Recherche scientifique: le Conseil national bientôt mis en place
Le Maroc s’achemine vers la concrétisation des dispositions de la loi-cadre de l’éducation et de la formation en matière de promotion de la recherche scientifique, un secteur resté longtemps le parent pauvre des politiques publiques au niveau national. Le chef de l’Exécutif, Saâd Dine El Otmani, vient d’annoncer que le gouvernement compte accélérer la mise en place du Conseil national de la recherche scientifique, comme stipulé par la loi cadre. La mission de cette entité est de faire le suivi de la stratégie de la recherche scientifique et technique et de l’innovation, mais aussi d’assurer la coordination entre tous les intervenants dans ce domaine. Selon l’article 16 de la loi-cadre, l’État est appelé à prendre les mesures nécessaires pour asseoir un système national institutionnel et intégré assurant une meilleure coordination entre les différents acteurs dans le domaine de la recherche scientifique et technique et l’innovation, garantissant la rationalisation des ressources et le partage des expériences ainsi que l’augmentation du rendement.
Augmentation du budget
Il est également préconisé d’augmenter le budget général dédié à la recherche scientifique. Rappelons à cet égard que, sur le plan du financement, la recherche scientifique au Maroc n’a jamais été considérée comme un secteur prioritaire. En témoigne le budget qui lui est consacré: environ 0,8% du PIB. Le financement des structures concernées et des programmes de recherche n’est pas encore à la hauteur des aspirations. À titre d’exemple, le Fonds national de soutien à la recherche scientifique et au développement technologique est doté, en 2020, d’un budget d’à peine 22,5 MDH alors que la loi-cadre préconise la mobilisation des ressources financières nécessaires au profit de ce fonds (article 49) pour rattraper le retard en matière d’équipement et réaliser les programmes et projets de recherche scientifique conformément aux priorités fixées par la stratégie nationale du secteur. Il s’agit aussi de financer les programmes de formation et de mise à niveau des ressources humaines travaillant dans la recherche scientifique, notamment les chercheurs et les experts. De grands efforts restent à déployer pour rattraper le retard abyssal en la matière et faire des universités des centres de promotion de la recherche scientifique. Une enveloppe de seulement 83,23 MDH est dédiée en 2020 au financement de la recherche scientifique et de l’innovation à travers les appels à projets nationaux, d’après les données du ministère de l’Éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Et seule une enveloppe de quelque 11,2 MDH devait être débloquée au cours de cette année pour l’amélioration des études au cycle du doctorat et la promotion de la recherche scientifique et de l’innovation… En raison de la conjoncture actuelle, le département d’Amzazi a débloqué 10 MDH pour la mise en place d’un programme de soutien à la recherche scientifique et technologique en lien avec le Covid-19.
Ressources supplémentaires
D’autres initiatives seront visiblement lancées grâce à la mobilisation des ressources financières supplémentaires. L’augmentation du budget du secteur est en vue dans le cadre de la loi de Finances rectificative. Selon le chef de gouvernement, la recherche scientifique figure parmi les secteurs prioritaires dans le cadre de ce texte qui doit bientôt atterrir au Parlement après son adoption par le Conseil des ministres et le Conseil de gouvernement. Désormais, l’investissement dans la recherche doit être considéré comme un investissement productif, comme l’ont souligné à plusieurs reprises les parlementaires. Depuis le début de la crise déclenchée par le Covid-19, la nécessité d’ériger le secteur en priorité est toujours évoquée dans les débats, tant au niveau institutionnel que sur les réseaux sociaux. Le secteur privé est appelé à jouer un rôle essentiel dans la recherche scientifique. La loi-cadre préconise le développement du partenariat public-privé en matière de recherche scientifique. Au Maroc, on en est encore loin. La participation du secteur privé dans les efforts de développement de la recherche et du développement est encore très timide dans notre pays. La recherche & développement n’est mise en place au Maroc que par le tiers des entreprises. De grandes attentes sont ainsi nourries dans le secteur privé, dont les fonds ne financent que 22% de l’activité de recherche-innovation, alors que ce taux dépasse les 80% dans les meilleurs systèmes de recherche innovation au niveau mondial. Le reste est majoritairement financé par l’État à hauteur de 73%.
L’amélioration de la gouvernance s’impose
Outre la promotion du financement du secteur, l’amélioration de son système de gouvernance s’impose. La gestion administrative et financière des projets de recherche scientifique au Maroc est en effet totalement incompatible avec la nature et les spécificités des activités de recherche scientifique et d’innovation, comme le relèvent les responsables du secteur. Une inadéquation totale est relevée entre, d’une part, les procédures administratives d’engagement des financements alloués à la recherche, et d’autre part, les réalités de la recherche scientifique, acculée à une réactivité et une compétitivité extrêmes, comme l’a déjà souligné Saaïd Amzazi il y a quelques mois. Cette situation entraîne des répercussions lourdes de conséquences sur la production scientifique nationale et décourage les chercheurs.