Secteur BTP : quand le bâtiment va, tout va !

Boosté par une relance vigoureuse, le BTP connaît une transformation majeure, accélérée par des investissements colossaux et des projets structurants. À l’origine de cette dynamique, l’impact catalyseur de la Coupe du monde 2030, qui stimule la modernisation des infrastructures, la relance immobilière et la demande en matériaux de construction.

Longtemps marqué par des cycles irréguliers, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) connaît aujourd’hui une transformation sans précédent. Depuis 2023, une dynamique nouvelle s’installe, portée par une vision stratégique ambitieuse et des investissements colossaux.

Selon le rapport de BMCE Capital global research (BKGR), la coorganisation de la Coupe du monde 2030 joue un rôle de catalyseur, accélérant la mise en œuvre de vastes projets d’infrastructures, de logements et d’équipements structurants.

Le BTP, pierre angulaire du développement économique, retrouve ainsi un rôle moteur dans la croissance nationale, avec des perspectives prometteuses à l’horizon 2030.

Infrastructures , un chantier national XXL
L’un des piliers de cette relance repose sur une modernisation sans précédent des infrastructures. D’après BKGR, un investissement de 20 milliards de dirhams (MMDH) est prévu entre 2023 et 2028 pour rénover et construire neuf stades de calibre international, capables d’accueillir entre 60.000 et 115.000 spectateurs.

Parallèlement, le pays investit massivement pour fluidifier ses réseaux de transport. En 2025, 4,1 milliards seront consacrés à la modernisation du réseau routier et autoroutier, notamment via la construction des axes Tit Mellil-Berrechid et Rabat-Casablanca Continentale, ainsi que la restructuration de plusieurs nœuds stratégiques comme ceux de Sidi Maarouf et Ain Harrouda.

D’ici 2027, 7,7 milliards seront mobilisés pour porter le réseau autoroutier à 3.000 km, contre 1.800 km actuellement, selon BKGR.Le transport aérien n’est pas en reste : 42 MMDH seront alloués d’ici 2030 pour agrandir et moderniser les aéroports de Casablanca, Rabat-Salé, Marrakech, Tanger, Agadir et Tétouan, indique la note sectorielle de BKGR.

Dans le ferroviaire, l’ONCF prévoit la création de 1.300 km de nouvelles lignes à grande vitesse et 3.800 km de lignes classiques, connectant ainsi 43 villes et 12 ports, tout en couvrant 87% de la population.

Un nouveau souffle pour le logement
L’autre levier clé de cette relance repose sur le redémarrage du secteur immobilier, porté par des politiques incitatives et une demande en forte croissance. BKGR souligne que le gouvernement a instauré un dispositif d’aides directes au logement, doté d’une enveloppe de 9,5 MMDH sur la période 2024-2028, visant à soutenir 100.000 ménages par an.

Ce programme prévoit des subventions de 100.000 Dirhams pour les logements économiques et 70.000 dirhams pour les logements de moyen standing. Cette dynamique se traduit par une forte augmentation des mises en chantier : 201.000 unités en 2022, puis 315.000 en 2023, et 176.000 dès le premier semestre 2024, soit une accélération significative, selon les données de BKGR.

Un autre élément structurant réside dans la relance du programme «Villes sans bidonvilles», avec pour objectif de reloger 120.000 ménages, dont 62.000 dans la région de Casablanca-Settat. Un premier jalon a été posé avec l’attribution de 1.893 unités à Addoha et 6.801 unités aux Résidences Dar Saada pour un projet pilote à Médiouna, précise BKGR.

Une demande en pleine explosion pour les matériaux de construction
Cette relance se traduit par une consommation accrue des matériaux de construction, reflet direct du dynamisme du BTP. En 2024, les ventes de ciment ont progressé de +9,5%, atteignant 13,7 millions de tonnes, selon BKGR.

Le segment des infrastructures a connu une explosion de +22,1%, suivi par le béton prêt à l’emploi (+20%), le préfabriqué (+11,1%) et les mortiers (+123,6%). Si le marché intérieur affiche une croissance spectaculaire, les exportations de ciment sont en net recul (-43,4% à 1,2 MT en 2024), en raison d’une baisse de la demande sur certains marchés africains.

Un secteur qui séduit les investisseurs
Ce boom du BTP se reflète également en bourse, où les entreprises du secteur affichent des performances solides. TGCC, acteur majeur du bâtiment, voit son cours progresser de +139,6% en un an, soutenu par des projets emblématiques comme le stade Al Barid à Rabat (692 MDH) et le CHU Ibn Sina à Rabat (1,6 MMDH).

Les cimentiers n’ont pas à se plaindre non plus : Ciments du Maroc, fort d’une récente acquisition stratégique (Asment de Témara), affiche un potentiel de croissance de +12,1% en bourse, tandis que LafargeHolcim Maroc se positionne en leader avec un objectif de 2.388 Dirhams par action (+20%), selon les analyses de BKGR.

Par ailleurs, la société Sonasid, acteur majeur de la sidérurgie, anticipe une forte hausse de ses ventes, portée par les besoins en acier pour les grands chantiers du Royaume. Avec un objectif de cours de 1.596 DH (+22,8%), l’entreprise bénéficie de la montée en puissance des projets d’infrastructures et de la relance immobilière.

Des perspectives durables
Avec ces investissements massifs, le secteur du BTP entre dans une nouvelle ère de développement. Porté par les grands chantiers de la Coupe du monde 2030, la modernisation des infrastructures et la relance immobilière, il se positionne comme l’un des moteurs de la croissance économique nationale, indique BKGR.

Les enjeux environnementaux et les défis du développement durable s’imposent également dans cette dynamique. Les grands groupes du secteur intègrent désormais des stratégies éco-responsables, à l’image de LafargeHolcim Maroc, qui maximise l’utilisation des énergies vertes (96% de sa consommation en 2024), ou de Sonasid, qui développe des produits sidérurgiques à faible empreinte carbone.

D’ici 2030, le Maroc pourrait ainsi se hisser parmi les pays africains les plus avancés en matière d’infrastructures et d’urbanisme, consolidant son attractivité économique et son rayonnement international. Le BTP, longtemps en léthargie, redevient donc aujourd’hui un levier stratégique de transformation et de prospérité.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO