Maroc –Espagne : le génie diplomatique du Roi change la donne !
Il aura fallu un an de crise entre Rabat et Madrid, pour que le Maroc réussisse à faire bouger les lignes chez le voisin espagnol. Impensable il y a un an, l’Espagne soutient désormais le Plan d’autonomie marocain au Sahara. Tout ceci grâce au génie diplomatique du Roi Mohammed VI.
C’était en avril 2021 : l’hospitalisation en catimini du chef des séparatistes du Polisario dans un hôpital espagnol avait déclenché une crise diplomatique d’une rare violence entre le Maroc et l’Espagne. Pour une première, le gouvernement espagnol semblait passer outre sa position de neutralité habituelle. Ce qui a considérablement froissé Rabat. Obligeant le Maroc à rappeler son ambassadrice en poste à Madrid. Plusieurs mesures de ripostes ont également été activées, allant de l’exclusion des ports espagnols de l’Opération «Marhaba», à la crise migratoire de mai 2021 à Sebta, marquée par l’arrivée record de milliers de migrants dans l’enclave occupée. Sur les plans politique et économique, les issues ont presque toutes été verrouillées entre les deux voisins. Une crise qui a mis l’Union européenne et ses grandes puissances, notamment la France, dans un grand embarras, et qui réjouissait le voisin algérien, où l’on était convaincu d’avoir administré un coup fatal aux relations maroco-espagnoles.
Pacte de réconciliation
Cela c’était sans compter avec le génie politique et diplomatique du Roi Mohammed VI. Le Souverain, a réussi, presque un an, jour pour jour, après le déclenchement de l’affaire Brahim Ghali, à complètement renverser la vapeur. Jeudi 7 avril dernier, en plein mois de Ramadan, c’est le chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, lui-même, qui vient au Maroc sceller un pacte de réconciliation avec le Souverain. Un retournement de situation extraordinaire, qui ne manquera pas, à coup sûr, de rester définitivement dans les annales de l’histoire.
Non seulement l’Espagne était ravie de renouer ses relations avec le Maroc, mais, plus encore, un acquis historique a été obtenu par Rabat : l’Espagne déclare ouvertement soutenir le Plan d’autonomie marocain au Sahara. On n’en est pas encore à la reconnaissance formelle de la marocanité du Sahara, comme ont fait les États-Unis sous le mandat de Donald Trump. Mais, pour qui connaît le rôle central de l’Espagne dans la genèse de ce différend, et la position de neutralité toujours affichée par Madrid, saura qu’il s’agit là d’un grand bond en avant. Plus encore, comme le soutiennent les analystes politiques, il s’agit tout simplement d’une grande évolution, voire d’une révolution.
Relance économique
Dès la signature de la Déclaration conjointe publiée à l’issue de la visite au Maroc, jeudi 7 avril, du président du gouvernement espagnol, tout est rentré dans l’ordre. Les échanges économiques, qui n’avaient que peu souffert du froid glacial qui s’était abattu sur les relations entre Madrid et Rabat, ont commencé à connaître un nouveau tempo, plus cadencé. Désormais, l’Espagne approvisionne le Maroc en gaz, via l’utilisation du flux inverse du Gazoduc Maghreb-Europe (GME). La reprise des liaisons maritimes de passagers a également été concrétisée. Du côté espagnol, on espère ainsi se rattraper cette année avec l’opération «Marhaba 2022», dont la flotte maritime est essentiellement espagnole, après la perte de 1,15 milliard d’euros suite à leur exclusion de ce dispositif l’année dernière.
Nouvelle feuille de route
Sur un autre volet, le groupe de travail sur la délimitation des espaces maritimes dans la façade atlantique devrait être réactivé, «dans l’objectif de réaliser des avancées concrètes», poursuit la Déclaration conjointe. De même, le Maroc et l’Espagne engagent des discussions concernant la gestion des espaces aériens. Selon la Déclaration conjointe, «la pleine normalisation de la circulation des personnes et des marchandises sera également rétablie de façon ordonnée, y compris des dispositifs appropriés de contrôle douanier et des personnes au niveau terrestre et maritime. Il s’agit notamment des présides occupés de Sebta et Mellilia, dont la fermeture impacte les flux commerciaux des deux côtés. En un mot, de la politique à la culture, en passant bien sûr par les questions économiques, Rabat et Madrid décident de faire table rase de leurs divergences, pour s’engager dans une nouvelle voie de partenariat et de bon voisinage et se mettre à l’abri des disputes inutiles.
Pedro Sanchez
Président du gouvernement espagnol
«Je tiens à saluer le rôle déterminant joué par SM le Roi Mohammed VI pour mettre un terme à la crise entre les deux pays. J’exprime aussi ma reconnais- sance pour le rôle constructif du Souverain qui a permis d’entamer cette nouvelle étape de compréhension et de bon voisinage entre l’Espagne et le Maroc».
Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO