Lutte contre le chômage : un plan Marshall pour l’emploi

L’objectif affiché par la feuille de route de l’emploi est d’assurer une création nette de 350.000 postes pérennes à l’horizon 2026. Il s’agit également de faire baisser le taux de chômage de 4,3 points en cinq ans, pour atteindre un taux cible de 9% d’ici 2030.
Face à la montée du chômage, qui a atteint 13,3% avec un taux d’activité d’à peine 43,5% en 2024, le gouvernement a décidé de prendre le taureau par les cornes en présentant, le 26 février, une politique dédiée à l’emploi.
Pour rappel, le nombre de chômeurs a atteint le seuil historique de 1,638 million avec des prévisions de croissance modestes sur le plan économique.
L’objectif affiché par la feuille de route de l’Emploi, à travers les différentes interventions préconisées, est d’assurer une création nette de 350.000 postes pérennes à l’horizon 2026. Il s’agit également de faire baisser le taux de chômage de 4,3 points en cinq ans, pour atteindre un taux cible de 9% d’ici 2030.
Toutefois, le risque auquel est confrontée cette feuille de route est son exposition aux conditions climatiques défavorables et aux chocs externes. L’ambition est d’atteindre, à l’horizon 2030, 12,1 millions de Marocains employés (dont environ 5% dépendant directement de l’impact de la pluviométrie sur l’emploi agricole). À cela s’ajoute la création de plus de 1,45 million d’emplois nets supplémentaires (formels et informels).
Une enveloppe additionnelle de 15 MMDH
Pour stimuler le marché du travail à travers la poursuite de la mise en œuvre de la nouvelle charte de l’investissement et la mobilisation du secteur privé, une enveloppe additionnelle de près de 15 milliards de dirhams (MMDH) a été mobilisée. Il s’y s’ajoute un montant supplémentaire de 12 MMDH dédié à la stimulation de l’investissement.
Outre le dispositif dédié aux grandes entreprises en vigueur depuis mars 2023, une attention particulière sera accordée au renforcement de la dynamique et de la résilience du segment des TPME. Dans cette perspective, le dispositif d’appui aux TPME, prévu par la charte de l’investissement, sera déployé comme levier stratégique majeur à partir de cette année.
Dans un registre parallèle, une enveloppe de 1 MMDH a été consacrée au monde rural afin de limiter les effets de la sécheresse en plus d’une autre enveloppe supplémentaire de 2 MMDH dédiée à l’amélioration de l’efficience des programmes de promotion de l’emploi.
Dans le détail, la feuille de route table sur plusieurs secteurs jugés essentiels pour stimuler l’emploi. Il s’agit notamment de l’industrie, y compris l’artisanat, le commerce, le BTP, le transport non touristique, l’administration générale et les services sociaux fournis à la collectivité, le tourisme et d’autre services.
Huit interventions prioritaires
La feuille de route a été élaborée autour de cinq axes dont quatre axes stratégiques qui structurent les priorités d’intervention. Il s’y ajoute un axe transversal de gouvernance et de pilotage de l’emploi autour de la création de valeur et sa traduction en emplois, l’accompagnement de la transition agricole ainsi que le renforcement des catalyseurs du marché de l’emploi et l’amorçage de l’amélioration du taux d’activité. Ces axes se traduisent en huit interventions prioritaires qui apportent des solutions ciblées aux problématiques de l’emploi. Elles seront pilotées sur deux horizons temporels.
À court terme, trois interventions auront pour objectif de permettre, à horizon 2026, de sécuriser une création d’emploi nette de 350.000 emplois pérennes à travers l’accompagnement des TPME. Ceci devrait passer par l’accélération de la mise en œuvre du dispositif de la charte dédiée aux investissements pour lancer de nouveaux projets qui porteront 35.000 à 40.000 créations d’emplois.
À cela s’ajoute le renforcement des politiques actives de l’emploi (Idmaj, Tahfiz Taehil), la généralisation de l’apprentissage, et une prime à l’emploi spécifique aux TPE permettant d’atteindre 422.500 insertions en 2025, avec un budget supplémentaire de 2 MMDH. Il est question aussi de ralentir les pertes agricoles par un plan d’action qui sera déterminé par le ministère de l’Agriculture.
À l’horizon 2026, il faudra adresser des problématiques plus profondes de l’emploi, notamment autour de cinq priorités. Il s’agit de la fusion des politiques actives de l’emploi avec une prime à l’emploi unique qui stimule la création d’emploi au sein des entreprises ainsi que du renforcement des missions et responsabilités de l’ANAPEC en établissant un parcours d’intermédiation intégré. Celui-ci doit commencer par des «Career Centers» dans l’éducation nationale et l’accompagnement personnalisé des chômeurs.
Le plan prévoit également la réduction des barrières à l’activité des femmes, une sécurisation du transport et la réduction d’un tiers du décrochage scolaire à horizon 2026, pour atteindre 200.000 élèves en 2026 contre 300.000 aujourd’hui. À signaler enfin l’amélioration des dispositifs de formation, en veillant à l’adéquation et à l’agilité des différents cursus de formation par rapport aux besoins et attentes du marché de travail.
Gouvernance de la feuille de route
La gouvernance retenue pour ce chantier national stratégique s’articule autour de trois volets. Il s’agit :
. Du pilotage et suivi de la mise en œuvre de la feuille de route nationale de l’emploi, assurés par le comité ministériel de l’emploi. Présidé trimestriellement par le chef du gouvernement, il réunit les parties prenantes clés de ce chantier.
. De la gouvernance de la donnée, portée par la DEPF au sein du ministère de l’Économie et des Finances. Fondée sur les données émanant du HCP et axée sur la centralisation et l’harmonisation des définitions et des indicateurs de l’emploi des autres producteurs de donnée (CNSS, DGI), elle vise à assurer une base commune d’analyse et d’évaluation, essentielle à la prise de décision et au pilotage.
. De l’instauration d’une cellule de suivi de la mise en œuvre des interventions et pilotage. Portée par les services du chef du gouvernement, elle vise à assurer le suivi opérationnel des initiatives et projets d’incitation à la création d’emplois, dérivés de cette feuille de route et des stratégies sectorielles, en collaboration avec les départements concernés.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO