et les professionnels (APEFEL et FIFEL). « Le seul modèle entrepris pour la valorisation des DPA au niveau national dans la région du Souss peut être transposé dans les autres régions agricoles. Dans ce sens, nous étions déjà sollicités par la Fondation Crédit Agricole afin de dupliquer cette expérience à l’échelle nationale notamment dans le Gharb et Loukkos qui rencontrent actuellement la même problématique avec les filières de banane et fruits rouges », explique Thami Benhalima, actuel Directeur d’Agrotech.

Une unité de valorisation s’impose
Parmi les principaux freins auxquels est confronté le projet de « valorisation des déchets plastique agricole » figure la structuration de la filière des déchets plastiques agricoles dans la région, qui souffre encore de l’informel (130 collecteurs et recycleurs). Actuellement, les opérateurs structurés emploient 632 personnes tandis que l’informel génère 1.400 postes directs et 2.800 saisonniers. Grâce au travail mené par l’Agrotech et ses partenaires, la filière a été structurée et le formel a enfin repris le dessus. En chiffres, la filière est dotée de 14 sociétés de recyclage dont le plus gros de la collecte est acheminé vers Casablanca pour traitement. A cela s’ajoutent 11 coopératives contre une seule en 2017 ainsi qu’un Groupement d’intérêt économique (GIE). Aujourd’hui, le travail de structuration continue avec en ligne de mire la création d’une fédération régionale alors que la pièce maîtresse qui reste pour capter la valeur ajoutée de cette filière est la mise en place d’une unité de valorisation des DPA.

Une étude de faisabilité dans le pipe
Ce projet est dans sa phase conceptuelle avec la préparation des termes de références pour l’étude de faisabilité liée à la création de ladite unité. A cela s’ajoutent, entre autres, la création d’une base de données pour le suivi et l’évaluation de ce patrimoine régional de DPA et le renforcement des capacités du tissu existant. En vertu de la dernière convention conclue entre les partenaires institutionnels de la Région Souss-Massa dans le cadre du projet de valorisation des DPA, le ministère a mobilisé la totalité du montant fixé à 7,9 MDH. Le plan d’action avec sa planification opérationnelle pour la concrétisation de ce projet porte sur l’atteinte de 7 objectifs au cours de la période 2021-2023. Il s’agit de la continuité de la structuration de la filière, le lancement d’une étude de faisabilité pour étudier les scénarios de réalisation de l’unité de valorisation, l’équipement des unités structurées, l’intégration de la filière dans l’économie circulaire et verte en plus de la réalisation d’un système de données et le renforcement de capacités des opérateurs de la filière. 

Yassine Saber / Les Inspirations Éco



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