Mondial 2030 : un dispositf fiscal avantageux pour la FIFA
Exonération d’impôts sur les sociétés et les revenus, franchise de TVA, exemptions de droits : découvrez tous les avantages fiscaux consentis par le Maroc à la FIFA dans le cadre du PLF 2025.
Exonérations d’IS, d’IR, de TVA, de droits d’enregistrement… La politique d’attractivité du Maroc envers la FIFA se précise pour 2025. Dans un contexte de la préparation de la Coupe du monde de football 2030, qui sera co-organisée par le Maroc, l’Espagne et le Portugal, le Royaume vient de franchir une étape décisive.
La Commission des Finances de la Chambre des représentants a confirmé l’adoption d’un régime d’incitations fiscales en faveur des représentations de la Fédération internationale de football association (FIFA) au Maroc. Des avantages de taille mais qui appellent une vigilance particulière sur leur application, commente analyste.
Exonérations totale et permanente de l’IS
Selon la note de présentation du Projet de loi de finances 2025, les principales exonérations accordées à la FIFA et ses représentations au Maroc sont au nombre six. Commençons par l’exonération totale et permanente de l’impôt sur les sociétés accordées aux représentations de la FIFA au Maroc pour leurs activités conformes aux statuts de l’organisation. C’est l’une des mesures phares de ce régime fiscal incitatif.
Contrairement aux régimes temporaires d’exonération qui existent au Maroc pour d’autres secteurs, celui accordé à la FIFA est permanent et sans limitation dans le temps. Cela confère une grande visibilité et une stabilité fiscale sur le long terme aux représentations de la FIFA installées au Royaume. L’exonération ne concerne cependant que les activités et opérations directement liées à l’objet et aux statuts de la FIFA. Cela exclut donc en principe les activités purement commerciales ou lucratives qui ne seraient pas en lien avec la promotion et le développement du football.
Rappelons qu’au Maroc, le taux d’imposition sur les sociétés varie de 15% à 33% selon la tranche de résultat net. Le gouvernement prévoit un alignement à 20% pour les résultat nets inférieurs à 100 millions de dirhams d’ici 2026. Avec de tels taux d’impôt sur les sociétés, cette mesure représente une économie fiscale considérable pour la FIFA sur ses bénéfices réalisés localement. Cela renforcera d’autant plus l’attrait du Royaume comme base opérationnelle régionale pour la fédération. Néanmoins, «le fisc devra vraisemblablement mettre en place un contrôle rigoureux pour s’assurer que seules les activités statutaires bénéficient de l’exonération. Un cadre juridique et des procédures claires devront également être définis à cette fin», souligne un analyste.
Exonération de la retenue à la source sur les dividendes distribués
L’exonération de la retenue à la source sur les dividendes distribués par les représentations de la FIFA au Maroc à la FIFA elle-même ou à ses entités affiliées est une autre mesure clé du régime fiscal incitatif. En temps normal, les dividendes versés par une filiale au Maroc à sa société mère non-résidente sont soumis à une retenue à la source au taux de 12,5% en 2024, 11,25% en 2025 et 10% en 2026. Cette exonération permet donc d’éviter cette imposition et de rapatrier la totalité des bénéfices réalisés localement vers la FIFA ou ses affiliés à l’étranger, sans ponction fiscale.
Cette mesure s’inscrit dans la logique de prévention de la double imposition que le Maroc cherche à offrir à la FIFA. Les dividendes rapatriés ne seront imposés qu’une seule fois, dans le pays de résidence de la fédération (Suisse), évitant ainsi une double taxation économique. Au-delà de l’économie d’impôt, cette exonération facilitera la circulation des flux financiers et la mobilité des capitaux entre les différentes entités du groupe FIFA. Cela leur offrira une plus grande flexibilité dans la gestion de leur trésorerie globale.
La FIFA et ses affiliés étrangers ne paieront pas d’impôt au Maroc sur les revenus perçus
L’exonération de la retenue à la source sur les rémunérations versées par les représentations de la FIFA au Maroc à la FIFA elle-même ou à ses entités affiliées non-résidentes est une autre mesure phare de ce régime fiscal dérogatoire.
Normalement, les sommes versées par une société marocaine à des non-résidents (personnes physiques ou morales) sont soumises à une retenue à la source libératoire. Avec cette exonération, la FIFA et ses affiliés étrangers ne paieront donc pas d’impôt au Maroc sur les revenus perçus (prestations de services, redevances, rémunérations de gestion etc.).
Cette mesure facilitera grandement les mouvements et la mise à disposition de personnel qualifié entre les différentes entités du groupe FIFA. Les rémunérations et charges salariales pourront être mutualisées et refacturées en interne sans taxation marocaine. Pour certains types de services à forte valeur ajoutée, les retenues à la source non-résidents peuvent atteindre 30% au Maroc. L’exonération représente donc un avantage fiscal très substantiel pour optimiser la gestion des ressources humaines de la FIFA au niveau régional.
Exonération de la TVA à l’intérieur et à l’importation
L’exonération de la TVA à l’intérieur et à l’importation sur les biens, matériels, marchandises, services et opérations liés aux activités statutaires de la FIFA et ses représentations au Maroc est une autre mesure majeure de ce régime fiscal dérogatoire.
Cette disposition accorde une franchise totale de TVA (taux normal de 20% au Maroc) sur tous les achats, acquisitions et importations effectués par la FIFA pour ses besoins opérationnels au Maroc, conformément à son objet statutaire. C’est un avantage très substantiel en termes d’économies de coûts. En supprimant la TVA, cela permettra de fluidifier grandement les opérations locales de la FIFA. Pas de formalités de récupération de TVA à effectuer, ni de problèmes de décalage de trésorerie liés au paiement initial de la taxe.
Cette exonération sera particulièrement avantageuse pour l’organisation d’événements sportifs comme des matchs ou des compétitions de football au Maroc. Tous les achats liés (équipements, services, etc) seront totalement défiscalisés.
Exonération des droits d’enregistrement et de timbre
L’exonération des droits d’enregistrement et de timbre pour tous les actes passés par les représentations de la FIFA au Maroc, y compris les titres de séjour de leur personnel, est une autre facette de ce régime fiscal avantageux.
Cette mesure couvre l’ensemble des droits d’enregistrement et de timbre auxquels la FIFA pourrait être assujettie au Maroc. Cela concerne les actes relatifs à la constitution de sociétés, les acquisitions immobilières, les baux, les contrats, etc. Mais aussi les titres de séjour et de travail de son personnel expatrié. Au Maroc, les droits d’enregistrement sur les actes varient de 4 à 6% de la valeur en cause.
Sur des opérations immobilières ou de hauts montants, l’économie d’impôt sera substantielle pour la FIFA. L’exonération sur les titres de séjour et de travail est un véritable plus pour faciliter l’implantation et la rotation du personnel expatrié de la FIFA au Maroc, sans charges administratives ni fiscales supplémentaires.
Exonération de l’IR pour le personnel étranger
L’exonération de l’impôt sur le revenu pour le personnel étranger employé par les représentations de la FIFA au Maroc est une mesure fiscale très avantageuse de ce régime dérogatoire. Cette disposition accorde une franchise totale d’impôt sur le revenu aux salariés et personnels expatriés étrangers travaillant pour la FIFA au Maroc.
Leurs rémunérations, primes et avantages en nature ne seront donc pas imposés localement. Cette exonération fiscale rendra le Maroc beaucoup plus attractif aux yeux des cadres et experts internationaux que la FIFA souhaiterait attirer et employer dans ses bureaux locaux. Leurs salaires nets seront majorés d’autant. Cela facilitera aussi grandement la mobilité et les rotations de personnels au sein du groupe FIFA à l’échelle régionale, sans problématiques fiscales complexes à gérer.
Il faut dire que de nombreuses organisations internationales bénéficient déjà d’un tel régime fiscal privilégié pour leur personnel expatrié dans les pays hôtes. Le Maroc s’alignerait ainsi sur ces pratiques. Certains font cependant part de leurs craintes que cette niche fiscale n’accroisse l’attrait des talents étrangers au détriment des compétences nationales, créant un appel d’air défavorable.
Une stratégie d’attractivité multidimensionnelle
En accordant ces avantages fiscaux majeurs, le gouvernement poursuit plusieurs objectifs stratégiques. Tout d’abord, renforcer l’image du Royaume en tant que destination sérieuse pour les organisations internationales, notamment à l’approche de la Coupe du Monde 2030 qu’il co-organisera. Ensuite, stimuler les investissements étrangers directs et le développement d’infrastructures sportives sur son territoire.
Cette stratégie d’exonérations ciblées s’inscrit donc dans une politique économique globale visant à diversifier les secteurs d’activités, attirer les investissements productifs et développer l’expertise locale. Des incitations similaires existent déjà pour les centres de recherche, les sociétés holdings offshore ou encore les zones franches d’exportation. En définitive, les exonérations accordées à la FIFA témoignent de la volonté du Maroc de se positionner comme un hub économique régional attractif.
Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO