Retrait du PPS du gouvernement. Un sursaut d’orgueil ?

Alors que la décision du PPS de basculer dans les rangs de l’opposition a été interprétée de part et d’autre par une tentative d’anticiper le verdict du remaniement ministériel, le parti du livre réfute cette analyse et épingle la gestion «technique» des tractations par El Otmani alors que le contexte impose un positionnement politique fort du gouvernement.
S’agit-il d’une tentative pour une sortie honorable du gouvernement ou d’une véritable indignation face à la situation actuelle de la coalition gouvernementale ? À la veille du remaniement ministériel, la décision du parti du progrès et du socialisme de quitter le navire gouvernemental était certes plus au moins inattendue en raison des récentes déclarations de son chef de file confirmant le maintien de l’alliance actuelle mais pas surprenante. Il faut dire que le PPS a déjà brandi la menace de quitter l’actuel gouvernement. Ce parti se sent de plus en plus isolé dans l’actuelle coalition gouvernementale marquée par des tirs à la corde et des passe d’armes entre les alliés alors qu’il était auparavant fort du soutien de Benkirane. Les critiques justifiant la décision de départ des héritiers d’Ali Yata ne datent pas d’aujourd’hui. L’insatisfaction des progressistes quant à la gestion des dossiers par la majorité gouvernementale et des relations tendues entre ses composantes ont en effet été affichées à plusieurs reprises.
En témoignent les discours musclés de Nabil Benabdellah à l’égard des tiraillements de la majorité et les communiqués du Bureau politique, qui ont à plusieurs reprises tiré la sonnette d’alarme sur la situation actuelle. Alors pourquoi le PPS a-t-il décidé de quitter le gouvernement maintenant? Est-ce pour sauver sa dignité et sa crédibilité en raison d’une énième réduction de sa représentativité au gouvernement et tenter, ainsi, un coup de communication électoraliste, comme le soulignent certains observateurs ? Contacté par les Inspirations ÉCO, Karim Taj, membre du bureau politique du PPS, est on ne peut plus catégorique : «Le PPS n’a jamais discuté la répartition des portefeuilles qui est un point secondaire. D’ailleurs, il est normal que le nombre des postes accordés à chaque parti diminue dans un gouvernement ramassé».
Ce jeune dirigeant progressiste tire à boulets rouges sur la gestion des tractations du remaniement ministériel. De son côté, El Otmani est épinglé en raison de sa gestion «technique» du dossier alors que les enjeux politiques sont très grands et les directives du souverain claires.
«Le PPS a plaidé pour une déclaration politique forte dans le contexte actuel marqué par une défiance à l’égard des institutions. Il faut un portage politique. Le pays a en effet besoin d’une secousse politique marquée par la présence d’un gouvernement fort et solidaire contrairement à ce qui se passe actuellement. Or, il s’avère que le changement n’est pas à l’ordre du jour», ajoute-t-il.
Par conséquent, l’on s’attend à ce que la décision du bureau politique du PPS soit actée, demain, par le comité central du parti. En effet, le PPS, qui a fait son baptême de feu au gouvernement d’alternance en 1998 entend désormais se positionner dans les rangs de l’opposition. Certes, son poids numérique ne va pas lui permettre de peser lourdement sur la révision des textes législatifs mais il pourra animer les débats politiques et rendre au parti son image d’antan, bien avant qu’il ne décide de participer à la gestion des affaires gouvernementales il y a 21 ans. C’est indéniable, le parti du livre gagnerait en effet à redorer son blason. Le mariage de la carpe et du lapin avec le PJD a déteint sur l’image des progressistes et leur a porté une estocade fatale aux dernières élections législatives.
Néanmoins, cette alliance s’est vite fissurée sous le mandat de Saâd Dine El Otmani. La suppression du secrétariat d’État que gérait Charafat Afilal sans que le PPS n’en soit informé et le refus du PJD d’accorder la présidence de la Commission du contrôle des finances publiques à son allié progressiste en sont les causes ; deux coups assommants pour cette coalition contre nature vertement critiquée en dépit des raisons brandies par les camarades de Nabil Benabdellah pour justifier leur choix politique. En conclusion, il faut dire que le courant ne passe plus non seulement avec le parti de la lampe mais aussi avec les autres alliés gouvernementaux. La cohabitation même avec l’allié de la koutla s’est avérée difficile en raison des positions du premier secrétaire socialiste qui n’a pas hésité récemment à décocher implicitement ses flèches contre les progressistes. Néanmoins, force est de constater qu’aucune formation de la majorité gouvernementale actuelle ne peut prétendre détenir un allié fort. Chaque parti politique fait en effet cavalier seul et certaines formations se livrent à une course effrénée pour les prochaines échéances électorales.
Remaniement ministériel : un test difficile
Le chef de gouvernement est très attendu pour répondre aux critiques qui lui sont adressées. Le remaniement ministériel est un véritable test pour El Othmani qui est appelé à honorer ce rendez-vous. Les prochains jours s’annoncent décisifs. La nouvelle structure gouvernementale est déjà fixée : le gouvernement sera composé de 22 à 23 postes, selon une source interne. Quant à la répartition des portefeuilles, cette étape n’est pas encore été entamée, selon le SG du Mouvement populaire, Mohand Laenser, contacté hier par Les Inspirations ÉCO : «cette question n’a pas encore été discutée». La gestion de cette étape s’avère délicate. Des informations ont récemment circulé sur une baisse significative des postes accordés au MP, à l’UC et à l’USFP qui ne seraient représentés que par un seul ministre.